Écrit par Rafik AIOUAZ
Malgré l’introduction de nouvelles dispositions fiscales, les acteurs de l’immobilier voient en la loi de finances 2018 une opportunité de dynamiser leur activité, notamment grâce à la possibilité de rétrocession des logements publics. Explications.
La Fédération nationale des agences immobilières (FNAI), en collaboration avec le site d’annonces immobilières Lkeria.com, a organisé hier une rencontre sur la Loi de finance 2018 et ses impacts sur le marché immobilier. Parmi les mesures apportées par la LF 2018 au secteur immobilier, la fin de l’incessibilité des logements sociaux.
Désormais, tout bénéficiaire des différentes formes de logement aidé peut céder son bien à partir du moment où son propriétaire s’acquitte de l’ensemble de la somme due au Trésor public. « Sont rétrocessibles par leurs bénéficiaires les logements sociaux participatifs (LSP) dénommés actuellement logements promotionnels aidés (LPA) ainsi que les logements bénéficiant de l’aide de l’Etat à compter de la date d’établissement d’actes de cession en leur faveur, à la condition de l’acquittement par le propriétaire du montant de l’aide publique au profit du Trésor public », stipule le texte de loi. Ce qui aura, selon les experts présents à la rencontre de la FNAI, des conséquences positives sur le marché immobilier. « Les logements qui n’étaient pas cessibles pourront apporter une dynamique au marché », estime Lotfi Ramdani, fondateur de lkeria.com.

« D’autre part, ça permettra une mobilité pour les propriétaires en investissant dans un bien qui leur correspond mieux. Le Trésor public va pour sa part récupérer des liquidités », résume l’intervenant, qui rappelle que les économies du Trésor public, permises par l’acquisition avant la fin du bail du crédit accordé aux acquéreurs, pourraient être très importantes. « Les 120 000 logements AADL, qui peuvent bénéficier de bonifications de taux, coûtent à l’Etat 240 milliards de dinars », affirme Lotfi Ramdani, expliquant que l’Etat réduit le taux du crédit bancaire accordé à l’acquéreur du logement social à travers des bonifications.
Dans le cas où l’acquéreur s’acquitte de l’ensemble de la somme due à travers un apport direct, cela évite à l’Etat d’aider le bénéficiaire pour le paiement de ses mensualités. « Ce qui représente un gain énorme pour le Trésor public », indique-t-il. La mesure qui ouvre la possibilité de vendre son logement social pourra, selon les acteurs de l’immobilier, relancer l’activité. En effet, avancent-ils, en 2016, il a été enregistré pas moins de 250 000 annonces de transactions immobilières sur les différents sites internet nationaux, en 2017, ce chiffre a baissé atteignant 110 000 annonces.
Des dispositions contradictoires et étouffantes
Autre disposition de la LF 2018, la retenue d’une part de la transaction de vente chez le notaire. Celle-ci s’élève désormais à 50% au lieu de 20% de la somme totale de la transaction. « Le notaire fait la demande au fisc, si l’acquéreur n’a pas de dettes vis-à-vis du Trésor public. En cas d’absence de réponse dans les 30 jours, la somme est débloquée pour ne pas pénaliser le marché immobilier et le propriétaire du bien », explique le fondateur de lkeria.com. Une disposition jugée « étouffante », notamment par des promoteurs immobiliers présents qui expliquent ne pas pouvoir apporter la somme nécessaire sans que leur activité soit impactée. « Le dépôt de 50% de la somme va étouffer les promoteurs qui ont pour habitude d’exercer à travers des montages financiers », rapporte un membre de l’Organisation nationale des promoteurs immobiliers (ONPI).
L’autre mesure phare de la LF 2018 concernant le secteur immobilier, le retour de la taxe sur la plus-value des transactions immobilières. Celle-ci s’élève à 5%, mais n’est pas applicable aux biens collectifs, ceux constituant l’unique propriété ou l’habitation principale détenue plus de 10 ans. « Une personne qui possède plusieurs biens immobiliers, tous ses biens sont soumis à l’impôt sur la plus-value », indique Abderrahmane Benyamina, expert en immobilier. « Ce n’est pas un problème que l’Etat ponctionne cette taxe, la question se pose en cas de travaux de rénovation du bien, par exemple.
Est-ce que les charges sont prises en compte ? », interroge l’expert qui considère la disposition comme étant en quelque sorte contradictoire avec celle permettant la vente des logements sociaux sous leurs différentes formes par leurs propriétaires. « Les professionnels n’ont pas été consultés pour trouver les bonnes solutions », regrette Abdelkrim Aouidat, président de la FNAI, qui dit craindre que la disposition sur la plus-value ou celle de la retenue des 50% pourrait conduire à des déclarations non conformes. « Cela va perturber le marché. Des dispositions devront être révisées lorsqu’on constatera les conséquences », prévient le même responsable.