Les 600 salariés de l’usine Michelin Algérie sont au chômage technique depuis le 4 juillet suite à l’arrêt de la production prévu par le plan de rachat de l’entreprise par le groupe agro-alimentaire privé algérien Cevital. Mais les conditions de départ restent floues et la contestation des salariés monte.
Depuis le 4 juillet dernier, il n’y a plus âme qui vive sur le site de l’usine de fabrication de pneumatiques de Bachdjerrah, à l’est d’Alger. Les machines ont été arrêtées et les portes fermées, comme le prévoyait le plan de rachat de l’unité algérienne de Michelin, leader français du pneumatique, par Cevital, premier groupe privé algérien spécialisé dans l’agroalimentaire.
En théorie, l’usine sera fermée jusqu’au au 20 août prochain mais les salariés doutent qu’elle rouvre avant sa fermeture définitive, prévue au 31 octobre. Déjà, depuis l’annonce du rachat de leur entreprise, le 10 juin dernier, la production était quasiment arrêtée.
Si la disparition de l’usine de Bachdjerrah, construite en 1959, est désormais une certitude – Isaad Rebrab, PDG de Cevital, a annoncé, sur Radio M, la transformation du site en centre commercial – , les 450 salariés de la branche industrie, eux, restent dans l’incertitude quant à leur sort. Certes, ils ont passé un « entretien d’orientation » et reçu la visite de représentants de Cevital venus leur présenter l’entreprise en détail. Mais rien n’a été écrit ni signé, a confié à Maghreb Emergent l’un d’eux. « Il s’agit seulement d’entretiens verbaux au cours desquels on nous demande ce que l’on veut faire sans pour autant nous faire de propositions concrètes », a-t-il expliqué.
Les employés de la branche industrie sont donc partis en « congé forcé », avec de simples promesses, soit d’un poste dans une des lointaines unités de Cevital (Bouira ou Bordj Bou Areridj, à 120 et 220 km d’Alger, respectivement), soit d’indemnités. En revanche, les tractations entre Michelin et Cevital s’officialisent sur le papier : la signature de l’accord de rachat a été avancée au 15 juillet, au lieu de la fin juillet comme prévu initialement, a révélé notre interlocuteur.
Opposition aux conditions de rachat
Pour les 150 salariés du service groupe rassemblant les métiers administratifs (commerce, logistique, finance, etc.), la fermeture de l’usine de Bachdjerrah ne signifie pas mise au chômage technique. La plupart d’entre eux travailleront donc pendant l’été et certainement au-delà pour Cevital, selon les termes du plan de rachat prévoyant la prise en charge des employés de Michelin par le groupe d’agroalimentaire privé. Mais soixante-dix d’entre eux dénoncent les conditions de cette transition.
Dans une lettre ouverte adressée à la mi-juin dernier au directeur général de la Société Michelin Algérie, Igor Zyemit, ces employés refusent de rejoindre le groupe Cevital sans avoir perçu au préalable des indemnités immédiates, car estiment-ils, « on change d’entreprise, donc il y a rupture de contrat ». Contraints d’accepter l’offre d’emploi de Cevital – un refus signifierait une démission et, par conséquent, la perte de leur droit à une réparation -, ils demandent à recevoir « les mêmes indemnités que leurs collègues de l’usine et non la promesse d’une prime » au bout de deux ans de travail chez l’acquéreur de Michelin Algérie. « Nous sommes les grands perdants », déplore l’un des signataires qui se disent prêts à « aller jusqu’au bout pour obtenir gain de cause ». Suite au refus de la direction de satisfaire leurs revendications, ils ont saisi l’inspection du travail.