La rapporteuse de l’ONU a dressé un tableau peu reluisant en la matière, bien qu’elle relève les efforts consentis par l’Etat pour assurer un toit décent aux Algériens.
Au terme d’une visite d’une semaine en Algérie, effectuée au mois de juillet dernier, la rapporteuse spéciale de l’ONU sur le logement, Raquel Rolnik, vient de publier son rapport final sur le logement convenable en Algérie. La rapporteuse a dressé un tableau peu reluisant en la matière, bien qu’elle relève les efforts consentis par l’Etat pour assurer un toit décent aux algériens. Raquel Rolnik a exhorté le gouvernement à plus de transparence dans l’attribution des logements et à la participation de la société civile dans la définition des critères d’octroi des logements sociaux. Dans ce cadre, elle constate l’absence de communication/vulgarisation sur la politique de logement promue par le gouvernement. «Pour le citoyen moyen, cette politique reste opaque. Cela affecterait, en particulier, l’accès au logement des personnes les plus vulnérables, qui souvent ignorent même qu’elles sont éligibles à un des programmes d’aide au logement», note-t-elle. La rapporteuse spéciale a souligné également le manque de concertation avec la société civile et de participation de celle-ci dans la définition, la mise en œuvre, la gestion et le suivi des politiques de logement et de planification urbaine.
Dans ce contexte, elle note, par exemple, le manque de concertation avec la société civile dans la définition des critères d’attribution des logements ou sa participation très limitée au sein des commissions d’attribution des logements publics locatifs. «C’est un obstacle majeur dans la réalisation du droit au logement en Algérie. À cet égard, j’apprécie les efforts récemment initiés par le gouvernement pour être à l’écoute de la société (par exemple par l’organisation des assises de l’urbanisme ou la tenue des premiers états généraux de la société civile), même s’ils ne se sont pas encore traduits par des changements dans la manière d’élaborer et de mettre en œuvre les politiques de logement», ajoute-t-elle. La responsable tient également à signaler le problème d’accès au logement,
«lié aux politiques de logement actuellement en place (de type standard et indifférencié) et à la spéculation sur le prix de l’immobilier». Ce qui rend, selon elle, inaccessible le marché privé de l’immobilier à la grande majorité de la population, relevant par ailleurs les nouvelles politiques d’aide au logement intervenues en particulier depuis 1999, qui ont amené plus de diversification dans ce domaine. «En effet, aujourd’hui, une partie importante de la population semble être éligible à ces programmes, en particulier au logement public locatif (LPL), qui est destiné aux ménages à très faible revenu, et au logement promotionnel aidé (LPA), destiné quant à lui à la classe moyenne. Pour la wilaya d’Alger par exemple, le cumul des inscriptions à ces programmes entre 1999 et 2010 touchait un tiers de la population algéroise», écrit-elle. Pendant sa visite, la rapporteuse spéciale a pu constater que malgré des améliorations sur le plan normatif, en particulier la réforme du code de la famille en 2005, les femmes algériennes n’ont pas encore un statut égal à celui des hommes au sein de la famille et elles continuent d’être victimes de discrimination de facto sinon de jure dans l’accès au logement. Selon la loi algérienne en particulier, les femmes ne peuvent pas prétendre à la même part d’héritage que les hommes de la famille. La rapporteuse spéciale a écouté de nombreux témoignages et reçu beaucoup d’informations sur les différents types de discriminations qui existent à l’égard de la femme. Les femmes célibataires, divorcées et veuves sont particulièrement vulnérables à la discrimination en matière d’accès au logement. Les dossiers de demandes de logements de femmes célibataires ne sont souvent même pas reçus par les commissions d’attribution de logement social et très rarement des logements sociaux sont attribués à des femmes célibataires.
Par Salim Naït Mouloud