Logement aidé par l’État ,Des formules séduisantes sur le papier, inapplicables sur le terrain

Logement aidé par l’État ,Des formules séduisantes sur le papier, inapplicables sur le terrain

Entre les bénéficiaires qui attendent la livraison de leur logement pendant des années, ceux qui “habitent des listes” car les chantiers ne démarrent pas, ceux qui se désistent à cause de l’apport initial, et la spéculation sur les unités récupérées indûment par les promoteurs immobiliers, l’échec du LSP est établi.

e logement promotionnel aidé risque de subir le même sort. Au-delà, la distorsion entre l’offre et la demande, conjuguée à l’opacité dans la distribution, dissipe les espoirs des postulants aux logements aidés.

Entre les bénéficiaires qui attendent la livraison de leur logement pendant des années, ceux qui “habitent des listes” car les chantiers ne démarrent pas, ceux qui se désistent à cause de l’apport initial, et la spéculation sur les unités récupérées indûment par les promoteurs immobiliers, l’échec du LSP est établi. Le logement promotionnel aidé risque de subir le même sort. Au-delà, la distorsion entre l’offre et la demande, conjuguée à l’opacité dans la distribution, dissipe les espoirs des postulants au logements aidé. Il y a quelques jours, le ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme, M. Noureddine Moussa a fait, euphorique, la promotion du logement promotionnel aidé (LPA), destiné aux ménages dont les revenus sont supérieurs à 24 000 dinars et inférieurs ou égaux à 90 000 dinars. Il a affirmé que cette formule, lancée officiellement au mois de juin dernier, conjugue les avantages de la location-vente de l’AADL et le logement socioparticipatif ou LSP. En théorie, l’idée est séduisante. Il est à parier, néanmoins, que les contraintes qui ont entravé le succès du LSP, se poseront inévitablement pour le LPA.

À l’origine, le LSP est pensé, par ses promoteurs, comme une aide de l’État à l’accession à la propriété immobilière accordée aux postulants non éligibles au logement socio-locatif et dont les salaires, cumulés avec ceux du conjoint, ne dépassent pas six fois le SNMG. Le prix du logement est plafonné à 2 800 000 dinars dans les villes du nord du pays et 2 000 000 dans les wilayas des Hauts-Plateaux et du Sud. Pour atteindre ce prix exceptionnel d’un F3 dont la superficie se situe entre 65 et 70 m2, les promoteurs immobiliers publics ou privés, bénéficient d’un abattement fiscal sur le prix du terrain variant entre 80 et 90%.

Les bénéficiaires reçoivent, pour leur part, une aide financière non remboursable, de l’ordre de 400 000 à 700 000 DA, accordée par la Caisse nationale du logement (CNL). Ils sont, par contre, astreints d’honorer, sur apport propre, d’un premier versement allant de 600 000 dinars à 1 200 000 dinars, selon les exigences des promoteurs, qui proposent le plus souvent une vente sur plan. C’est justement à ce niveau que les failles de la formule de l’État apparaissent. Au moins la moitié des attributaires des LSP, mis sur la liste de l’APC établie par le président d’APC et approuvée par douze élus, renonce à son logement pour des raisons pécuniaires. Soit ils ne possèdent pas la totalité de la somme réclamée comme apport initial, soit ils n’ouvrent pas droit au crédit bancaire (âge avancé ou faiblesse des revenus déclarés) pour financer ce qui reste du prix du logement. Les élus locaux regrettent qu’ils ne puissent pas faire profiter les candidats aux LSP, mis sur liste d’attente, à cause de l’intransigeance du promoteur immobilier à ne prendre en compte que la liste initiale. De cette manière, il a toute latitude de spéculer librement sur les logements dont les attributaires se sont désistés. Sur les sites et journaux spécialisés dans les transactions immobilières, il est fréquent de rencontrer des annonces sur des propositions de vente de LSP à des prix nettement supérieurs à ceux homologués par l’État. L’exemple qui suit est édifiant. “J’offre promotion LSP (décision et pas acte), F3 de 88 m2 à Hammamet. Remise des clefs pour bientôt (le site et fin prêt). Le prix est de 680 unités (soit 6 800 000 dinars) ferme. Pour plus d’info contactez-moi. NB : formule avec CNL, pas de promesse de vente. Crédit bancaire sur la somme de 126 millions (de centimes, ndlr) pas pour la totalité”. En bref, pour avoir cet appart, il vous faudra avoir 480 millions cash. Il en reste 4 uniquement ! Une autre promotion à Draria, toujours en LSP. Même formule et procédure”. Au-delà les citoyens qui ne renoncent pas à leurs logements, attribués par l’APC, attendent souvent des années avant de pouvoir en jouir. Le délai de 18 mois, imparti à l’achèvement du projet, durant quatre à cinq ans, dans les meilleurs des cas. Certains chantiers ne démarrent même pas. C’est ce qui a amené la vice-présidente de l’APC de Kouba, à s’apitoyer sur le sort, de “ces bénéficiaires de logements socioparticipatifs qui habitent des listes”. Ils ont obtenu les décisions d’attribution en 2006. Leur chantier n’a pas démarré jusqu’à ce jour.

Dans l’absolu, le LPA présente de meilleurs avantages pour la catégorie de demandeurs de logements auquel il est réservé. L’apport initial est réduit à 20% du coût du logement (soit environ 560 000 dinars), payable en deux tranches. Le taux du crédit bancaire est bonifié à 1%. L’aide de la CNL est maintenue dans les proportions susmentionnées. Les conditions d’attribution des programmes de LPA aux promoteurs immobiliers sont toutefois durcies. Ces derniers doivent absolument se soumettre à un cahier de charges. Le prix du mètre carré est plafonné à 40 000 dinars. La surface du logement ne saurait être supérieure à 70 m2. Les pouvoirs publics doivent choisir, parmi les soumissionnaires, les moins-disant. Ce qui a poussé de nombreux promoteurs à affirmer que les autorités favorisent désormais “l’aspect financier au détriment de la qualité”. Un arrêté ministériel, publié dans le Journal officiel du 4 juillet 2011, stipule que “les promoteurs immobiliers doivent s’engager à ne pas vendre leur logement avant leur achèvement et l’obtention du certificat de conformité”, s’ils souhaitent ouvrir droit au crédit bancaire dont le taux est bonifié à 4%. Ils ne peuvent plus, en outre, “établir des contrats de vente sur plan ou de recouvrer, auprès des ménages bénéficiaires, toute somme à quelque titre que ce soit”. Dans le cas de retard dans la livraison des projets, ils seront soumis à des pénalités. Autant de conditions qui n’agréent guère les promoteurs immobiliers qui menacent de “bouder les programmes des logements aidés par l’État”.