Les armées françaises et africaines sont restées vigilantes hier à Gao, théâtre pendant quatre jours de violences des groupes islamistes armés qui ont réussi à s’y infiltrer et promis d’y rester.
A Gao, à 1 200 km au nord-est de Bamako, la situation reste tendue. Le principal marché de la ville était quasi-désert, la majorité des boutiques fermées, a constaté un journaliste de l’AFP. Des patrouilles maliennes et nigériannes sillonnaient les rues. «Les gens ont peur, parce qu’on procède à des arrestations», a confié un officier malien.
Les soldats eux-mêmes étaient très nerveux, ne quittant pas leurs armes, les Nigérians arborant casque et gilet pare-balles. Quelques coups de feu ont encore été entendus hier en milieu de matinée. Des militaires patrouillaient également le long du fleuve Niger.
«On cherche des éléments (islamistes) qui ont traversé en pirogue et se sont infiltrés», a expliqué un soldat, tandis qu’au sud de Gao, des soldats nigériens fortifiaient leur base. Les forces de sécurité continuent par ailleurs de découvrir quotidiennement à travers la ville des stocks de munitions et d’explosifs. Un journaliste de l’AFP a ainsi vu dans la cour d’une maison déserte du centre de gros bidons remplis d’une substance inconnue avec des fils électriques, pouvant constituer un engin explosif artisanal puissant. Prévenues par des témoins, les forces françaises et maliennes n’étaient pas encore intervenues hier pour déblayer la cour. Lundi à l’aube, un hélicoptère de l’armée française avait bombardé le commissariat principal, ancien siège de «la police islamique» pendant l’occupation de la ville par les jihadistes en 2012, où étaient retranchés dimanche plusieurs d’entre eux tirant sur les soldats maliens. Le ministre malien de la défense, Yamoussa Camara, a fait état d’un bilan de trois islamistes tués et onze capturés à l’issue ces combats, au cours desquels trois soldats maliens ont aussi été blessés. Un bilan de source hospitalière mentionnait pour sa part au moins trois civils tués. Le commissariat et le marché principal de la ville, situé à proximité, ont en outre durant cette même journée de lundi été déminés par les soldats français La vigilance est d’autant plus grande que les jihadistes du nord du Mali ont reçu le soutien d’Al-Qaîda dans la péninsule arabique (Aqpa), basée au Yémen, qui a qualifié «la croisade contre l’islam» menée par la France de «déclaration de guerre contre l’islam et les musulmans».

R. I. / Agences
Les réserves d’Ottawa
L’évolution de la situation au Mali fait craindre un scénario comme en Irak et en Afghanistan, a jugé hier le ministre des Affaires étrangères John Baird, répétant que son gouvernement n’enverrait aucune troupe de combat. «Je me dois de rester prudent à propos de l’envoi potentiel de centaines de militaires canadiens sur le sol malien, comme certains l’ont réclamé», a déclaré M. Baird. «C’est vraiment une insurrection qui est en train de se produire sur le terrain, comme ce que nous avons vu en Irak ou en Afghanistan», a averti le chef de la diplomatie. Il s’est dit également dubitatif quant à la volonté de Bamako d’autoriser une mission de maintien de la paix de l’ONU, comme le souhaite la France. En outre, il a indiqué que son gouvernement n’avait «pas pris de décision sur le fait de fournir ou non de la formation (militaire)», alors que l’Union européenne doit déployer ces jours-ci 450 soldats européens, dont 200 instructeurs. «J’aurais des inquiétudes à fournir une formation à des militaires qui ont mené un coup d’Etat et renversé un gouvernement démocratiquement élu», a fait valoir M. Baird.
600 kilos d’explosifs désamorcés
L’armée française a désamorcé ce matin une bombe artisanale composée de 600 kilos d’explosifs dans le centre de Gao, la grande ville du nord du Mali, a constaté un journaliste de l’AFP. Posé dans la cour d’une maison abandonnée, au vu et au su de tous, l’engin, composé de quatre fûts métalliques remplis d’explosifs d’où dépassaient des fils pour la détonation, se trouvait non loin d’un hôtel où logent des dizaines de journalistes étrangers. Des cartouches de mitrailleuse lourde traînaient également sur le sol de la cour, ainsi que quelques obus à l’intérieur de la maison.