Le kidnapping, un moyen pour financer les actes terroristes
La stratégie des groupes terroristes, depuis quelques années, consiste à opérer des kidnappings pour obtenir le paiement de rançons conséquentes, lesquelles sommes sont ensuite investies en armes et en matériels.
Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, a présenté dernièrement deux projets de loi revêtant un caractère d’urgence, compte tenu de certains impératifs induits par les engagements internationaux concernant le texte sur le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, suscitant une tempête dans un verre d’eau au motif que ces moutures n’étaient pas inscrites à l’agenda des élus…
Si le premier projet, relatif à la révision du Code pénal, vise à clarifier, tout en en renforçant l’arsenal, le dispositif juridique destiné à la protection de la femme dans une société encore fortement tributaire des comportements et des pensées archaïques, le second a pour objectif la définition de l’infraction adaptée aux normes internationales et le renforcement des mécanismes de gel ou de saisie des fonds soupçonnés d’alimenter le terrorisme ou d’en résulter. La stratégie des groupes terroristes, depuis quelques années, consiste à opérer des kidnappings pour obtenir le paiement de rançons conséquentes, lesquelles sommes sont ensuite investies en armes et en matériels qui entretiennent et stimulent les foyers de tension, voire les actes de guerre contre les pays ciblés. L’ Algérie n’échappe pas à cette tactique, même si elle est de moindre envergure et s’apparente bien plus à des actes de grand banditisme qu’à des opérations terroristes réelles. Si la Concorde civile puis la Réconciliation nationale ont permis, à une échelle non négligeable, un blanchiment d’argent tel que des villes nouvelles ont prospéré dans le commerce informel de l’import-import – c’est le cas du quartier Dubaï à El Eulma, du Hamiz et de quelques autres localités -, le temps est venu de se conformer aux règles en vigueur dans les pays et les organismes qui ont fait de la lutte contre ces fléaux une action prioritaire. Avec un texte plus explicite, les banques pourront désormais disposer d’un ancrage juridique à même de leur permettre de procéder au gel des fonds douteux, surtout que le ministre de la Justice a bien précisé que ce projet de loi «tient compte de l’équilibre entre le régime constitutionnel algérien et les engagements internationaux du pays».
Tayeb Louh a, d’ailleurs, expliqué que la nouvelle mouture propose trois amendements principaux, dont le premier concerne une définition «précise et globale» du délit de financement du terrorisme, «considéré le financement du terrorisme comme un èmendement porte sur la définition des procédures juridiques et administratives relatives au gel ou à la saisie des avoirs et propose que le président du tribunal soit habilité à prendre une telle décision.
Le troisième concerne «le parachèvement des procédures de prévention relatives au devoir de vigilance concernant les transactions financières suspectes».
A cet égard, le Centre africain d’études et de recherches sur le terrorisme (Caert), basé à Alger, a formulé un diagnostic édifiant sur la situation actuelle, estimant que la nature même du terrorisme, ainsi que ses méthodes d’organisation et de fonctionnement, ont beaucoup changé, à tel point que l’allégeance à l’organisation-mère al-Qaîda est devenue plus formelle que réelle, les groupes recourant à des financements locaux, se tournant alors vers les trafics de drogue, le trafic d’armes et les rapts.
Conscients de la jonction des efforts des Etats ciblés pour mener une lutte commune contre le fléau du terrorisme, «des groupes criminels puissants profitent de la vulnérabilité de ces pays pour utiliser le golfe de Guinée comme un itinéraire d’accès à la cocaïne provenant de Colombie et d’Afghanistan vers la vaste zone sahélienne», a averti le Caert qui constate qu’ «un deal existe, bel et bien, entre les trafiquants de drogue, d’armes, d’êtres humains et les terroristes».
A cette menace avérée doit correspondre une riposte appropriée et, l’aménagement de l’arsenal juridique en la matière constitue un pas dont on devrait mesurer, à court ou moyen terme, les effets positifs.