Mir Hossein Moussavi, battu à l’élection de vendredi en Iran par le président sortant, Mahmoud Ahmadinejad, a demandé, dimanche 14 juin, au Conseil des gardiens l’annulation du scrutin. « Aujourd’hui, j’ai présenté officiellement au Conseil des gardiens une demande visant à faire annuler les résultats de l’élection présidentielle », a indiqué l’ancien premier ministre sur son site Internet. Il a reçu le soutien implicite des Etats-Unis, puisque le vice-président américain, Joe Biden, a déclaré sur NBC que « vu la façon dont ils répriment la liberté d’expression, la façon dont ils répriment la foule, la manière dont les gens sont traités, il y a de vrais doutes » sur la légitimité de la réélection du président sortant. »J’invite les Iraniens à poursuivre leurs manifestations à l’échelon nationale de manière pacifique et conforme à la loi », ajoute M. Moussavi sur son site, alors que les manifestations violentes des partisans de l’opposition se poursuivent à Téhéran, dimanche après une nuit d’échauffourées. De nouveaux heurts se sont déroulés entre quelque 200 partisans de Mir Hossein Moussavi et la police. Les manifestants, qui protestaient place Vali Asr contre la réélection du président Mahmoud Ahmadinejad, ont à nouveau scandé « Mort au dictateur! », et lancé des pierres en direction de la police. Les forces de l’ordre ont alors riposté à l’aide de bombes lacrymogènes.
Les forces de l’ordre auraient investi des boutiques où des protestataires avaient trouvé refuge, et sont reparties avec plusieurs d’entre eux. Au moins 60 « organisateurs » des émeutes de samedi ont été arrêtés, déclare pour sa part le chef-adjoint de la police, Ahmed Reza Radan. « Dix personnes considérées comme les cerveaux des émeutes récentes ont été interpellées (…). Quelques autres seront arrêtées bientôt », ajoute-t-il. Selon la BBC, les locaux de la chaîne d’information Al-Arabiya auraient été fermés par les autorités, sans raison.
Une manifestation des partisans de Mahmoud Ahmadinejad, en présence de leur champion, est prévue en fin d’après-midi dans un quartier du centre, après une conférence de presse du président réélu prévue à 13 h 30 (11 heures, à Paris). Selon le ministre de l’intérieur Sadegh Mahsouli, M. Ahmadinejad, 52 ans, a recueilli 24 527 516 voix (62,63 %), devant l’ex-premier ministre Moussavi, arrivé deuxième avec 13 216 411 voix (33,75 %).
DES DIZAINES DE PERSONNES ARRÊTÉES
L’annonce officielle de la réélection du président Mahmoud Ahmadinejad a provoqué samedi des émeutes en plein cœur de Téhéran de la part des partisans de Mir Hossein Moussavi, et des accusations de tricherie. « Dictature, dictature ! », scandaient des milliers de partisans en colère de M. Moussavi avant de s’en prendre aux policiers qui répliquaient à coup de gaz lacrymogène. Des dizaines de personnes ont été arrêtées, menottées et conduites dans un local du ministère de l’intérieur. Les affrontements se sont poursuivis tard dans la nuit avant que le calme ne revienne finalement vers deux heures du matin, après le déploiement des forces de l’ordre, des agents en civils et des bassistes (milice islamique).
Le réseau de téléphonie portable, coupé samedi soir, a été rétabli dimanche matin. Les Gardiens de la révolution, l’armée idéologique du régime qui a apporté son soutien à l’ultraconservateur Ahmadinejad, ont averti qu’ils ne permettraient pas l’avènement d’une « révolution de velours », faisant allusion aux thèmes de campagne de M. Moussavi, partisan d’une ouverture vers l’Occident. La capitale n’avait pas connu de telles violences depuis les émeutes estudiantines de juillet 1999.
A l’issue de ces afffrontements, plusieurs responsables réformateurs, partisans de Mir Hossein Moussavi, ont été brièvement arrêtés samedi. L’agence officielle Irna a accusé certains d’entre-eux de diriger « les troubles dans la capitale d’une maison du nord de Téhéran ». Tous les responsables arrêtés sont membres du Front de la participation et de l’Organisation des Moudjahidine de la révolution islamique (Omri), deux principaux groupes réformateurs qui soutenaient M. Moussavi à l’élection présidentielle de vendredi.
Un porte-parole du parquet a précisé que les personnes n’ont pas été arrêtées mais qu’elles ont été convoquées et ont été averties « de ne pas entretenir les tensions » existantes dans le pays. Samedi soir, Mir Hossein Moussavi a appelé ses partisans à rester calmes et à ne pas recourir à la violence, dans un communiqué publié sur le site de sa campagne électorale. L’Association du clergé combattant de l’ancien président réformateur iranien Mohammad Khatami a appelé, samedi, à l’annulation de l’élection présidentielle.