“Main tendue” de Tebboune : Rahabi livre son analyse

“Main tendue” de Tebboune : Rahabi livre son analyse

Le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a exprimé sa volonté de vouloir instaurer une nouvelle démarche de rassemblement visant à édifier un front interne soudé, en mesure de faire face aux défis de la conjoncture internationale. L’ancien diplomate et Ministre Abdelaziz Rahabi s’est exprimé à ce sujet et a livré son analyse à travers une tribune.

Dans une tribune postée sur sa page Facebook officielle hier, mardi 10 mai 2022, l’ancien diplomate Abdelaziz Rahabi est revenu sur la démarche du Président Tbboune et « sa volonté de proposer une action politique inscrite dans un esprit de rassemblement national ».

En effet, l’ancien ambassadeur d’Alger à Madrid a expliqué que « la société, dans ses composantes civiles et politiques, avait toujours montré son aptitude au compromis et sa disposition à accompagner tout effort pour sortir du statu quo », notant, cependant, le fait que « le pouvoir politique s’était toujours enfermé dans sa logique de rapports de forces ».

Selon Abdelaziz Rahabi, « cette attitude a fragilisé l’État et a failli provoquer son effondrement ». « … Un effondrement souhaité par des acteurs hostiles à l’Algérie », a-t-il souligné. Dans ce même sens, l’ancien Ministre a affirmé que « ce risque d’effondrement valide, à lui seul, toute initiative de dialogue et de concertation entre le pouvoir exécutif et la représentation politique, sociale et économique ».

« Établir des mesures de confiance pour concrétiser le rassemblement »

Pour l’ancien ambassadeur, « la question qui se pose de manière récurrente est celle de savoir comment établir des mesures de confiance qui rendraient possible et concrète la volonté de rassemblement, exprimée dans le discours politique », mais aussi « comment la décliner de façon concrète dans la vie politique quotidienne ». D’ailleurs, Abdelaziz Rahabi a souligné le fait que « les contours de l’offre indirecte du Président Tebboune gagneraient à être explicités pour que cette initiative soit comprise et entendue ».

« À ce stade et sans préjuger du fond de cette démarche, il est nécessaire de réunir certaines conditions politiques. Les plus urgentes sont liées aux questions du libre exercice de la politique par les partis politiques, les syndicats, le mouvement associatif et la société civile dans son ensemble », a suggéré l’ancien diplomate Rahabi, en rajoutant qu’ « on ne peut valablement et sérieusement envisager un intérêt politique pour le dialogue sans le règlement de la question des entraves à l’exercice de l’action politique partisane et sans lever les limites à l’exercice du droit constitutionnel à une information objective, libre et responsable ».

Sur un autre front, l’ancien Ministre Abdelaziz Rahabi a regretté « la persistance de multiples formes de pression de l’Administration et son ingérence dans la vie politique », estimant que cela « altère le climat politique du pays et va à l’encontre des engagements du Président de la République ». « À l’évidence, nous n’avons pas tiré les leçons du passé, car cet état de fait ne sert ni l’administration qui se substitue à l’État alors qu’elle doit veiller à préserver ses liens avec la société. Ses missions doivent être contrôlées par le juge », a encore écrit Abdelaziz Rahabi, notant que « le Président de la République demeure politiquement le premier responsable du fonctionnement des institutions de l’État ».

« L’État devrait s’engager dans la promotion de la liberté d’expression »

Dans sa tribune, l’ancien Ministre Rahabi a estimé que « la prochaine célébration du 60ᵉ anniversaire de l’indépendance peut aussi constituer un rendez-vous avec l’histoire pour parachever la libération de la terre par celle des hommes et une opportunité pour protéger les libertés individuelles et collectives et se réconcilier avec notre histoire de pays d’hommes libres ».

« Seul le Président de la République peut décider de cette nouvelle mesure d’élargissement. Il prendra le risque, tout comme ceux de ses prédécesseurs qui ont engagé des réformes politiques audacieuses, de ne pas être pleinement accompagné par une administration tentaculaire, qui a fini par se substituer à l’État, se nourrit de ses propres peurs et résiste encore à toute forme de changement pour garder des positions de rente », a rajouté Abdelaziz Rahabi.

Dans ce même contexte, l’ancien ambassadeur a également noter qu’ « il est attendu de l’État qu’il s’engage dans la promotion de la liberté d’expression et la mise place d’un système national d’information moderne et performant au service la société dans sa diversité ». En effet, selon lui, l’Algérie « a besoin de médias crédibles et de qualité évoluant dans un climat de liberté et de transparence pour accompagner un projet politique national porté par la justice, l’égalité en droits et en devoirs et prospérité partagée ».

« Il faut un engagement en faveur du contrôle populaire des richesses nationales »

Au sujet de l’offre de rassemblement du Président Tebboune, Abdelaziz Rahabi a noté qu’ « il était difficile d’envisager une adhésion à cette démarche sans une volonté déclarée et un engagement concret en faveur du contrôle populaire des richesses nationales qui reste au centre des préoccupations des Algériens qui ont assisté à une privatisation systématique et organisée du bien public ».

« L’absence d’un véritable contrôle législatif et judiciaire a encouragé la mauvaise gouvernance et la généralisation de la corruption qui ont à leur tour impacté la qualité de vie des Algériens, favorisant ainsi l’exode des élites et le phénomène des harragas, comme elles ont ralenti le dynamisme d’une économie qui remplit pourtant tous les critères de puissance, fait baisser le niveau de l’éducation et de la qualité des soins de santé publique et fortement altéré l’environnement politique », a encore expliqué l’ancien Ministre.

L’ancien ambassadeur d’Alger à Madrid a rappelé, dans ce même sens, que le Président de la République « était garant de la stabilité du pays et avait un rôle primordial à jouer dans la recherche, l’animation et la mise en place de ce pacte économique de justice sociale et de redistribution de la richesse », et ce, par ce que « la société algérienne aura du mal à supporter les effets d’une crise mondiale dont les premières conséquences ont vu un renchérissement de 25 à 30 % des produits de large consommation et dont l’issue est plus qu’incertaine ».

Pour son mot de la fin, Abdelaziz Rahabi a affirmé que « la concertation et le dialogue avec les acteurs politiques, le monde académique et des médias pour échanger, partager les lectures du monde actuel et surtout déterminer et partager la ligne de conduite qui répond le mieux aux intérêts de l’Algérie ».

« Le monde à venir sera celui des guerres d’influence, du big data, de l’innovation et des alliances stratégiques. Le Président de la République, qui incarne constitutionnellement la défense des intérêts diplomatiques de l’Algérie, dispose à ce titre des pouvoirs et des outils pour agir sur la formation, la préservation et la consolidation d’un consensus national sur les questions de politique étrangère et de défense nationale », a encore écrit l’ancien Ministre Rahabi avant de conclure : « il est vrai que la mission du chef de l’État n’est pas aisée tant la tradition de dialogue fait défaut dans la vie politique de la nation, mais la réalisation d’un destin commun passe inéluctablement par la recherche des valeurs de la concertation permanente et des vertus du respect mutuel ».