l’onho veut se réapproprier la gestion du pèlerinage Hadj 2014 : vers l’éviction des agences de voyages ?

l’onho veut se réapproprier la gestion du pèlerinage Hadj 2014 : vers l’éviction des agences de voyages ?

Le processus de participation à travers le retrait du cahier des charges a pour habitude de s’effectuer au mois de janvier. Cela n’a pas été le cas cette année. Veut-on, alors, réduire les agences au rôle de simples boîtes aux lettres ?

À cinq mois, à peine, qui nous séparent des premiers départs pour les Lieux saints, les agences de voyages algériennes, qui ont l’habitude de participer à cette opération, ne connaissent toujours pas le sort qui leur est réservé. De nouvelles dispositions ont été mises en œuvre cette année par les autorités qui ont décidé de prendre en charge l’hébergement faisant de l’Office national du hadj et de l’omra (Onho), une sorte de substitution à l’agence de voyages.

C’est du moins l’avis soutenu par un grand nombre de gérants d’agences de voyages qui nous ont saisis pour aborder le sujet dans sa globalité. “On assiste à quelque chose d’inédit dans la mesure où jamais un tel procédé n’a existé dans aucun autre pays et encore moins dans les pays arabes où les institutions de l’État veillent au grain, mais ne se substituent en aucun cas aux professionnels de cette activité”, commencent-ils par expliquer, se demandant par la même occasion “si l’on considère le pèlerinage comme du tourisme religieux ou plutôt un séjour particulier pour lequel le ministère du Tourisme n’a pas droit de cité”. Pour l’Algérie, cela semble être le cas.

Pour 2014, le prix du hadj ne changera pas, selon M. Barbara, responsable de l’Onho, qui l’a déclaré, récemment, à Echourouk TV. C’est la seule certitude pour le moment, notamment avec le report, inexpliqué, du tirage au sort qui devrait avoir lieu la semaine prochaine. Le retard est ainsi pris sur chaque étape en maintenant toute l’opacité qui caractérise le dossier et qui semble être la seule et véritable raison d’existence du ministère des Affaires religieuses.

Le retrait du cahier des charges pour les agences de voyages avait l’habitude d’intervenir au mois de janvier pour avancer sensiblement dans l’opération avec l’identification des agences retenues pour le pèlerinage. Une étape éliminée sur décision des autorités qui ont opté pour une nouvelle conception. “L’option, non seulement ne nous dérange pas. Elle a été l’une des propositions des agences auparavant sans jamais être prise en considération. Ils ont fini par l’adopter, et c’est tant mieux, mais ça ne nous empêche pas d’être inquiets”, insistent nos interlocuteurs. “Comment va-t-on gérer notre clientèle et répondre à ses attentes si l’on nous affecte des hôtels qui ne correspondent pas aux attentes voulues.

Comment faire dans le cas où il y aurait un changement d’affectation de dernière minute, alors que nous aurions construit notre produit sur des caractéristiques bien définies. Et puis, habituellement, le choix de l’hébergement pouvait être un argument supplémentaire qui pouvait peser dans le choix du pèlerin pour telle ou telle agence”, clament les professionnels, qui réclament “une véritable coordination et des engagements fermes” de façon à ne pas les discréditer aux yeux de leurs clientèles.

La commission ne compense pas les frais générés par l’agence

Les agences de voyages habituées à se charger de l’opération hadj s’élèvent contre les voix qui soutiennent qu’“el hadj est devenu une opération purement commerciale”. Et d’argumenter : “À peine 5 000 DA nous sont alloués pour chaque pèlerin. Mais compte tenu des charges supportées, non seulement ça devient une somme insignifiante, mais nous travaillons parfois à perte.” La commission rétrocédée par les pouvoirs publics ne peut, par conséquent, compenser les frais générés, notamment avec les nombreux déplacements à effectuer pour rencontrer les partenaires saoudiens et la prise en charge des guides et autres dépenses.

“Les pouvoirs publics nous ont démontré que cette manne financière que rapporte le hadj doit d’abord aller dans les caisses de l’État. C’est aussi simple que cela”, finissent-ils par en déduire, relevant qu’“il n’est pas permis, de ce fait, aux professionnels des voyages d’exercer leur métier dans de bonnes conditions”. Les agences n’en démordent pas et persistent : “S’il existe deux organismes qui peuvent dénoncer de mauvais agissements ou de mauvaises prestations ou même de féliciter dans le cas de la réussite de l’opération, ça ne peut être que les deux organisations des professionnels du secteur, qui sont la Fnat et le Snav.”

