Lutte contre le salafisme et l’extrémisme religieux: Les zaouias en sentinelles

Lutte contre le salafisme et l’extrémisme religieux: Les zaouias en sentinelles
lutte-contre-le-salafisme-et-lextremisme-religieux-les-zaouias-en-sentinelles.jpg

A l’heure où le discours salafiste «daechien» empoisonne la vie de plusieurs pays du Moyen-Orient, du Maghreb et de l’Europe, les zaouias œuvrent sur le terrain pour lutter contre ce phénomène. Elles sont considérées désormais comme un antidote à l’avancée de ces extrémistes qui menacent sérieusement la stabilité de la région.

De notre envoyée spéciale à Adrar, Thanina Benamer

Dans la wilaya d’Adrar, des notables et des chouyoukh nous ont ouvert leurs portes. Ils nous parlent des orientations du ministère des Affaires religieuses privilégiant la voie de la modération. La wilaya d’Adrar regorge de zaouias. Elle compte le plus grand nombre d’écoles coraniques en Algérie. Il y a en tout 497 dont 25 fonctionnent en régime d’internat avec 4000 internes sur un effectif global de près de 70 000 apprenants.

L’encadrement est assuré par 1000 enseignants, entre imams, modérés et suppléants. La plus connue est la zaouia de Cheikh El Alama Sidi Mohamed Belkebir. Des notables rencontrés sur place regrettent l’avancée du salafisme dans le monde.

«Leurs barbes et leur nisfe el saq ne sont qu’un moyen de tromper la pensée collective», lance «to de go» Driss, imam de la wilaya de Boumerdès et élève dans la zaouia de Sidi Mohamed Belkebir. «La religion est une force spirituelle, et non pas un moyen vestimentaire qu’on affiche aux yeux de tous pour dire que nous sommes des bons musulmans», dit-il.

«L’Islam de nos ancêtres n’a jamais incité à tuer des êtres humains pour imposer la religion. Ces actes relèvent d’une idéologie extrémiste loin de tout humanisme», a tenu à dénoncer cet imam modéré.

«Dieu est dans notre cœur, nous sommes à même de le vénérer et de réciter les versets coraniques sans sombrer dans des discours haineux et extrémistes», affirme Driss qui nous a invité à rentrer au mausolée du cheikh défunt.

Autour du tombeau, des fidèles viennent de toute part pour prier Dieu. «Il est bon de prier en tout lieu saint», chuchote un visiteur accroupi par terre face à la tombe du cheikh de la zaouia. Marginalisé depuis l’Indépendance, le rôle non assuré par les zaouias a entraîné un «vide spirituel» dans la société algérienne. Les notables rencontrés à Adrar estiment que ce vide a «laissé une porte ouverte et une brèche au discours salafiste qui a endeuillé le pays durant toute une décennie».

Certains d’entre eux vont jusqu’à assurer que ce vide a concerné aussi les autres nations.

Ce qui a favorisé la pensée «daechienne» surtout parmi la jeunesse des pays musulmans.

Les autorités inquiètes  

Dans la localité de Timentit, le cheikh de la zaouia de Cheikh Sidi Ahmed Didi Bekraoui, affirme que le rôle des zaouias est «indispensable dans la lutte contre toute pensée extrémiste et violente qui s’appuie sur la religion musulmane pour justifier des actes barbares».

Il rappelle que le Premier ministre, lors d’une récente visite dans la wilaya d’Adrar, à appelé les imams qui sortent des zaouias à prévenir des dangers qui menacent le pays au niveau des frontières.

Mohamed Aïssa, ministre des Affaires religieuses et des Waqfs, lui aussi, a appelé les imams à consacrer des passages dans leur prêche du vendredi pour ce même danger du «salafisme».

«Loin du discours politique, l’imam est tenu de faire passer des messages de paix et de tolérance comme dicté par notre Livre Saint, le Coran», nous dira Cheikh Sidi Ahmed Didi. Chaque vendredi, des milliers d’Algériens se dirigent vers les mosquées pour leur prière.

Un moment «propice», selon lui, pour rappeler la nécessité de prendre conscience des graves dangers qui guettent le pays afin d’y faire face et de ne pas adhérer aux discours haineux et fanatiques distillés par des personnes qui n’ont aucune conscience et responsabilité envers la société.

Moulaye Midouni Mahmoud, coordinateur des zaouias dans les wilayas du sud du pays, nous dira que le gouvernement les a appelés et a insisté pour expliquer aux citoyens qu’ils doivent faire preuve de soutien aux différents services de sécurité en mission le long des frontières. Le dernier acte justifiant le rejet et la dénonciation du discours salafiste était l’attaque perpétré contre le site gazier, à Kracheba dans la wilaya de Ghardaïa.

Le coordinateur nous fera savoir que samedi, le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales ainsi que celui des Affaires religieuses donneront le coup d’envoi d’un congrès sur le rôle des zaouias dans la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme de manière générale. Les conférences auront lieu à l’université de la wilaya d’Adrar.