L’ennemi du monde a un nom qui transparaît chaque jour un peu plus. A chaque mort. A chaque assassinat. A chaque horreur.
«Daesh est à nos portes!» pour reprendre le cri d’un confrère. Mais bien sûr qu’elle y est. Elle y est depuis que les Américains avaient survécu à leur ruée vers l’or grâce au génocide des paisibles Indiens. Elle y est depuis que les Français avaient décapité leur roi pour lui substituer la République qui viendra un jour, au nom de la civilisation, pervertir ses ambitions et plonger ses sacro-saints principes dans la mare puante des hypocrisies. Elle y est depuis que Ali bnou Abi Taleb (Que Dieu l’agrée) fut renversé dans la hadithat Siffin.
Daesh existe depuis que des milliers d’innocents furent assassinés par les kharédjites sans qu’on leur explique pourquoi. Depuis que des millions d’innocents périrent dans les deux guerres mondiales sans trop savoir pourquoi. Depuis que Néron, rien que pour le plaisir morbide de laisser son nom de sanguinaire errer à reculons dans l’Histoire, avait brûlé Rome. Depuis que la mère de Yasser fut disloquée par les Qoraïchites… Faisons bref et disons qu’elle existe depuis toujours, depuis Caen! Elle change de nom, de forme et de manière d’opérer.
Son existence n’est pas une énigme. C’est un fait qu’il convient de reconnaître. Ce qui pose problème cependant, c’est pourquoi elle est là. Qui a fait qu’elle existe? Et pourquoi? Si l’on se limite à sa forme actuelle, la réponse est simple, aisée et sans équivoque. C’est une création des Américains, sur laquelle sont venues se greffer des touches de plusieurs pays occidentaux. Et pas seulement! Une sorte de Frankenstein gigantesque qui, du moins d’après ce que veulent nous faire croire les Américains, se serait émancipé et aurait échappé à tout contrôle. On ne crée pas des monstres impunément car il vient toujours ce moment où ils se retournent contre leurs propres géniteurs.
Cela s’était déjà vu par un passé pas très lointain lorsque, montée de toutes pièces par la CIA en vue de combattre les Russes en Afghanistan, une organisation qui aura pour nom El Qaîda, se retournera plus tard contre les intérêts de ces mêmes Américains. Mais, comme dirait le général Giap, les faiseurs de monstres sont de «mauvais élèves». Ils ne retiennent jamais les leçons d’histoire. Ils oublient vite, sous leur besoin de force, sans doute et, devant le désir de faire du mal, certainement.
L’Organisation de l’Etat islamique se nourrit à quatre sources réelles. Celles-ci lui permettent de prendre force et de grandir en devenant de plus en plus dangereuse.
Les quatre sources
Une organisation comme Daesh a toujours besoin de sang pour se nourrir. Pour lui permettre de rester en vie, ils lui avaient donné l’Irak en cadeau. Attentats, génocides, tueries, assassinats, horreur… tout y était passé. La bête, grandissant, avait besoin de beaucoup plus de sang. Ils lui offraient la Libye, la Tunisie et l’Egypte. Seuls les Libyens tombèrent dans le piège car Tunisiens et Egyptiens, contournèrent, chacun à sa manière l’écueil. Hillary Clinton a beau vouloir cacher la réalité dans son dernier livre Le temps des choix difficiles (paru en juin 2014), en prétendant que les Etats-Unis ne sont pour rien dans les événements de ces trois pays, elle n’arrivera jamais à cacher le rôle de son pays dans ce malheur qui a frappé les Arabes particulièrement.
L’ennemi du monde a un nom qui transparaît chaque jour un peu plus. A chaque mort. A chaque assassinat. A chaque horreur. Le monstre n’est pas toujours celui que l’on croit, souvent c’est celui qui est derrière.
«L’Occident a enfanté l’EI» avait hurlé, rageur, un jour, Dominique de Villepin (1). Et à la tête de cet Occident, il y a les Américains.
Un monstre, et en plus du sang innocent qu’ils lui versent dans le fleuve de la haine, c’est aussi à coups de mensonges que certains contribuent à faire sa force et sa renommée. Au début, pour détruire Daesh, il n’était question que de quelques frappes. Ensuite, quelques grandes figures parmi les «experts» américains firent leur apparition pour dire que cela nécessiterait «trente ans»(2) avant de voir ce délai renvoyé à l’infini. «Cela pourra durer indéfiniment» corrigèrent d’autres experts, toujours américains.
Des mensonges qui n’ont pour but que d’éviter d’avoir à répondre à des questions embarrassantes du genre: comment se fait-il que les avions qui avaient pu détruire l’armée régulière irakienne, jugée très puissante à l’époque, n’arriveraient-ils pas à bout d’une armée non régulière et qui n’a que quelques années d’existence? Comment se fait-il qu’une organisation que tout le monde dit vouloir combattre trouve le moyen de s’approvisionner normalement en armement lourd et sophistiqué? Mais n’est-ce pas que, quand on est puissant, on ne s’embarrasse pas des réponses, surtout lorsque les questions viennent des plus faibles de ce monde?
Dans cette nouvelle galère dans laquelle les Américains semblent vouloir mener tout le monde, le silence presque total des Russes est inquiétant. Y a-t-il eu négociation autour de ce silence? Ou bien les Russes sont-ils en train de préparer d’autres actions sur lesquelles Américains et Européens fermeraient les yeux?
Mais il n’y a pas que le sang et le mensonge qui permettent à une telle organisation de grandir et de mettre la main sur des territoires de plus en plus vastes. Il y a aussi la faiblesse des autres qui lui permet d’être toujours plus forte.
