M. Ksentini à propos du rapport américain sur la traite des hommes en Algérie : «C’est une fiction et une affabulation»

M. Ksentini à propos du rapport américain sur la traite des hommes en Algérie : «C’est une fiction et une affabulation»

Maître Ksentini, président de la Commis-sion nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’homme(CNCPPDH), a af-firmé, hier, sur les ondes de la Radio nationale Chaîne III que le rapport américain sur les droits de l’homme en Algérie est «scandaleux» et «injurieux».

Pour le magistrat, le gouvernement ne doit pas tarder à «réagir vivement à cette accusation infondée et gratuite qui n’a pour but que de ternir la réputation de notre pays». En effet, et c’est devenue monnaie courante, les Américains se permettent tout pour faire des «réquisitoires» alors que la situation économique et sociale n’est pas tout à fait rose au pays de l’Oncle Sam. Après l’Estonie et le Bélarus, les Américains n’ont pas trouvé mieux que de préconiser pour l’Algérie la mise en œuvre d’une loi anti-traite, comme si cette pratique a déjà existé. Une aberration, affirme Me Ksentini. Cette grave accusation du Département d’Etat américain, contenue dans le rapport et selon lequel la «traite des hommes» serait pratiquée en Algérie, est simplement une «fiction et une affabulation», affirme l’invité de la Radio nationale. Le président de la CNCPPDH a démenti de façon catégorique cette information pour la simple raison que «la législation algérienne est claire et rigoureuse sur ce chapitre». Courroucé, Me Ksentini a affirmé qu’«il n’y a pas de motif raisonnable qui justifie le classement de l’Algérie dans cette liste». Un rapport à dessein politique.

C’est l’analyse qu’avance le président de la commission à propos de ce rapport dont les conclusions sont contraires, estime Me Ksentini, à la réalité de la société algérienne. Après avoir rappelé que l’Algérie a payé un lourd tribut pour recouvrer sa dignité et son indépendance, le président de la CNCPPDH a souligné, en substance, que les Algériens qui ont connu l’humiliation de l’occupant, ne la feront pas subir à autrui.

Fouad Irnatene

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La problématique de la détention préventive :

«Remplaçons-la par le contrôle judiciaire»

La problématique de la détention préventive défraie la chronique judiciaire. Maître Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative pour la protection des droits de l’homme, y revient en mettant l’accent sur les dysfonctionnements qui entachent cette mesure.

«La détention préventive provisoire doit être une mesure exceptionnelle», a-t-il précisé lors de son passage sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale. Cependant, l’expérience et le terrain «montrent qu’elle est devenue une sanction préalable que le juge d’instruction, qui n’est qu’un intermédiaire, s’arroge le droit d’infliger», regrette le magistrat.

Le recours abusif à cette détention a fait objet d’un rapport de la CNCPPDH, remis il y a un mois au Chef de l’Etat.

«Nous avons insisté sur ce problème qui préoccupe au plus haut point tous les juristes parce qu’il se rattache à la liberté individuelle et à la qualité de la justice», affirme Me Ksentini.

Pour lui, il y a une «application incorrecte de la loi qu’il faut corriger pour que les choses reviennent à la normalité».

Il reconnaît, d’autre part, que cette mesure abusive touche le plus les personnes impliquées dans des affaires de gestion. «Nous constatons que les personnes inculpées sont immédiatement incarcérées et mises en détention préventive. Elles sont considérées comme coupables provisoirement. Ce qui n’est pas normal», a enchaîné l’invité de la radio.

Les oubliés de la réconciliation nationale

Quelle solution préconise-t-il pour mettre fin à cette situation? «Il faut une solution de substitution qui est la mise sous le contrôle judiciaire», insiste Maître Farouk Ksentini.

Interrogé, dans un autre contexte, sur l’amendement proposé au code pénal quant à la dépénalisation du délit de gestion, il a répondu qu’il s’agit d’un progrès dans la mesure où la peine a été substantiellement réduite.

S’exprimant sur l’abus dont ont fait preuve certains juristes, il précise que, malgré la gravité de la chose, il ne s’agit pas d’une «remise en cause de notre appareil judiciaire. Des efforts importants ont été déployés, notamment par l’actuel mi-nistre de la Justice».

Dans son intervention, il a souligné que son ambition est de parvenir à une justice de qualité, mais cela implique des magistrats professionnels pointus. «Plus l’expérience pour des décisions correctes au plan judiciaire.

Il n’y a pas plus difficile que de juger», prévient le président de la CCNCPPDH.

Sans tarder, Me Ksentini a affirmé qu’en dépit d’une «avancée appréciable », les réformes de la justice engagées jusque-là «sont insuffisantes». Que reste-t-il à faire ?

Pour le magistrat, tout est lié à la formation professionnelle des magistrats. «L’école de la magistrature doit faire de grands efforts. Doivent être retenus comme magistrats les premiers et non les derniers de la classe», enchaîne Me Ksentini, outré par le fait que ces réformes ne sont pas appliquées.

«Je l’ai regretté par haute et intelligible voix. Rien n’a été retenu des suggestions du rapport Issad», regrette-t-il. Abondant dans ce sens, il lance un appel pour «revenir à ce rapport exemplaire fait par des professionnels».

La réconciliation nationale a fait des mécontents. Me Ksentini cite les citoyens qui ont subi des pertes matérielles (usines, logements, firmes…) et qui «n’ont pas été indemnisées». Il est grand temps pour le magistrat, de «réparer cette injustice». Aussi, cette injustice a touché des personnes innocentes déplacées dans des camps du Sud.

Iniquité dans les droits sociaux

A une question ayant trait à l’iniquité dans les droits sociaux, il cite qu’«à chaque distribution des logements sociaux, il y a quasiment des émeutes».

Me Ksentini rejoint la Rapporteuse des Nations unies qui a dénoncé notamment le manque de transparence dans l’attribution des logements.

«Le constat est amer», poursuit-il. Et d’ajouter que deux catégories ne sont pas prises en charge : les femmes et les personnes âgées.

F. I.