La maladie du président de la République aura montré les limites de l’architecture institutionnelle actuelle
Il serait malhonnête de ne pas reconnaître que la situation économique et sociale de l’Algérie, ne correspond pas à ses potentialités et elles sont énormes, matérielles et surtout humaines, richesse bien plus importante que toutes les ressources en hydrocarbures.
1.-La Constitution actuelle concentre tous les pouvoirs aux mains du président de la République, politique et économique, un pouvoir ultraprésidentiel, à la différence des Etats-Unis d’Amérique où existe un contre-pouvoir des deux chambres, tant pour les nominations à des postes clés que des questions stratégiques. Dans ce cadre, en cas de faiblesse du président de la République, au lieu que ce soit les institutions de la République qui comblent le vide, le risque n’est-il pas de voir son entourage qui n’a pas été mandaté (l’occulte) accaparer le véritable pouvoir, soit à son insu ou faute de discernement? Il faut donc lever ce vide, en évitant cette concentration excessive du pouvoir sans contrepoids démocratiques, en limitant le nombre de mandats, en prévoyant des prérogatives éventuellement à un vice-président et en réhabilitant les institutions de contrôle gelées et prévues par la Constitution sous l’autorité de la présidence (Conseil national de l’énergie, Cour des comptes etc..) alors que les autres institutions relèvent de l’Exécutif.
Des partis d’une autre planète
2.-.Les partis représentés en majorité au Parlement sont des appendices du pouvoir comme le démontrent les crises internes au FLN (dont le président d’honneur est le président de la République) et au RND, (FLN/RND très mal élus d’ailleurs moins de 10% par rapport aux inscrits selon les données du ministère de l’Intérieur, peut-être moins par rapport à la réalité) dont l’issue de cette crise ne dépend pas de ses membres, mais de l’évolution des rapports de force au niveau des sphères du pouvoir. Pour d’autres partis ultragauchistes, ayant été par le passé des relais du pouvoir mais récemment mis sous veilleuse, vivant sur une autre planète, mais n’ayant aucun impact, ils gesticulent en brandissant l’ennemi extérieur, diabolisent le secteur privé national et international, étant incapables de mobiliser les segments de la société confrontés à la dure vie quotidienne (inflation, chômage etc). Il faut donc une restructuration tant du système partisan que de la société civile loin des intérêts de la rente, en renforçant avec la révolution numérique le système d’information par des espaces de liberté.
3-Le poste de chef de gouvernement ayant été supprimé, le Premier ministre n’est qu’un Premier ministre, un simple coordinateur, n’a aucun pouvoir réel, gérant les affaires courantes, par délégation du pouvoir du président, les grandes décisions se prenant en Conseil des ministres, n’ayant aucun pouvoir de nomination de ministres, walis, ou hautes fonctions, ni d’emprise sur les affaires étrangères, de la défense, prérogatives du président de la République. Faute de suivi et de coordination, (n’existant pas de veilles stratégiques à l’instar des présidences des pays développés et pays émergents) devant distinguer stratégie et tactiques, cette dernière devant s’insérer dans le cadre d’un objectif stratégique, nous assistons des pilotages à vue au gré de la conjoncture, à de nombreuses conférences et réunions, avec des coûts sans impacts. Je rappelle que les plus grands planificateurs, à ne pas confondre avec la planification bureaucratique de l’ex-camp communiste sont les services de sécurité et les multinationales ayant un département de management car vivant dans un monde incertain et turbulent où de fausses prévisions se soldent en pertes de plusieurs milliards de dollars.
Ainsi, le fameux pacte de croissance, annoncé à grande pompe, signé il y a de cela cinq années sans résultats autant que les différentes réunions gouvernement-walis, n’ont pas changé la situation économique du pays. La réunion walis/gouvernement les 26/27 juin 2013 s’est inscrite dans cette optique de combler le vide afin d’éviter les tensions sociales, l’objectif étant d’aller vers l’élection présidentielle d’avril 2014, sans remous sociaux, dépenser sans compter, en différant la résolution des véritables problèmes et en essayant de tranquilliser la population avec un discours optimiste (nous avons encore des hydrocarbures) mais que contredit tant la future géostratégie énergétique mondiale (les réserves se calculant selon le couple prix international /coût, pouvant découvrir des milliers de gisements non rentables face à la concurrence) et la crise de confiance reflet du divorce entre l’Etat et les citoyens où l’absence de morale en est l’essence. Il faut rétablir la fonction de chef de gouvernement, notamment en matière de nomination et de gestion économique avec un équilibrage du pouvoir avec la présidence de la République dont la fonction est avant tout d’élaborer la vision stratégique et de veiller au bon fonctionnement des institutions.
Le pouvoir bureaucratique
4-Le pouvoir centralisateur a favorisé le pouvoir bureaucratique dominant qui fonctionne en tant que pouvoir bureaucratique, donnant l’illusion qu’il prend des décisions pour la majorité, à l’image de Narcisse, veut faire croire que des lois résoudront les problèmes fondamentaux du pays. Or, il sagit de s’attaquer au fonctionnement de la société pour déterminer les facteurs de blocage, les lois n’étant qu’un moyen.
De ce fait en contradiction avec la loi universelle des 20/80%, où 20% d’actions biens ciblées ont un impact sur 80% de la société, et 80% d’actions désordonnées que l’on voile par l’activisme, ont un impact sur seulement 20%, l’on a abouti au manque de visibilité et de cohérence dans la démarche face aux enjeux irréversibles de la mondialisation où toute nation qui n’avance pas recule, la maîtrise du temps étant le principal défi des gouvernants en ce XXIe siècle, la distribution de la rente et les réserves de change qui risquent de fondre comme un fromage au soleil, en Algérie donnant l’illusion d’une prospérité artificielle. De ce fait, la sphère économique publique est fortement connectée au politique, la loi sur l’autonomie des entreprises publiques n’a jamais été appliquée, limitant d’ailleurs la dépénalisation de l’acte de gestion, n’ayant aucun sens sans cette autonomie. La gestion administrative l’emporte ainsi sur la logique économique. Ainsi, s’est installée une cour stérile, aux ordres. Avec les différents scandales de corruption touchant des secteurs névralgiques de l’économie nationale, la suspicion généralisée (alors que la majorité des cadres sont honnêtes) bloque toute initiative créatrice. Il faut réhabiliter l’entreprise tant privée locale qu’internationale que publique créatrice de richesses en levant tous les obstacles à l’environnement.
5-En résumé, la maladie du président de la République, tout en lui souhaitant un prompt rétablissement, aura montré les limites de l’architecture institutionnelle actuelle avec le blocage des institutions ayant des répercussions sur l’économique.
L’idéal, surmontant les idéologies réfractaires, mais est-ce un rêve, est-ce que le futur président, après des élections libres et démocratiques, soit une femme ou un homme de grande moralité (l’Algérie traversant une très grave crise morale qui se répercute négativement sur l’économique) s’entourant également de femmes et d’hommes compétents ayant une grande moralité réalisant le consensus (non pas l’unanimité) tant au niveau de la société que de l’institution militaire, seule force organisée face à l’émiettement des partis,sans impacts, afin de préparer la transition démocratique et éviter un drame à l’Algérie, après ce que l’on a qualifié peut-être faussement de printemps arabe.