Alors que je mettais de l’ordre dans ma documentation personnelle, je suis tombé, ce matin, sur un article que j’avais publié dans le Quotidien d’Oran. Daté de novembre 2007, il pointe, en s’en réjouissant, une scène assurément inédite dans le paysage algérien: la présence d’hommes politiques aux soutenances de thèses et aux rendez-vous académiques.
Rappel du contexte: une jeune historienne franco-algérienne soutient à l’Institut d’Histoire du Temps Présent (IHTP) une thèse de doctorat en Histoire sur l’Union Démocratique du Manifeste Algérien (UDMA), le parti créé par Ferhat Abbas au sortir de la répression sanglante du 8 mai 1945. Menée et présentée sous la direction de Benjamin Stora, la recherche a crédité le savoir académique d’une séquence importante sur l’Histoire du mouvement national algérien.
Forte de la qualité de sa recherche, Malika Rahal enrichit, du coup, les rangs de la « nouvelle génération d’historiens de la guerre d’Algérie » chère à l’historien Pierre Vidal-Naquet. Son irruption sur ce terrain est d’autant plus remarquée que l’historienne en herbe glane une « mention très honorable avec les félicitations du jury ». Au-delà de sa prestation, Malika contribue à créer un petit -mais sympathique- événement.
Trois noms de la scène politique algérienne figurent dans les rangs du public venu assister à la soutenance: Abdelhamid Mehri (décédé en 2012), Mohamed Bedjaoui et Sadek Hadjerès. Leur présence n’a pas échappé à ma curiosité de journaliste. Belle, la surprise l’est doublement. Un: ce n’est pas tous les jours que les hommes politiques algériens -au pouvoir comme dans l’opposition- font un détour par les campus et les forums non-officiels pour sacrifier à un moment académique. Deux: la présence du trio est d’autant plus intéressante que l’homme au cœur du sujet de la thèse n’a pas cheminé dans le même sillage que les trois.
Resté à l’écart, l’historien Mohamed Harbi observe la scène inédite sans se joindre à la singulière « tripartite ». Le lendemain, Le Quotidien d’Oran titre: »Ferhat Abbas réconcilie Mehri, Bedjaoui et Hadjerès », le temps d’une soutenance de thèse.
Sollicité par mes soins pour un entretien « non pas sur la conjoncture actuelle mais sur le sens de sa présence à la soutenance de Malika Rahal et sur le mouvement national », Abelhamid Mehri oppose gentiment une fin de non-recevoir. Pour toute réponse, il se contente d’un « Oh, vous savez, il est plus aisé de parler de la conjoncture actuelle que de re-parcourir les pages des années de combat indépendantiste ». Une allusion à l’Histoire compliquée du mouvement national.