Marché de la devise : des bureaux de change pourquoi faire?

Marché de la devise : des bureaux de change pourquoi faire?

argent.jpgIls ne prennent en charge l’activité des cambistes du square Port Saïd que dans un seul sens.

Le retour en grâce des bureaux de change, après plus de huit années d’interdiction d’activité, au motif que la mission d’échanger la devise contre des dinars était du domaine exclusif des banques, vient répondre à une situation de grande anarchie qui a terni l’image de la principale institution financière du pays. Apparue à la faveur du choc pétrolier qui a réduit les capacités du pays en matière de finance, la nécessaire organisation du marché de la devise pour éviter une saignée inutile, a été récemment formalisée par la publication au Journal officiel des «règles applicables aux transactions courantes avec l’étranger et aux comptes devises».

Le retour des bureaux de change aura été la seule innovation du règlement de la Banque d’Algérie. On retiendra que la levée du verrou ne signifie pas du tout une légalisation des pratiques du square Port Saïd. Il faut savoir, en effet, que les prérogatives de ces bureaux se limitent à l’achat des devises contre des dinars. Le contraire est proscrit et relève toujours du crime économique.

La seule exception concerne les non-résidents qui peuvent échanger des dinars contre des devises, à la seule condition que cette opération se fasse à «concurrence du reliquat des dinars en leur possession à la fin de leur séjour en Algérie et provenant d’une cession de devises préalablement réalisée», note le nouveau règlement de la BA.

Cela pour dire que les bureaux de change ne prennent en charge l’activité des cambistes du square Port Saïd que dans un seul sens. Il reste néanmoins que leur existence aura le mérite de séparer le bon grain de l’ivraie. La lutte contre le trafic de devise sera «légitimé», pour la simple raison que ceux qui en font leur gagne-pain seront orientés sur l’activité réglementée par la BA. De fait, les jeunes qui exhibent des liasses de billets de banque dans la rue seront désormais passibles de poursuites judiciaires et l’on pourrait même avancer que les jours du square Port Saïd sont comptés. En tout cas, c’est ce que suppose cette relance des bureaux de change.

Mais, il n’est pas dit, que cette réglementation «remaniée» soit efficace, pour deux raisons au moins. Les spécialistes de la finance remettent en cause la marge bénéficiaire, fixée à 1% seulement. Cette marge permet au cambiste de faire une recette intéressante à la seule condition que l’offre en devises étrangères soit conséquente.

En d’autres termes, il faut que le marché du change en Algérie engrange des sommes intéressantes, pour permettre aux «professionnels» du change de gagner sur la quantité. Cela est possible dans un pays touristique où le flux d’étrangers atteint une masse critique à même d’entrevoir un véritable marché.

En Algérie, ce qui ressort de l’activité du marché parallèle de la devise, c’est plutôt le contraire qui a cours. En effet, l’offre concerne principalement les monnaies européenne et américaine que les cambistes revendent aux Algériens contre des dinars. Ceci explique grandement la forte dévaluation du dinar sur les places du change informel. Ceci hypothèque-t-il toute la démarche des autorités financières?

Il est entendu que le gouvernement n’a d’autre choix que celui de combattre un phénomène préjudiciable à l’économie du pays et cela ne peut se faire que par la répression des trafiquants de devise. Quand bien même les bureaux de change n’attirent pas les cambistes au début, cela ne doit pas empêcher une lutte sans merci contre le trafic, estiment de nombreux observateurs qui mettent en évidence l’impérieuse nécessité de criminaliser une bonne fois pour toutes la pratique du change parallèle.

Une fermeté de l’Etat peut contribuer à rassurer les honnêtes commerçants intéressés par l’activité du bureau de change, même si, au regard de la situation du pays, elle n’est pas encore suffisamment rentable, notent les mêmes observateurs.