C’est clair, pour le Royaume-Uni, l’immigration est d’abord une question de compétence et de compétitivité. Mark Harper le dit clairement dans un langage pragmatique. Le ministre, qui vient de séjourner à Alger les 26 et 27 juin derniers, admet que la migration non limitée influe négativement sur l’économie britannique et évoque la notion de “légitimité” dans le cadre du traitement d’un dossier de visa. Néanmoins, il considère qu’un refus n’est pas définitif et que le demandeur a toujours la possibilité d’introduire un nouveau dossier avec un complément d’informations nécessaires.
Liberté : Le débat sur l’immigration et le dossier des visas sont un thème chaud qui revient ces derniers mois, surtout avec la montée de l’extrême droite. Pouvez-vous nous expliquer la nouvelle vision du Royaume-Uni sur ces questions ?
Mark Harper : Nous avons toujours été clairs que la migration a enrichi notre culture et renforcé notre économie. Nous devons pouvoir attirer les meilleurs et les plus brillants afin que nos compagnies demeurent compétitives et il y a eu effectivement une augmentation de 5% dans le nombre de visas accordés aux personnes qualifiées sous le type Tier 2 durant les trois premiers mois de 2013. Cependant, la migration non limitée met une pression inacceptable sur les services publics.
C’est pour cela que nous avons introduit un nombre de mesures qui non seulement réduiront le taux net de la migration à des niveaux viables, mais protégeront également les compagnies et les institutions vitales à notre économie.

Le Royaume-Uni demeure ouvert à tous ceux qui ont des raisons légitimes de visiter, que cela soit pour des affaires, les études ou pour le tourisme. Notre politique à travers le monde et également pour l’Algérie est de délivrer des visas de visiteurs de six mois avec entrées multiples. Mon conseil serait de toujours déposer sa demande le plus tôt possible et de s’assurer de fournir toutes les pièces qui accompagneraient cette dernière. J’ai été ravi de me retrouver à Alger cette semaine pour des pourparlers avec les ministres et responsables algériens. Nos discussions sur les questions des visas et de l’immigration démontrent on ne peut mieux la dimension qu’ont pris nos relations bilatérales ces dernières années. Je suis confiant que ces relations se renforceront encore davantage.
Il y a un certain a priori qui fait que les étrangers, en général, et les Britanniques, en particulier, considèrent chaque demandeur de visa comme un potentiel candidat à l’immigration. Dans certains cas, les refus de visas ne sont pas justifiés. Qu’en pensez-vous ?
Nous accueillons les visiteurs légitimes au Royaume-Uni. Chaque demande de visa est examinée selon ses mérites et conformément aux lois sur l’immigration. Il incombe au demandeur de visa de s’assurer qu’il fournit toute la documentation nécessaire pour soutenir sa demande. Toute personne qui se voit refuser un visa de visiteur pourrait déposer une autre demande et fournir de plus amples informations par rapport à cette dernière. L’ambassade britannique à Alger a lancé en février dernier le “WorldBridge Service”, un service de traitement de demande de visa qui permet d’accélérer la démarche en contrepartie de la somme de 10 000 DA. Cette somme sera à ajouter sur le coût initial du visa pour le Royaume-Uni.
Cela signifie-t-il qu’il y a beaucoup d’Algériens demandeurs de visa britannique ? Quelle évaluation faites-vous de la demande et du taux de refus ?
Nous soutenons la croissance économique à travers un service de visa efficace. Les services de visa et de l’immigration britanniques opèrent à Alger à travers un centre externalisé pour la collecte de demandes de visa, géré par notre partenaire commercial CSC (WorldBridge). Les demandeurs de visa remplissent un formulaire en ligne, puis prennent rendez-vous pour aller au VAC afin de fournir les données biométriques et les pièces requises. Nous avons introduit depuis février 2013 un service de visa prioritaire en Algérie qui permet aux demandeurs qui voyagent souvent de payer plus pour avoir un traitement plus rapide de leur demande, avec un délai de traitement de cinq jours au lieu des 15 jours ouvrables. Ceci est un service optionnel que nous offrons aux demandeurs pour davantage de choix et de flexibilité. En termes de chiffres, 16 246 demandes de visa ont été déposées par des citoyens algériens à travers le monde en 2012, avec une augmentation de 6% (15 240) par rapport à 2011.
La Grande-Bretagne a toujours été une terre d’accueil pour les radicaux islamistes au point où dans les années 1990, on a qualifié certains quartiers londoniens de “Londonistan”. Existe-t-il aujourd’hui des restrictions en la matière, surtout depuis les attentats de 2007 ? La vision du Royaume-Uni a-t-elle changé vis-à-vis de cette mouvance qui se proclamait victime de la répression des régimes dans le monde arabe ?
Le terrorisme et l’extrémisme n’ont jamais eu de place dans notre société. La stratégie préventive du Royaume-Uni, faisant partie de la stratégie du gouvernement pour la lutte antiterroriste, vise à empêcher que des gens deviennent des terroristes ou qu’ils soutiennent le terrorisme. Ceci implique une contre-action pour faire face à l’idéologie extrémiste, aider à la protection des institutions des extrémistes et soutenir ceux qui risquent d’être victimes de radicalisation. Nous sommes engagés à combattre l’extrémisme dans toutes ses formes et de défier avec fermeté les comportements et opinions qui vont à l’encontre de nos valeurs partagées, notamment la démocratie, l’État de droit, l’égalité des opportunités et des traitements ainsi que la liberté d’expression.
En réaction aux évènements qui ont eu lieu récemment à Woolwich, le Premier ministre a mis en place un groupe de travail intergouvernemental qu’il préside personnellement et qui s’est déjà réuni pour commencer à explorer ce que nous pourrons faire contre l’extrémisme. Je suis au courant de la relation solide qui existe entre le Royaume-Uni et l’Algérie dans le domaine sécuritaire, et qui est devenue encore plus étroite depuis la signature de l’Accord sur le partenariat stratégique de sécurité par le Premier ministre, Cameron, et le président Bouteflika fin janvier.
Nos deux pays partagent l’expérience du terrorisme et ont ainsi beaucoup à gagner d’une relation de travail encore plus forte. Nous partageons la même approche par rapport au non-paiement de rançons aux terroristes et nous avons travaillé étroitement au niveau bilatéral et multilatéral afin de faire prévaloir cette politique à l’échelle internationale.
Le Printemps arabe a, certes, permis le changement de régimes dans la sphère arabe mais n’a pas eu d’incidences sur la limitation du flux migratoire vers l’Europe. Qu’en pensez-vous ?
En tant que ministre britannique pour l’Immigration, mon rôle est d’expliquer la politique britannique sur les visas et l’immigration. Nous continuons à accueillir tous ceux qui ont des raisons légitimes de visiter le Royaume-Uni et, comme je l’ai indiqué plus haut, reconnaissons le besoin d’attirer les plus brillants et les meilleurs pour s’assurer que nos compagnies demeurent compétitives. Toutes les demandes de visa sont examinées selon leurs propres mérites et conformément aux lois sur l’immigration. Il incombe aux demandeurs de s’assurer de fournir toutes les pièces nécessaires pour répondre aux exigences des lois sur l’immigration et pour accompagner leur demande. Toute personne qui se voit refuser un visa de visiteur pourrait déposer une autre demande et fournir de plus amples informations par rapport à cette dernière. Je sais que l’ambassadeur ici a entrepris un énorme travail de communication au cours de l’année dernière pour expliquer clairement la manière dont fonctionne notre système de visa. Ce travail va continuer cette année.
S T