L’opposition bloquée par des contre-manifestants à Alger, la police se déploie

L’opposition bloquée par des contre-manifestants à Alger, la police se déploie

Le rendez vous de l’opposition samedi à Alger en trois endroits pour marcher en faveur d’un changement du système a une nouvelle fois tourné court, les manifestants se retrouvant bloqués par la police et des militants agressifs favorables au pouvoir, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Une faction de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) avait fixé pour ce samedi à Alger ce rendez-vous pour 11h00 locales (10H00 GMT), bravant l’interdit de manifestation dans la capitale. Mais les quelques dizaines de contestataires se sont retrouvés rapidement ceinturés par la police tandis que des contre-manifestants occupaient le terrain.

Aux cris de « Bouteflika n’est pas Moubarak », l’ex-président égyptien chassé par la foule le 18 février, quelques dizaines de jeunes arborant des portraits du président Abdelaziz Bouteflika ont pourchassé et molesté des manifestants dans l’un des trois sites, la Place du 1er Juillet dans le quartier d’el Madania.

Les contre-manifestants s’en sont ensuite pris au chef du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD, 19 députés sur 389 au parlement) Said Sadi, membre de la CNCD tout juste arrivé sur les lieux mais contraint de repartir face à une cinquantaine de jeunes déterminés « à le lyncher », selon un témoin.

M. Sadi a tout de même eu le temps de crier: « Nous continuerons à marcher quelles que soient les mesures prises par le régime pour nous en empêcher ».

Les marches de samedi sont les cinquièmes tentatives depuis le 22 janvier.

Face à eux, la police dotée d’un dispositif léger s’est rapidement renforcée avec des éléments casqués munis de matraques et gaz lacrymogènes pour boucler le secteur et finalement disperser la foule.

Le dirigeant de l’opposition a affirmé à l’AFP par téléphone que ses agresseurs lui avaient « donné un coup de couteau, mais ce n’est pas grave ».

Interrogée, la police déclarait à l’AFP n’avoir reçu aucune plainte.

Dans le quartier de Hussein Dey, face au tribunal, une dizaine de manifestants arrivés une heure avant la marche, parmi lesquels deux députés du RCD et Me Ali Yahia Abdennour, président d’honneur de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH), âgé de 90 ans, ont été ceinturés par les forces de l’ordre.

A l’ouest d’Alger, à Ain Benian, des barrières avaient été érigées samedi matin pour bloquer l’accès aux piétons tandis que des véhicules blindés et un gros contingent de policiers casqués surveillaient les alentours, sans qu’il ne se passe quoi que ce soit, selon des témoins.

M. Sadi a accusé les autorités d’avoir interdit les marches ailleurs qu’à Alger alors que ces dernières ont toujours affirmé que l’interdiction s’appliquait à la seule capitale. Selon lui, une interdiction de marche a été décrétée pour samedi à Batna (430 km au sud-est d’Alger).

A Oran, la grande ville de l’ouest algérien, une marche prévue à partir de la Place du 1er Novembre, été interdite, selon la CNCD. Elle a fait état d’une centaine d’interpellations, dont son représentant local Kaddour Chouicha et une dizaine de journalistes, selon l’un d’entre eux. Ils ont ensuite été relâchés.

La CNCD, créée le 21 janvier dans la foulée des émeutes du début de l’année qui ont fait cinq morts et plus de 800 blessés, s’est scindée le mois dernier entre partisans de marches dans les rues et la société civile et des syndicats autonomes plus favorables à un travail de fond.

« L’Histoire s’accélère et va bouleverser tous les pays arabes. C’est juste une question de temps pour l’Algérie. Si on nous laissait marcher, le peuple marcherait avec nous », a affirmé aux journalistes Me. Ali Yahia.