Quand le ministre algérien de l’Energie, Youcef Yousfi, rencontre Paolo Scaroni, patron du groupe énergétique italien Eni, cela donne lieu, ici, en Algérie, à un communiqué rébarbatif en quelques lignes.
Au cours de l’entretien, lit-on dans le communiqué officiel, les deux hommes ont examiné, jeudi à Alger, «l’état des relations liant le groupe à la compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, et les perspectives de leur développement ».
Et au cours de cette «visite de courtoisie au ministre», le patro n d’Eni a également abordé «la situation du marché international des hydrocarbures». Plus «bref», on ne peut ! Fort heureusement, internet permet d’accéder à la presse italienne et fournit des traducteurs en ligne.
On y apprend que malgré les «affaires» qui entachent sa filiale Saipem (filiale à 43 % d’Eni actuellement) et qui connait des suites judiciaires dans l’affaire Sonatrach 2, le groupe italien se sent bien en Algérie où il a encore de grands projets d’avenir. Paolo Scaroni est même heureux de souligner que les relations avec les Algériens sont «excellentes».
L’AFFAIRE SAIPEM SANS INCIDENCE
«J’ai rencontré la plus haute autorité algérienne du secteur, j’ai parlé de l’avenir et des développements futurs. Cela signifie que les relations d’Eni avec le pays ne sont pas du tout influencées par l’affaire Saipem. Ils considèrent, comme il se doit, que c’est une affaire distincte d’Eni».
Ainsi donc, la mise sur liste noire de Saipem – comme du canadien Snc Lavalin – dont le nom est cité dans les affaires de corruption en Algérie n’a pas d’impact sur les activités du groupe. Alger distingue entre Eni et Saipem qui se trouve dans un grand état «d’inconfort» en Algérie depuis les révélations venues… d’Italie. Sa présence est même jugée «stratégique » par les responsables algériens.
Cela va se traduire concrètement par le lancement, en collaboration avec Sonatrach et selon la règle du 51/49%, d’activités de prospection au niveau des montagnes de l’Atlas algérien.
Ce sera une première puisque cette zone est encore inexplorée même si Eni, indique Scaroni, a mené des études au cours des dernières années. C’est, a-t-il déclaré au journal Sole 24 Ore, l’aspect le plus intéressant des discussions qu’il a eues avec Youcef Yousfi.
«L’aspect le plus important discuté à l’occasion de la rencontre concerne le début de l’activité d’exploration dans les montagnes de l’Atlas». Il a souligné qu’Eni a réalisé un grand succès dans ce domaine en Val d’Agri, une sous-région de la Basilicate, en Italie.
HAUT RISQUE, HAUTE RÉTRIBUTION
«Dans la Basilicate, le pétrole se trouve entre 700 et 900 mètres de hauteur, dans une configuration orographique très semblable à celle de l’Atlas. Nous commencerons une activité d’exploration conjointe avec notre partenaire Sonatrach.
Les premières tentatives seront exécutées aux flancs du relief montueux qui se trouve à 100 kilomètres au sud d’Alger, dans une zone où nous avons déjà fait des premiers sondages en 2008-2009.» Pour le patron d’ENI, l’objectif de la prospection ne vise pas un hydrocarbure en particulier même s’il constate que l’Algérie est un pays plus gazier que pétrolier. «Tout ce qu’on trouvera sera bon», a-t-il indiqué.
C’est un investissement «à haut risque mais à haute rétribution», a indiqué le patron d’Eni. Il souligne que l’exploration va se faire dans des zones vierges ou rien n’a été encore découvert. «Le risque est plus élevé qu’ailleurs, mais si des découvertes sont faites, elles s’avèrent généralement très intéressantes».
Le patron d’Eni a également indiqué avoir confirmé l’intérêt de son entreprise à développer de nouvelles activités d’exploration offshore (en eaux profondes et en eau ultra-profonde). Il a fait valoir qu’Eni est un opérateur de premier plan dans les activités offshore dans la région méditerranéenne.
Paolo Scaroni a également discuté de l’autre segment que l’Algérie veut développer : le gaz de schiste. Sonatrach et Eni ont déjà signé, en avril 2011, un accord pour développer la recherche et l’exploitation du gaz de schiste en Algérie.
Le groupe italien dispose d’une expérience dans l’exploitation du gaz de schiste à travers sa participation joint-venture sur un gisement au Texas. Il est également engagé avec Petrochina pour mener des projets en Chine dans le gaz de schiste.
Salem Ferdi