C’est désormais au président du Parlement d’organiser une élection présidentielle sous 40 jours. Mais la tenue d’un tel scrutin est illusoire dans ce Mali coupé en deux par l’occupation du nord du pays par les Touaregs.
La junte malienne a finalement lâché le pouvoir. Soumis à d’intenses pressions internationales et locales, l’éphémère chef de l’Etat, le capitaine Amadou Haya Sanago, a accepté vendredi soir, dans un bref discours à la télévision, de rétablir totalement l’ordre constitutionnel. C’est le président de l’Assemblée nationale, Dioncounda Traoré, qui va prendre provisoirement la tête de l’état malien.
M. Traoré, réfugié au Niger depuis le putsch du 22 mars, était attendu samedi à Bamako. Cette nomination n’est pas une surprise, l’impopularité du président déchu, Amadou Toumani Touré, dit ATT, rendant impossible son retour aux affaires. Mais l’accord, longuement négocié sous l’égide du ministre des Affaires étrangères burkinabé Djibrill Bassolé, ne s’arrête pas là et anticipe les heures difficiles qui s’ouvrent pour le Mali. En théorie, la tâche de Dioncounda Traoré devrait se limiter, selon la loi fondamentale, à organiser une élection dans les 40 jours. Or, la tenue d’un tel scrutin est totalement illusoire dans ce Mali en plein chaos et divisé en deux par l’occupation du nord du pays par les rebelles touaregs. Un vote reviendrait au mieux à conduire au pouvoir un président faible car mal élu et au pire à entériner la partition du pays.
«On va pouvoir vivre un peu plus en paix»
Le texte dévoilé vendredi prévoit donc déjà la mise en place d’un futur organe de transition dirigé par un premier ministre. Outre qu’il permet d’éviter le vide juridique, ce premier ministre aura aussi l’avantage aux yeux des Maliens de contrebalancer l’autorité de Dioncounda Traoré, une personnalité loin de faire l’unanimité. Plusieurs noms circulaient samedi pour incarner cet homme providentiel, notamment celui de l’ex-premier ministre Mobido Sidibé. Les annexes de l’accord entérinent également l’amnistie pour les putschistes ainsi que la liberté de mouvement pour ATT et la libération des personnalités retenues depuis le coup d’état.
La France, les Etats-Unis et les pays voisins se sont immédiatement félicités du retour à la normale à Bamako. La Communauté économique des Etats d’Afriques de l’ouest (Cédéao), l’organisation régionale, a levé le blocus total imposé depuis une semaine au pays. Dans les rues de la capitale malienne, les passants, redoutant des pénuries, affichaient leur soulagement. «C’est bien. On va pouvoir vivre un peu plus en paix», expliquait Assia, une commerçante. «Je suis rassuré. J’avais déjà fait des provisions pour trois jours mais après je n’aurai plus eu d’argent pour nourrir ma famille. Les prix sur le marché avaient déjà commencé à augmenter», souligne l’un de ses clients.
Mais personne ici ou dans les chancelleries n’a crié victoire. Seule l’une des crises maliennes est finie. Le nord du pays est toujours occupé par des sécessionnistes touaregs et des groupes salafistes. Pour faire face, les nouvelles autorités seront presque nues. Elles ne pourront compter ni sur l’armée, en pleine débandade ni sur des finances à sec. Les secours ne pourront venir que d’une aide extérieure. Samedi, la Cédéao s’est nouvelle fois réunie pour étudier l’envoi au Mali de 2000 à 3000 soldats.