Il réclame l’autonomie du nord du Mali — une région sous son contrôle — et la loi islamique pour cette région au sein d’un Etat malien proclamé «islamique».
Défense de l’identité touareg et de la charia (loi islamique) : c’est le cœur de la «plateforme politique» remise le 1er janvier par une délégation d’Ansar Dine (Défenseurs de l’islam) au président burkinabè Blaise Compaoré, médiateur dans la crise malienne pour la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao).
Dans ce document de 17 pages que s’est procuré hier vendredi, le correspondant de l’AFP à Ouagadougou, le mouvement du charismatique Iyad Ag Ghaly, surtout composé de Touareg maliens comme lui, se livre à un réquisitoire contre les régimes maliens successifs qui ont traité, selon lui, les habitants du Nord en «citoyens de seconde zone». Conscient que la communauté internationale est «hostile» à toute partition du Mali, il affirme renoncer dans l’immédiat à une sécession, qui était la revendication initiale du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), rébellion touareg laïque d’abord alliée puis marginalisée sur le terrain par les islamistes. Il réclame donc une «large autonomie», mais dans le cadre d’un Etat malien qui proclamerait dans sa Constitution son «caractère islamique», au motif que «le peuple malien est musulman à plus de 95%». Dans le Nord, l’application «stricte» de la charia est «un impératif non négociable», insiste le groupe. Il justifie les châtiments corporels mais promet de tenir compte de «l’air du temps» dans l’application de certaines dispositions. Cette «plateforme» a de quoi hérisser le gouvernement malien, pour lequel le respect de l’intégrité du territoire du Mali et de la laïcité de l’Etat sont des pierres angulaires. Si une autonomie du Nord – et non une indépendance – peut a priori ne pas être un casus belli, trouver un terrain d’entente sur la charia paraît pour l’heure impossible. Le prochain test sera le 10 janvier : le président Compaoré a invité ce jour-là les émissaires de Bamako, d’Ansar Dine et du MNLA à Ouagadougou pour de nouvelles discussions, a-t-on appris de source proche de la médiation. Il s’agira du second rendez-vous après les premières discussions directes qui s’étaient tenues dans la capitale burkinabè le 4 décembre 2012. Sous la pression du Burkina Faso et de l’Algérie, les deux pays médiateurs, Ansar Dine avait annoncé fin 2012 renoncer à appliquer la charia dans tout le Mali, mais seulement dans ses zones d’influence, un périmètre qui s’agrandit peu à peu. Il avait également pris, au moins verbalement, ses distances avec Aqmi et le Mujao en rejetant le «terrorisme», et s’était dit disposé au dialogue avec Bamako. Iyad Ag Ghaly avait annoncé jeudi dernier, que son groupe retirait son offre de cessation des hostilités, en accusant le pouvoir malien de ne pas être prêt au dialogue. Mais sans fermer la porte à de nouvelles discussions, désormais fixées à la semaine prochaine.
R. I. / AFP