Mali / Premier tour d’une présidentielle pas comme les autres Jour de vote

Mali / Premier tour d’une présidentielle pas comme les autres Jour de vote

– Les Maliens ont commencé à voter ce matin pour sortir le Mali de 18 mois de crise politique et militaire.

Près de 6,9 millions d’électeurs sont appelés à voter à cette présidentielle à laquelle se présentent vingt-sept candidats, dont deux grands favoris : Ibrahim Boubacar Keïta, 69 ans, ancien Premier ministre, et Soumaïla Cissé, 63 ans, ancien ministre des Finances et ex-dirigeant de l’Union économique et monétaire (Uémoa).

Ils seront suivis de près par un autre ancien Premier ministre, Modibo Sidibé, 60 ans. Ce premier tour devrait être suivi le 11 août d’un second tour entre les deux candidats arrivés en tête. Un des candidats, Tiébilé Dramé, artisan d’un accord de paix signé en juin à Ouagadougou entre Bamako et la rébellion touareg, qui avait réclamé en vain un report du scrutin, a retiré sa candidature pour protester contre son manque de préparation et l’attitude de la France qui, selon lui, a, par ses pressions, porté atteinte à la «dignité» des Maliens.

Une élection à forts enjeux, tant elle doit rétablir l’ordre constitutionnel interrompu le 22 mars 2012 par un coup d’Etat qui a précipité la chute du Nord du Mali aux mains de groupes islamistes de la mouvance Al-Qaïda, alliés dans un premier temps à la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). La sécurité du scrutin sera assurée par quelque 6 300 soldats de la force de l’ONU, la Minusma, aidée des 3 200 soldats français encore présents dans le pays.

Si 85% des cartes d’électeurs ont été distribuées, plusieurs obstacles au bon déroulement du scrutin subsistent : redéploiement inachevé de l’administration centrale dans le Nord, absence de retour chez eux de 500 000 réfugiés et déplacés ayant fui le conflit et dont la plupart risquent de ne pas pouvoir voter. Ajoutez à cela la menace brandie l’un des groupes jihadistes qui ont occupé le Nord, le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest (Mujao), de «frapper» les bureaux de vote en mettant en garde «les musulmans maliens contre la participation à ces élections». Une tâche immense attend le nouveau président, tant le Mali sort exsangue et plus que jamais divisé par ces 18 mois de crise qui l’ont plongé dans la récession et ont aggravé la pauvreté. Il pourra néanmoins compter sur le soutien massif de la communauté internationale qui a promis plus de trois milliards d’euros d’aide.

Mais sa mission la plus délicate sera de réconcilier les différentes communautés qui composent le Mali : les tensions entre elles ont été exacerbées par la rébellion touareg et l’occupation islamiste, Touareg et Arabes étant souvent assimilés par les Noirs à des rebelles ou à des jihadistes. La ville de Kidal (nord-est), fief des Touareg et du MNLA, qui prône l’autonomie du Nord, illustre ces divisions. Des violences meurtrières y ont eu lieu il y a deux semaines entre des habitants touareg et noirs, en partie provoquées par le retour de soldats maliens dans la ville le 5 juillet.

R. I. / Agences

Dans un centre de vote ce matin

A Bamako, dans un centre de vote installé dans le lycée Mamadou Sarr, plusieurs centaines d’électeurs attendaient de pouvoir voter avant l’heure d’ouverture des bureaux à 08h 00 (locales et GMT). L’un d’eux, Kalifa Traoré, 56 ans, conducteur d’engin, a déclaré : «On est fatigués de la mauvaise gouvernance, j’invite les candidats à accepter les résultats de notre vote.» Silla Traoré, jeune étudiante de 20 ans, arrivée depuis 7H00, mais qui n’arrivait pas à trouver son bureau de vote dans la vaste enceinte du lycée, a dit vouloir choisir «un bon président pour le Mali». A Kidal, bastion des Touareg et de leur rébellion dans le nord-est du pays, le vote a commencé en retard dans plusieurs bureaux. A l’entrée de l’un d’eux, un journaliste de l’AFP a constaté que chaque électeur était contrôlé et fouillé par des soldats togolais de la force de l’ONU au Mali, la Minusma.