Abdelbaset Ali Mohamed Al-Megrahi, le Libyen condamné pour l’attentat de Lockerbie et mort dimanche à l’âge de 60 ans des suites d’un cancer, est un homme de l’establishment qui a toujours nié sa responsabilité dans l’explosion du vol de la Pan Am en 1988. Libéré par l’Ecosse le 20 août 2009 pour raisons de santé, le Libyen avait alors 57 ans et souffrait d’un cancer de la prostate en phase terminale, selon ses médecins qui lui avaient alors donné trois mois à vivre. Depuis, son unique apparition publique date du 9 septembre 2009 devant les journalistes pendant une dizaine de minutes à l’occasion d’une visite à l’hôpital d’une délégation parlementaire de l’Union africaine.
Assis sur une chaise roulante, toussant constamment, Abdelbaset Megrahi avait alors offert le spectacle d’un homme très malade. Condamné à la prison à vie en 2001 par un tribunal spécial aux Pays-Bas, Megrahi était détenu dans la prison de Greenock, près de Glasgow (Ecosse) et sa libération a suscité une vive controverse, en particulier aux Etats-Unis d’où sont originaires la majorité des 270 victimes du vol de la Pan Am.
Né le 1er avril 1952 à Tripoli, marié et père de cinq enfants, Megrahi avait été remis en 1999 à la justice britannique par son gouvernement, avec son co-accusé Al Amin Khalifa Fhimah. Les deux hommes avaient été inculpés en 1991, à la suite d’une enquête britannique et américaine,
pour l’attentat contre un Boeing 747 de la Pan Am, qui avait explosé au-dessus de Lockerbie, en Ecosse. Lors de son procès dans un tribunal de droit écossais, qui s’était tenu en terrain neutre à Camp Zeist aux Pays-Bas à partir de 2000, l’accusé, grand et maigre, avait souvent revêtu la tenue traditionnelle libyenne, une longue tunique blanche. Megrahi, qui a fait ses études aux Etats-Unis, a fait preuve lors de son procès de sa parfaite maîtrise de l’anglais, se présentant comme le directeur du Centre des études stratégiques de Tripoli.
Selon l’accusation, ce poste n’était en fait qu’une couverture destinée à cacher ses fonctions au sein des services secrets libyens, les JSO, où il aurait exercé de hautes responsabilités, ce qu’il a toujours nié. Mais c’est son poste de chef de la sécurité des lignes aériennes libyennes qui lui aurait donné la possibilité de perpétrer l’attentat, selon l’accusation. Toujours selon l’accusation, c’est Megrahi qui aurait négocié l’achat des minuteurs électroniques MST-13 dont l’un a activé la bombe. C’est lui également qui aurait acheté à Malte les vêtements qui ont servi à entourer la bombe.
Son co-accusé Fhimah a été acquitté à l’issue du procès mais Megrahi a été reconnu coupable en 2001. Si les proches des victimes américaines se sont montrés généralement satisfaits par le verdict, plusieurs proches des victimes britanniques ont émis des doutes sur le procès, critiquant notamment le témoignage clef d’un vendeur de vêtements maltais qui aurait reconnu Megrahi. Son avocate Margaret Scott avait qualifié le verdict « d’erreur judiciaire ». Le Libyen n’a cessé de clamer son innocence. « Dieu m’est témoin, je suis innocent,
je n’ai commis aucun crime et je n’ai aucun lien avec cette histoire », avait-il affirmé en février 2001, dans une interview par téléphone avec le quotidien arabe à capitaux saoudiens Asharq al-Awsat. En 2003, la Libye a reconnu officiellement sa responsabilité dans l’attentat puis a payé 2,7 milliards de dollars en guise d’indemnisation aux familles des victimes.