C’est devenu une habitude depuis maintenant quelques années. Le gouvernement annonce la fin du terrorisme ou évoque un « terrorisme résiduel » et les groupes armés font presque systématiquement après chaque déclaration des démonstrations de force. Après l’été meurtrier de 2008 marqué par des attentats suicides, les groupes armés ont changé de méthode en 2009 en ciblant des convois des forces de sécurité. Avec des bilans lourds : 23 gendarmes tués à Bordj Bou Arreridj, une vingtaine de militaires à Tipaza…Des opérations qui démentent les affirmations du gouvernement sur la fin du terrorisme.
Fin juin, après l’attentat contre les gendarmes à Bordj Bou Arreridj, le ministre de l’Intérieur Yazid Zerhouni affirmait encore que les terroristes sont en nombre « très réduit ». « En réalité, personne ne peut donner de chiffre ou d’estimation concernant le nombre de terroristes encore en activité. Les forces de sécurité en tuent beaucoup, mais ils se renouvellent. Ils recrutent facilement », reconnaît un ancien responsable de la lutte contre le terrorisme.
En Algérie, la lutte contre les groupes armés islamistes ne s’est pas accompagnée de mesures politiques pour affaiblir idéologiquement l’ex-GSPC, devenu Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). La persistance du chômage et des injustices ainsi que l’absence de progrès économiques et sociaux sont autant de facteurs qui jouent en faveur des groupes armés islamistes. « Ils recrutent plus facilement d’autant qu’ils n’utilisent plus les attentats suicides. Pour les nouvelles recrues, c’est un élément rassurant : savoir qu’elles ne seront pas obligées de perpétrer des attentats de ce type », poursuit la même source.
Et puis, il y a la réconciliation nationale. Ne pas avoir limité dans le temps la possibilité offerte aux terroristes de bénéficier d’une amnistie s’ils déposent leurs armes constitue une erreur politique grave. « Un jeune qui veut rejoindre le GSPC se dit : après tout, si je change d’avis, je pourrais toujours bénéficier de la réconciliation nationale et retourner chez moi. L’amnistie ne doit pas concerner par exemple ceux qui ont rejoint les maquis récemment», ajoute le même ancien responsable.

Au-delà des aspects idéologiques et politiques, sur le terrain, les forces de sécurité ont certes réussi à porter des coups durs aux groupes armés. Régulièrement, des bilans de presse annoncent plusieurs morts parmi les membres de l’ex-GSCP. Mais, de l’avis d’un expert militaire algérien, les résultats auraient pu être encore plus importants si les informations des services de renseignement étaient mieux exploiter. « Le travail de renseignement est très bien fait. Mais les informations transmises sont mal exploitées car souvent elles arrivent en retard dans les centres de décision », explique-t-il.
Principale cause de cette situation : l’organisation actuelle de l’armée. Elle remonte à la fin des années 1980 du temps où Chadli était encore président de la république. C’est Khaled Nezzar qui avait mis en place le plan basé sur une chaîne de commandement lourde et complexe. « Les informations montent d’étage et étage et prennent du temps avant de revenir en suivant le même chemin ». Or, pour lutter efficacement contre le terrorisme, l’armée a besoin d’unités légères et spécialisées – intervention en zone urbaine, intervention dans des maquis, en montagne…- capables d’exploiter rapidement les éléments fournis par le renseignement.
Exemple : où sont sont passés nos parachutistes de Biskra, considérés parmi les meilleurs de la région du Maghreb et du monde arabe? « Ils existent toujours mais personne ne connaît leurs missions actuelles. On ne sait pas comment ils sont utilisés », reconnaît l’ancien responsable de la lutte antiterroriste.
En Afghanistan, les pays de l’OTAN ont revu à plusieurs reprises leurs méthodes de lutte contre les Tabilans et Al-Qaïda pour mieux s’adapter aux évolutions sur le terrain. En Algérie, un nouveau plan de lutte contre les groupes armés tarde à voir le jour.
Par samir allam