L’ONU envisage de déployer, dès que « les conditions politiques et de sécurité nécessaires soient en place », 11.200 Casques bleus, dont 1.440 policiers, pour sécuriser « les zones de population considérées comme présentant le plus grand risque ».
Mais, pour mener le combat contre les groupes extrémistes armés qui continuent d’errer aux alentours des villes du nord du Mali (et potentiellement dans la sous-région), Ban Ki-moon propose de faire escorter, « pour un certain temps », ces Casques bleus par une « force parallèle ». Cette recommandation indique, clairement, que le SG des Nations unies ne souhaite pas voir la France passer, après ses trois mois d’intervention militaire qui se sont soldés par la mort de 63 soldats et 400 terroristes, le relais comme elle l’entendait. C’est-à-dire « d’ici juillet ».
Ban Ki-moon préconise dans un rapport qu’il a présenté, mardi, au Conseil de sécurité, deux options. La première : renforcer la « mission politique » de l’ONU, tout en laissant aux 6.300 soldats de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma) le soin d’assurer la sécurité. Celle-ci serait assistée par « des efforts militaires bilatéraux » pour assumer son rôle contre « les groupes extrémistes armés ».
La seconde : le transfert des troupes de la Misma dans « la mission de l’ONU », qui comprendrait 1 440 policiers, et son déploiement « essentiellement dans le nord, avec, pour base logistique possible, Gao ou Sevaré ». Ce rapport, qui suggère la création d’un groupe d’experts indépendants pour « enquêter sur la criminalité organisée et transnationale » au Sahel, n’est pas messianique, loin s’en faut. « Même lorsque l’intégrité territoriale du Mali aura été pleinement recouvrée, de nombreux risques subsisteront », lit-on dans le rapport citant « les attaques terroristes, la prolifération des armes, le trafic de drogue et d’autres activités criminelles ».
Ce « pessimiste » tableau oblige les « quinze » à réfléchir par deux fois avant d’envoyer les Casques bleus. « Le processus politique accuse un retard dangereux », leur explique le secrétaire général, laissant entendre que « les conditions ne sont pas réunnies pour la tenue dans le calme d’élections libres, crédibles et paisibles ». « En l’absence de réconciliation, il y a peu de place pour un débat politique constructif, et les élections pourraient provoquer un regain d’instabilité et même des violences », dit-il. Décodé, ce déploiement ne se fera pas avant la mise en place sur le terrain de cette force parallèle et l’engagement ferme de Bamako à créer les conditions politiques nécessaires à la tenue de nouvelles élections. Mi-mars, Edmond Mulet, le sous-secrétaire général aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, avait jugé, à l’issue d’une visite d’une semaine au Mali, « peu probable que les élections puissent se tenir d’ici juillet », comme prévu. Selon lui, l’ONU, qui table sur la « présence complète » de sa « mission » au Mali, en juillet, pour remplacer la Misma et le gros des 4 000 soldats français, se prépare à affronter « des menaces inédites, jamais rencontrées dans un contexte de maintien de la paix ». A Yamoussoukro, les chefs d’état-major de la Cédéao ont rendu, hier, les conclusions de leur conclave de deux jours sur la crise malienne : « Dans trois mois, la Misma deviendra, après un vote du Conseil de sécurité, une force onusienne. Celle-ci sera plus nombreuse, beaucoup plus robuste et mieux équipée », déclare le chef d’état-major de l’armée ivoirienne, le général Soumaïla Bakayoko.
A Nouakchott, des chefs des armées de quatre pays du champ (Mauritanie, Algérie, Mali et Niger) se sont réunis, hier, pour « évaluer la situation » sécuritaire au Sahel et « examiner les moyens de renforcer (leur) coopération ».
Djamel Boukrine