Le président français, Nicolas Sarkozy, a effectué un remaniement de son gouvernement transformé en équipe de campagne électorale pour garder l’Élysée en 2012.
Ce changement, qui signe la fin de l’ouverture à gauche, est notamment marqué par le départ de Bernard Kouchner qui n’aura pas réussi à se faire inviter à Alger.
L’ancien french doctor n’a pas manqué de faire des offres pressantes en ce sens. Mais ses déclarations sur la génération de Novembre l’ont rendu indésirable de ce côté de la Méditerranée. Ce n’est pas là le seul grief retenu contre lui. Il a fait peu cas du sort de Mohamed-Ziane Hasseni, le diplomate injustement pris dans les filets de la justice avant qu’il ne soit blanchi après deux ans de procédure dans le meurtre d’Ali Mécili. Membre du comité vérité sur l’assassinat de cet opposant, Bernard Kouchner s’est réfugié derrière le paravent d’une justice indépendante. Personne ne lui a jamais demandé de faire pression sur le juge d’instruction mais dans le même temps, il a affiché une incroyable déférence à l’égard de la Rwandaise Rose Kabuyé, directrice de protocole de son ami, le président Paul Kagamé.
Il est avéré aujourd’hui que l’arrestation en France de Mme Kabuyé, mise en cause dans le génocide de 1992, est le résultat d’un scénario écrit par Kouchner qui n’a jamais exprimé la moindre attention à l’égard de M. Hasseni. Cela sans compter son passé de pourfendeur de l’Algérie dans les années 1990.
Au Quai d’Orsay, il sera remplacé par Michèle Alliot-Marie, une chiraquienne pur jus qui n’a pas de contentieux avec l’Algérie. Ministre sans discontinuité depuis 2002, elle est passée de la Défense, à l’Intérieur, puis à la Justice avant d’atterrir aux Affaires étrangères. Dans chacun de ses postes, elle a effectué des visites en Algérie et y a tenu à chaque fois des propos apaisants.
Désormais à la tête de la diplomatie, il y a lieu de penser que cette ligne sera maintenue. Un bémol toutefois : Alliot-Marie n’a jamais eu la moindre velléité de s’affranchir de Nicolas Sarkozy. C’est un soldat discipliné qui ne s’écartera pas de la ligne de conduite fixée. Sa nomination est aussi le signe que la politique extérieure n’est pas la priorité de la fin du quinquennat.
Avec elle, la diplomatie française va continuer de se décider à Élysée sous la conduite du conseiller Jean-David Levitte et du secrétaire général Claude Guéant sur les dossiers concernant l’Afrique et le monde arabe. Les deux visites de M. Guéant à Alger où il a été reçu par le président Bouteflika et son Premier ministre sont un bon présage. Sur certains dossiers, comme le Sahara occidental, il ne faut pas s’attendre à une inflexion particulière.
Dans le gouvernement remanié, le dossier de l’immigration revient au ministère de l’Intérieur où Brice Hortefeux a été maintenu. C’est lui qui va poursuivre les négociations sur la révision de l’accord bilatéral de 1968 qu’Éric Besson souhaitait boucler avant la fin de cette année. Ces « négociations sont au point mort”, a assuré à Liberté un ministre français, précisant qu’elles “avancent bien avec le Maroc” alors qu’avec la Tunisie, elles se sont achevées avec la signature en juillet 2009 d’un accord sur la gestion des flux migratoires.
En visite à Paris fin août, Halim Benatallah a publiquement lancé un appel à contribution aux experts du droit des étrangers en France. Un incroyable aveu d’ignorance.
Accrochée à l’accord de 1968 qui accordait alors des privilèges aux Algériens, notre pays n’a pas pris conscience de l’évolution du droit positif qui est aujourd’hui bien plus avantageux.
Le remaniement est aussi marqué par le départ de Fadéla Amara, une fille d’ouvrier algérien qui a toujours affiché fièrement ses origines. La secrétaire d’État à la Politique de la ville, fondatrice de l’association “Ni putes ni soumises”, était en délicatesse avec François Fillon qu’elle appelle avec un certain mépris “le bourgeois de la Sarthe” (département de l’ouest de la France) qui ne comprend rien aux banlieues et est insensible, selon elle, aux souffrances des couches populaires.
Son éviction avec celle de Rama Yade bien après celle de Rachida Dati fait de Nora Berra la nouvelle figure de la diversité même si elle ne s’en réclame pas.
Médecin, née à Lyon, Mme Berra est originaire de l’ouest algérien. Le remaniement a aussi permis au président Sarkozy de promouvoir Jeannette Bougrab, fille de harki, au rang de secrétaire d’État. Juppéiste, Mme Bougrab présidait depuis peu la haute autorité de lutte contre les discriminations. En 2007, elle a essayé de se frotter au suffrage populaire lors des élections législatives. Elle en garde un souvenir amer. Dans sa circonscription de Barbès, on appelait à ne pas voter pour la “fille d’un traître”…