Pour lutter contre l’importation frauduleuse, une large enquête a été lancée récemment par le ministère du Commerce visant la mise en place d’un fichier national des importateurs, afin d’assainir cette activité qui compte près de 43 000 opérateurs, a indiqué mercredi le ministre du Commerce, Amara Benyounès.
Cette enquête est menée par la Direction générale du contrôle économique et de la répression des fraudes de ce département ministériel. Elle permettra d’établir un fichier devant identifier les importateurs, la nature de leurs activités (types de produits importés) et leur nationalité. Benyounès a déclaré que son ministère rencontre un problème avec certains importateurs. Il existe des importateurs qui ne sont même pas identifiés alors que d’autres ne font pas les opérations d’importation pendant des années.
Ce fichier de statistiques et d’informations va également permettre au ministère du Commerce, aux Douanes et à la Direction générale des impôts d’accéder à toutes les informations relatives aux importateurs pour en assurer un meilleur contrôle. Le ministre du commerce tient à rassurer l’ensemble des opérateurs économiques que son département n’est en guerre contre personne, qu’il n’a de comptes à régler avec personne et que ces licences sont destinées à mieux gérer et à rationaliser notre commerce extérieur.
En outre, il a affirmé que l’État a perdu près 50% de ses recettes d’exportation. Face à cette situation, le département de Benyounès doit, donc, faire extrêmement attention à la gestion de la balance commerciale. L’instrument juridique, dont le gouvernement algérien disposera, sera ces licences d’importation et d’exportation.
Par ailleurs, il est à rappeler que les enquêtes déclenchées par les services des Douanes algériennes n’ont jamais freiné les ardeurs de cette mafia. Preuve en est, début 2015, un fichier des fraudeurs a été établi au niveau de la direction générale des Douanes algériennes. Il regroupe les noms, adresses, et numéros d’identification fiscale des opérateurs fraudeurs impliqués dans des affaires d’importations illégales.
Par ailleurs, l’article 8 et 8-bis de l’ordonnance 96-22, relative à la répression de l’infraction à la réglementation des changes, permet à la Banque d’Algérie d’imposer des interdictions d’importation aux importateurs véreux. Dans la conjoncture actuelle, il est totalement possible que certains continuent de travailler le plus normalement du monde et à bénéficier de lignes de crédits. Et pour cause, les banques algériennes ou étrangères installées en Algérie n’ont été destinataires d’aucune instruction de la Banque Algérie pour leur demander de blacklister ces opérateurs.
Il leur suffit donc de louer un autre registre du commerce ou de recourir à un autre prête-nom. La mafia algérienne de l’import bénéficie donc d’une totale impunité. Il a été donné de constater à plusieurs reprises que des marchandises importées entrent dans les ports algériens avec de fausses déclarations douanières. Une fois débarquée, cette marchandise reste abandonnée dans des containers. Les semaines et les mois s’écoulent, mais personne ne vient réclamer sa marchandise.
Devant cet état de fait, les douaniers sont alors contraints de forcer les portes des conteneurs. Par ailleurs, il est à rappeler que les infractions constituant des motifs d’inscription de leurs auteurs au fichier sont liées à la soustraction à l’assiette et au paiement de l’impôt, aux manœuvres frauduleuses et déclarations en matière fiscale, douanière et commerciale, au détournement d’avantages fiscaux, douaniers et commerciaux et à la protection et à la santé du consommateur.
Les infractions liées aux opérations bancaires et financières, au défaut de la publicité légale et à l’atteinte à l’économie nationale sont également concernées par ce fichier, géré par la DGI. La réglementation veut que l’inscription au fichier des fraudeurs soit une mesure conservatoire prise à l’égard des personnes morales ou physiques ayant commis des actes frauduleux et également un mécanisme administratif de prévention et de répression des fraudes et de la délinquance économique.
Interrogé sur la mise en pratique des futures licences d’importations, Benyounès fait savoir, tout d’abord, que lors d’une réunion tenue récemment avec le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, ce dernier a particulièrement insisté sur la transparence qui doit guider la délivrance de ces licences.
Quant à la liste des produits concernés par ce nouveau dispositif, elle sera élaborée par un comité interministériel présidé par son département ministériel et composé des ministères, respectivement, des Finances, de l’Industrie et des Mines, et de l’Agriculture et du Développement rural, sachant que ce comité sera également chargé de délivrer ces licences.
Questionné sur le commerce informel qui enregistre, depuis quelques mois, un retour en force à travers plusieurs régions du pays en dépit de l’opération lancée en 2012, le ministre fait savoir que de nouvelles dispositions, en discussion actuellement au niveau du gouvernement, seront prises pour résorber ce phénomène.
Ces dispositions seront annoncées une fois avalisées par le président de la République, selon Benyounès qui admet que le secteur informel est problématique en atteignant des proportions alarmantes menaçant même l’économie nationale et, parfois, un certain nombre de filières industrielles, portant une atteinte sévère à la production nationale. Pour le ministre, l’Algérie est doublement perdante face à ce phénomène, et ce, de par la surfacturation en matière du commerce international et de par les produits contrefaits qui menacent l’industrie du pays, sans compter la perte des emplois.
Lazreg Aounallah