Dans cet entretien, le P-DG du laboratoire de production pharmaceutique Soprophal, M. Khalil Zerrouki fait savoir que l’Unop aspire à une réelle politique tarifaire qui soit dans l’intérêt des producteurs et de la santé publique. Les prix des médicaments pratiqués actuellement freinent, selon lui, l’accès à l’innovation et aux nouvelles technologies. A propos des prix, le président de l’Unop, Abdelouahed Kerrar, a confié que le souhait des producteurs est d’ajuster les prix des médicaments en fonction des coûts. Un ajustement qu’il propose entre 2 et 15%. Une proposition soumise aux pouvoirs publics sans avoir eu d’écho à ce jour.
Reporters : L’Unop a démontré, à travers l’étude, que les prix des médicaments en Algérie sont les plus bas dans la région. Quelle est la démarche à suivre maintenant ?
Khalil Zerrouki : Nous avons tenu à inviter tous les protagonistes, l’administration, les pouvoirs publics, experts et producteurs ainsi que les médias, pour rendre publics les résultats de cette étude et pour débattre de la politique tarifaire en Algérie. Il y a une dizaine d’années, on n’arrêtait pas de dire que nos prix sont parmi les plus élevés dans le monde. Les producteurs, par la suite, ont assuré le contraire. Mais comme il n’y avait pas une réelle étude du marché, ce constat était considéré plus comme une rumeur que comme une vérité. Cette étude de l’Iqvia, à l’initiative de l’Unop, prouve d’une façon scientifique que ce constat est une réalité.
L’objectif était de vérifier cette information via un organisme neutre et connu dans le monde entier en matière de statistiques dans le secteur pharmaceutique. Ce qu’il faut savoir, en fait, c’est que cette étude a analysé les prix des produits importés et de ceux fabriqués localement comme une seule entité. Si on se contente d’étudier les prix des produits locaux seulement et les comparer aux pays de référence, on constatera que les prix sont encore plus bas. Après la publication de cette étude, on espère maintenant engager un débat autour de la politique tarifaire dans notre pays.
Avons-nous déjà une politique tarifaire du médicament ?
Elle n’est pas claire en tout cas. Il nous faut une politique, une réglementation et une référence tarifaire à laquelle on peut s’adapter. Pour cela, un dialogue est nécessaire entre opérateurs, le ministère de la Santé et la Sécurité sociale. Cette dernière est tenue, par exemple, de fixer un tarif de référence et de remboursement. On souhaite aussi la révision de notre marge bénéficiaire fixée, actuellement, à 20% brut. A l’étranger, la marge bénéficiaire minimum des multinationales est de 60%.
En dépit de l’inflation, de la hausse du taux de change et des prix des matières premières, les prix des médicaments n’ont pas bougé depuis les années 90. Si on veut aller à l’innovation, aux produits de dernières générations, à la recherche et au développement, la reconsidération tarifaire est nécessaire. Les transferts technologiques coûtent très cher. Le plus important donc pour nous est la mise en place d’une politique qui prenne en considération nos revendications et l’intérêt de la santé publique. On a besoin qu’on nous soutienne.
Or, pour le moment, on est plus soutenus comme consommateurs que comme producteurs. Il est vrai, toutefois, que les pouvoirs publics, en bloquant les importations des molécules fabriquées ici, nous ont rendu un grand service.