Téhéran simule l’attaque d’une base étrangère en tirant des missiles et Washington renforce ses moyens militaires
Un cran supplémentaire a été franchi dans la confrontation entre l’Iran et les grandes puissances. Alors que reprenaient cette semaine à Istanbul, mais à huis clos et sans grand espoir de réussite, les pourparlers sur le programme nucléaire iranien, la République islamique a sorti ses muscles en simulant l’attaque d’une «base militaire ennemie», sans doute américaine, reproduite pour l’occasion dans le désert Dacht-e Kavir.
Baptisées «Grand Prophète 7», les manœuvres, qui doivent se terminer mercredi par des attaques de «drones-bombardiers», ont donné lieu à des tirs de plusieurs dizaines de missiles balistiques. «Avec 100 % de succès» selon Téhéran.
Dans l’esprit des gardiens de la révolution, la garde prétorienne du régime qui contrôle le programme de missiles, il s’agit de prouver «la détermination, la volonté et la capacité du peuple iranien à défendre ses intérêts nationaux». «Grand Prophète 7» prétend également «envoyer un message aux nations aventureuses» qui seraient tentées d’attaquer l’Iran – Israël et les États-Unis en tête, qui n’ont pas exclu de recourir à la force pour régler le problème nucléaire iranien.
Davantage que l’aviation et la marine, c’est son programme de missiles qui fournit à l’Iran la capacité de frapper des objectifs hors de ses frontières. Avec les Sahab-3, d’une portée d’environ 2 000 kilomètres, l’Iran est non seulement capable d’atteindre Israël, mais aussi les bases américaines dans le Golfe et au Moyen-Orient, ainsi que la base militaire française d’Abu Dhabi, aux Émirats Arabes Unis.
Fermer Ormuz
Les missiles tactiques, d’une portée de 300 à 700 kilomètres, peuvent aussi permettre aux Iraniens d’atteindre les bâtiments de la Ve Flotte américaine et la base des États-Unis au Qatar. «Même si les progrès des Iraniens dans les missiles de croisière sont plus incertains, ils ont acquis une certaine autonomie dans les systèmes à moyenne portée, qui fonctionnent très bien», explique Bruno Gruselle, à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).
Dans le domaine tactique, avec «plusieurs dizaines de lanceurs et plusieurs centaines de missiles, l’Iran est capable de frappes plus importantes» encore, poursuit le spécialiste
Dans le même temps, les États-Unis ont discrètement renforcé leur présence militaire dans le Golfe, selon le New York Times. Un geste qui vise tout à la fois à rassurer Israël sur l’engagement américain, à empêcher une éventuelle fermeture du détroit d’Ormuz et à pouvoir frapper l’Iran en cas de crise majeure. La marine américaine dispose désormais de huit dragueurs de mines. Des avions furtifs et des bombardiers F-15 ont par ailleurs été déployés dans les bases régionales.
L’Iran a menacé au début de l’année de fermer Ormuz, ce goulet d’étranglement par où transitent 35 % du brut mondial transporté par voie maritime. Le renforcement des forces américaines a été annoncé au moment où 120 députés iraniens signaient un projet de loi visant à interdire le passage du détroit aux pétroliers se rendant vers les pays européens, qui ont imposé le 1er juillet, prenant acte de l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations, un embargo total sur l’achat et le transport de pétrole iranien.
Panne de la diplomatie et renforcement des moyens militaires. Dans le contexte de crise actuelle, ces démonstrations de force ne sont pas exemptes de risques.