Pour ce qui est des 7 agences qui ont failli à leur mission d’encadrement pour l’omra, comme avancé par le DG de l’Onho, les agences s’interrogent sur les critères sur lesquels cet office s’est basé pour juger de cette défaillance : “Comment peut-on être juge et partie dans la mesure où c’est l’Onho qui délivre les autorisations ou agréments après étude minutieuse des dossiers ?” Reconnaissant, toutefois, que “certains manquements sont dus au manque d’expérience”.

Veut-on réduire les agences au rôle de boîtes aux lettres ou va-t-on carrément vers l’éviction des agences de cette opération ? Des questions qui restent sans réponses et qui suscitent l’indignation des professionnels des voyages religieux qui ne comprennent pas qu’on puisse témoigner autant de dédain à leur égard. “Si c’est pour sanctionner les agences qui ont failli à leur mission, ce n’est pas une raison pour pénaliser toutes les autres”, affirment-ils, avant d’ajouter : “Connaît-on la composition de cette commission chargée de sélectionner les infrastructures hôtelières ? Et qui procède à la location ? De quelle compétence professionnelle dispose-t-elle pour se substituer au rôle de l’agent de voyage ?”

L’État subventionne le hadj même pour les gens aisés

Dans tous les pays, à l’exception de l’Algérie, l’opération hadj bénéficie de deux à plusieurs formules. Les agences de voyages peuvent proposer des séjours à prestations améliorées pour ne pas dire hadj VIP. L’Égypte ou le Maroc, pour les citer en exemple, ont au minimum deux formules. La première est subventionnée et la seconde est relative aux VIP. L’Égypte se distingue par trois formules, alors qu’au Maroc, quel que soit le nombre d’agences qui participent, le royaume leur donne droit à 49 packs de façon à s’assurer de la qualité des prestations pour chaque pèlerin. Mais dans tous les cas de figure, le montage du produit ne peut relever que de la responsabilité de l’agent de voyages qui a toute la latitude d’opter pour des choix propres à lui et selon les attentes de sa clientèle.

L’Algérie refuse cette conception, du moins en théorie, car la réalité pour certains est tout autre. Le prix du hadj est fixé chaque année par l’État, supposant également les mêmes conditions et le même traitement pour tous les pèlerins. Ce qui ne manque pas, selon de nombreux témoignages, de créer d’énormes problèmes entre hadjis eux-mêmes et qui sont parfois très difficiles à gérer. C’est aussi une manière de pénaliser les couples qui sont séparés et d’autres qui se retrouvent entassés à huit dans la même pièce avec tout ce que suppose la cohabitation comme désagréments.

À noter que certaines agences à Alger et ailleurs, bien connues et identifiées, ne se privent pas de commercialiser le hadj VIP monnayant des extras en devises, sans jamais être inquiétées. Sur un autre registre, les professionnels du secteur dénoncent “la clochardisation du hadj”. Ils attestent : “Nous avons constaté que depuis que la ‘Beatha’ existe, le nombre de décès autant que le nombre des malades a augmenté sensiblement et une enquête devrait être ouverte à ce titre.” Et de poursuivre : “Les prestations dépérissent et nous n’avons jamais pu savoir la qualité des prestations fournies par l’Office du hadj (Onho, ndlr) dans la mesure où il ne fait l’objet d’aucun contrôle.

” Une préoccupation exprimée, à juste titre, dans le sens où l’on ignore, en effet, “qui juge de la défaillance de l’Onho”. Les agences abordent aussi “l’uniformisation du hadj” qui obéit, selon les concepteurs, à un souci économique pour maîtriser le coût de l’opération, et oublie que “c’est au détriment du pèlerin, sachant que les hadjis sont essentiellement une clientèle de seniors et de malades chroniques, qui nécessite un meilleur traitement et plus de confort”.

Plus curieux encore, depuis que le quota des hadjis alloués à l’Algérie a diminué depuis l’année dernière de 36 000 à 28 000, il a été décidé que l’Algérien ne peut effectuer le hadj que tous les cinq ans avec une plus grande restriction pour les plus jeunes et certains malades. Cela se traduit par une déclaration sur l’honneur que le pèlerin doit fournir. Il apparaît clair que l’honnêteté est loin d’être le point fort des Algériens, à plus forte raison que 40% des pèlerins sont toujours les mêmes à repartir chaque année, selon les statistiques des agences de voyages. Les autorités, pour leur part, le savent pertinemment et ferment les yeux sur beaucoup de choses…

N. S