Daesh n’ira jamais en Occident. Mieux, elle n’ira jamais en Israël, juste à côté pourtant. La question mérite d’être posée, tout bêtement: pourquoi? Oui, pourquoi ces nouveaux combattants au nom de la religion ne s’en prennent pas aux Israéliens supposés être leurs ennemis? Pourquoi ne tentent-ils pas d’envahir la France, l’Allemagne ou la Grande-Bretagne par exemple, voire les Etats-Unis?
Il n’est pas nécessaire de beaucoup réfléchir pour trouver la réponse. C’est la puissance de ces pays qui, à elle seule, les dissuade de penser, rien que penser, à une telle action. Si l’invasion des territoires en Irak et en Syrie avec la désormais probable apparition en Libye et ailleurs dans les pays du Maghreb a été possible c’est seulement – et seulement – parce que ces pays sont faibles, impuissants.
Certains gouvernants, généralement trop épris de leur personne et préoccupés par l’avenir de leurs seules progénitures, ont oublié de s’occuper de leurs pays. Chômage, malnutrition, niveau d’éducation catastrophique, couverture dérisoire des soins, liberté d’expression bâillonnée, corruption, rente, vol, mal-vie, hogra, injustice, absence de production, dépendance de l’étranger… telles sont les médailles à accrocher à la poitrine de ces gouvernants dont les pays, à force d’avoir été oubliés, se mettent à trembler à la moindre menace. Daesh, El Qaîda, Aqmi… des noms qui à eux seuls empêchent beaucoup de dormir à cause de leur faiblesse et de leur mauvaise gestion des affaires de leurs pays. C’est aussi à cette faiblesse que viennent se nourrir les monstres.
La quatrième source à laquelle se fortifie l’organisation EI, c’est l’extrémisme. C’est d’ailleurs son abreuvoir préféré. Or, pour pousser à l’extrémisme, quoi de plus sûr que d’effectuer des opérations militaires. La violence appelle la violence et elle pousse à l’extrémisme.
Il n’a échappé à personne, depuis le début des temps, que l’on n’éteint pas la flamme d’un terrorisme par les armes mais par des moyens autres. Nombreux sont les observateurs de tous bords qui soutiennent que les armes ne font qu’empirer la situation (3): «Nous savons par expérience que l’intervention militaire, ces frappes militaires, ne peuvent pas donner le résultat que nous espérons, l’éradication d’un groupe terroriste.
Toute l’expérience depuis une décennie, je dirais même depuis 50, 60 ans, c’est qu’au contraire, cela alimente le terrorisme», a déclaré, lucide, De Villepin (4).
Que les Américains insistent pour entraîner d’autres pays dans les frappes aériennes qui ne donneraient rien, voilà ce qui est plus qu’inquiétant et la grande question qui se pose est: alors c’est pourquoi les Américains vont-ils à contre-sens de la logique humaine? Question d’intérêts dira, certainement, Hillary Clinton.
Faut-il s’inquiéter, chez nous, de l’arrivée probable de Daesh? Sans doute. Et ce qui inquiète plus encore c’est ce confort de l’inertie qui semble endormir nos responsables qui ne se rendent pas compte de certaines urgences.
«Le flambeau»… Tiens donc, il réapparaît!
Certes l’ANP fait le travail qu’elle a à faire aux frontières et à l’intérieur du territoire national, mais il n’y pas que cela aujourd’hui. Les gouvernants doivent se réveiller. Ouvrir les yeux. Il y a des questions urgentes comme cette situation à Ghardaïa qui risque de pousser aux extrémismes les plus violents à un moment aussi crucial et nous exploser à la face avec des conséquences que seul Dieu sait.
Il y a des changements à apporter dans la manière de gérer, dans celle de prendre en charge les préoccupations des citoyens, dans celle de faire tourner les jeunes vers l’avenir et ce ne sont pas les déclarations absolument obsolètes de certains ministres, du genre «la transmission du flambeau se fait progressivement à la jeunesse», qui aideraient à maintenir les jeunes du bon côté de la barrière. Difficile de dire si le ministre en question ressentait, en prononçant ces mots, quelque chose d’autre que de l’ironie et du mépris à l’égard de cette jeunesse qui a oublié qu’il existerait un quelconque… flambeau.
Depuis 1962, on parlait à la jeunesse de ce flambeau et la jeunesse algérienne se préparait à le prendre avec honneur et fierté. Beaucoup de temps est passé depuis. Des générations ont péri sur les bords d’une route obscure qu’elles ont empruntée. Et tout le monde a fini par oublier la farce du flambeau. A défaut d’autre chose, on s’y est fait et c’est tout.
Plus d’un demi-siècle après, un ministre (de la Jeunesse de surcroît), vient promettre, comme en 1962, à la jeunesse que le passage du fameux flambeau se fera progressivement. A qui croit-il donc parler? A un peuple qui vient de sortir de la guerre? A un peuple d’analphabètes, qui ne sait pas compter? A une jeunesse qui ne comprend pas trop de choses? A pas de tortue, le flambeau, si flambeau il y avait, serait arrivé sur Neptune en moins de cinquante ans, alors? Comme quoi, beaucoup de nos responsables continuent de dormir ou alors c’est qu’ils n’ont appris que deux ou trois phrases qu’ils répètent à tout bout de champ, même 60 ans plus tard. Pauvres de nous. Et dire que Daesh, qui est juste à côté, se nourrit bien de telles erreurs!