La masse de l’argent blanchi à travers le monde se chiffre par milliards de dollars. Aussi, le phénomène a pris, ces dernières années, une dimension transnationale grâce à une plus grande fluidité dans la circulation des capitaux d’où les difficultés à cerner les ramifications financières douteuses.
Pour le cas de l’Algérie, 2.400 cas d’opérations douteuses ont été révélées en 2010, a affirmé, hier, M. Hanafi Si Fodil, directeur de l’inspection externe à la Banque d’Algérie. «C’est une opération thématique qui a consisté à l’évaluation du dispositif de l’ensemble des banques, soit 20 banques, en sus des services financiers d’Algérie Poste». «Après 2010, les banques et établissements financiers ont amélioré leur dispositif ce qui a permis de limiter le nombre de cas» a-t-il indiqué.
Notre pays qui a introduit la lutte contre ce phénomène complexe comme étant un élément central dans la cartographie du risque bancaire a adopté, à travers la Banque d’Algérie, un nouveau règlement relatif à la prévention et à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le règlement 12-03 du 28 novembre 2012, exhorte les banques, les établissements financiers et les services financiers d’Algérie-Poste à concevoir un «programme écrit» de prévention, de détection et de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme devant inclure
«des procédures, des contrôles, une méthodologie de diligence en ce qui concerne la connaissance de la clientèle, des formations appropriées à l’attention du personnel en plus d’un dispositif de relations avec la Cellule de traitement du renseignement financier (CTRF)». L’ensemble des établissements financiers doivent également veiller à l’existence de «normes internes» en matière de «connaissance de la clientèle», comme le stipule le règlement. «Ce règlement a modifié celui du 15 décembre 2005 et a été pris avec la promulgation de la loi 05-01 relative à la prévention et à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme» précise le directeur de l’inspection externe à la Banque d’Algérie.
«A la lumière de l’évaluation mutuelle faite par les pairs (notamment le GAFI), en 2010, du dispositif national de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, il ya eu un certain nombre de recommandations pour l’amélioration et l’adaptation de notre dispositif national dont la modification de la loi début 2012» a-t-il indiqué. Par conséquent, le règlement est venu prendre en charge les modifications et les nouvelles dispositions contenues dans la loi de février 2012. Ces dernières ont porté sur la clarification des concepts en ce sens que la loi a apporté beaucoup en matière de définitions de concepts pour des raisons de précisions a affirmé, hier, M. Hanafi Si Fodil. A titre d’exemple, en ce qui concerne les institutions financières, l’ancienne loi comportait certaines ambiguïtés en ce qui concerne la définition de ces institutions. «On ne faisait pas de différence entre les institutions financières telles que les assurances, la bourse et les établissements financiers qui sont des établissements de crédits qui accordent des crédits à la clientèle mais qui n’ont pas le droit de recevoir des dépôts de la clientèle» dira t-il à ce propos. «On a clarifié cette situation de manière à faire la différence entre les institutions qui sont soumises au contrôle de la commission bancaire donc qui relèvent du domaine de la loi sur la monnaie et le crédit et les autres institutions qui sortent de ce domaine»
fera t-il remarquer. Cette loi a également introduit un élément nouveau en ce qui concerne la collaboration entre les différentes institutions et services qui sont impliqués dans la prévention et la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. En fait, il y a eu institutionnalisation de l’échange d’informations, la collaboration entre les services en plus de la coopération internationale déjà existante, expliquera M. Si Fodil.
Un règlement conforme aux normes du GAFI
Au titre du contrôle conféré aux banques, l’invité de la rédaction de la chaîne III affirmera qu’en «ce qui concerne la connaissance de la clientèle, tous les dispositifs de prévention et de lutte contre le blanchiment d’argent relevait d’une transposition des normes du groupe d’action financière international «GAFI» qui ont constitué une référence à la démarche d’amendement. Il s’agit, pour les banques de connaître les habitudes du client, le motif d’ouverture du compte ainsi que l’objet et la nature des opérations, ses habitudes dans l’utilisation de ses comptes bancaires en plus de son identité». Quant à concilier contrôle et secret bancaire, il répondra qu’en ce concerne le secret bancaire, «la commission bancaire, pour le compte de laquelle l’inspecteur de la Banque d’Algérie intervient, le secret bancaire n’est pas opposable à cette structure car c’est la loi de la monnaie et du crédit qui le précise». Plus explicite, il affirmera que pour ce qui est du volet précis de la prévention et la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, la loi 05-01 modifiée et complétée a levé le secret bancaire par rapport à la cellule de traitement du renseignement financier». Ces institutions, a-t-il spécifié, «sont liées par le secret dans le cadre de leur intervention par rapport aux opérations de la clientèle, qu’elle soit bancaire ou dans un autre domaine». Aussi, les misions menées, après 2010, ne sont pas des missions spécifiques au domaine du blanchiment d’argent et le financement du terrorisme «car on a mené des opérations de contrôle intégral dont le volet dispositif anti blanchiment en constitue un élément». «Par conséquent, le nombre des opérations atypiques ou douteuses se limitent à cet échantillon. Donc on est à 30, 40 et 50 cas détectés annuellement par nos inspecteurs» dira t-il. Au chapitre du contrôle, le représentant de la Banque d’Algérie fera état de deux types de contrôle par les banques soit «un contrôle permanent qui se fait à partir de reporting (déclarations des banques sur leur situation financière et autres) et de différents rapports externes et même à partir d’informations de la presse». En second lieu, il mentionnera «un certain nombre d’enquêtes spécifiques sur des cas particuliers». Dans le même contexte, il indiquera que les opérations douteuses ne sont pas forcément liées à un montant précis lorsqu’il s’agit de financement du terrorisme du fait que les petites sommes peuvent également révéler un doute et aboutir sur de petites opérations. «Nous ne regardons pas l’importance du montant mais la récurrence de ce dernier et le profil du client de même que la provenance de l’argent. Sur un autre plan, il fait savoir que la facilitation de l’ouverture de comptes bancaires sera soumise à des contrôles à postériori. La procédure arrêtée prévoit que, le client doit remplir «un questionnaire qui est très précis sur l’objet de l’ouverture du compte et l’origine du fond ce qui permet à la banque de tracer le profil du client et du fonctionnement de son compte». Il ajoutera, dans ce sens que, le règlement du conseil de la monnaie et du crédit du 28 novembre 2012 interdit l’ouverture de comptes anonymes ou numérotés. Des mesures qui rentrent dans le cadre de la prévention.
D. Akila