Le sit-in du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC) devant le ministère du Travail, à Alger, a été réprimé par la police avant d’être autorisé sous haute surveillance. Des chômeurs, venus de plusieurs régions d’Algérie, ont manifesté contre le chômage, la précarité et l’exclusion sociale.
Très tôt ce matin, un important dispositif policier a été installé à la place du 1er mai, devant la Maison de la Presse, devant la Maison du peuple afin d’empêcher la tenue de la manifestation.
Ils étaient une dizaine à atterrir devant le siège du ministère du Travail situé dans le quartier de Belcourt avant que les forces anti émeutes n’interviennent pour disperser violemment la foule décidée à camper devant le portail du ministère. La police a interpellé 4 manifestants avant de les relâcher quelques instants plus tard.
Les manifestants scandaient des mots d’ordre hostile au pouvoir et exprimaient leurs ras le bol et leur détresse sociale. « Barakat barakat min nahb edollarat » Cessez, cessez du voler les dollars), « One two three, où va l’Algerie ? » « Rendez-nous notre nationalisme », pouvait-on les entendre crier.
L’initiative d’un sit-in devant le bâtiment du ministère du Travail a été lancée par les chômeurs de plusieurs villes d’Algérie ( Ouargla, Ghardaïa, Laghouat …) avec à leur tête le syndicaliste Yacine Zaid. Le collectif des manifestants a été rejoint par les journalistes-cachetiers licenciées de la radio nationale. Quatre délégués ont été reçu par des repentants du ministère du Travail auprès de qui ils ont exposé leur doléances.
Les manifestants entendaient dénoncer le chômage, la difficulté de l’accès à l’emploi ainsi que la précarité et demandaient également une allocation chômage de 50% du SNMG. Celui a été plafonné en 2008 à 15 000 dinars (150 euros) alors que le taux officiel du chômage est de 10 %. Un délégué venu de Laghouat, à 600 km au sud d’Alger, l’une des wilayas les plus riches d’Algérie en raison de fiscalité pétrolière, s’est présenté avec un liste de 756 diplômés encore au chômage.
Un père de famille, chômeur de son état, venu avec son épouse et son petit garçon âgé de cinq ans (atteint d’une maladie rare) a menacé de se suicider. « Tout ce que je demande c’est un visa pour que mon fils aille se faire soigner à l’étranger, raconte-il. Je suis parti en Tunisie pour tenter de lui procurer des soins, mais les médecins m’ont demandé de vendre les reins de mon fils parce que son cas, disent-ils, est foutu. Je ne suis plus quoi faire ! Je suis désespéré. Je vais me brûler ainsi je ne pourrais plus souffrir. »
Lorsque ce père s’est plaint auprès du ministre de la Santé, Djamel Ould Abbes, celui-ci a offert à son fils une chaise roulante.
Sid Ali est un autre cas de désespoir. A 35 ans, ex-agent de sécurité auprès de l’entreprise canadienne SNC Lavallin, chargée de la construction d’un barrage hydraulique, est venu se plaindre du chômage et de l’ingratitude des autorités. « J’ai été recruté par une société de gardiennage pour 13 000 dinars (130 euros). Maintenant je suis sans emploi parce qu’on nous a dit que les travaux sont achevés. Comment vivre sans travail ? »
Sid Ali, ancien patriote qui a crapahuté dans les maquis dans le cadre de la lutte anti-terroriste estime que l’Etat s’est montré ingrat à l’égard de ceux qui l’ont servi. « Nous avons combattu le terrorisme, aujourd’hui je me retrouve sans boulot. Je n’en peux plus. Je suis comme une bonbonne de gaz prête à exploser. »
La manifestation a failli tourner au drame lorsqu’un agent de Netcom, entreprise de nettoyage d’Alger, a tenté de se suicider par immolation. Venu avec un bidon d’essence, l’homme s’est aspergé d’essence et a failli allumer son briquer avant qu’il ne soit empêché par un journaliste du quotidien El Watan de commettre l’irréparable.
La quarantaine, l’homme se plaignait de toucher 5000 dn (50 euros) par mois et réclamait un logement.