Le parlement algérien a récemment adopté une disposition qui met fin à l’importation de la friperie, déclenchant la colère des milliers d’employés du secteur.
Cette disposition introduite dans la loi de finance 2012, adoptée le mois dernier, pourrait affecter les quelques 25 000 opérateurs du secteur algérien de la friperie.
Cherif Ferhi, président de l’association des importateurs de friperie, a évoqué l’impact négatif de cette loi sur « les dizaines de milliers de personnes pauvres qui ne sont pas en mesure d’acheter des vêtements neufs et qui s’orientent vers la friperie, qui présente des produits de bonne qualité cédés à des prix bas. »
Mais le gouvernement et le parlement ont un autre avis.
Le ministre des Finances, M. Karim Djoudi a déclaré que « l’assainissement du secteur du textile nous a coûté 60 milliards de DA, et nous avons aujourd’hui besoin de créer de la valeur ajoutée et non pas d’importer davantage ».
Quant à la Commission des finances, elle a justifié cette interdiction « par le souci de la protection de la production nationale des textiles et les risques engendrés par ces vêtements utilisés sur la santé publique ».
Le représentant de l’association des revendeurs de friperie, M .Rezkallah, a minimisé les risques de contamination ou de maladie brandis par la commission des finances parlementaire pour approuver l’interdiction de friperie. Pour lui, les importateurs se sont dotés de machines sophistiquées permettant de traiter les vêtements. Rappelons que ce même parlement avait autorisé à peine quatre mois auparavant l’importation de friperie avant de se rétracter, sur proposition du parti des travailleurs (PT). Le gouvernement a finalement introduit la proposition dans la loi de finances.
L’Association des importateurs de friperie de Ferhi a d’ailleurs menacé de mener une contre-campagne lors des prochaines élections pour inciter les citoyens à un vote sanction contre ce même parti.
Le secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs du textile et du cuir et membre de la direction du parti des travailleurs, Amar Takdjout, persiste dans sa démarche. Il déclare à la presse que « cette mesure, tant souhaitée et attendue, va stimuler et donner une nouvelle chance à la relance de l’industrie du textile ».
Mais les importateurs de friperie ne comptent pas baisser les bras.
Après avoir organisé un sit-in devant le parlement, ils comptent saisir le président de la république et le premier ministre dans l’espoir de les convaincre d’annuler cette interdiction.
Selon l’Union générale des commerçants et des artisans (UGCA), il existe 146 importateurs de friperie et 3 000 grossistes. Le secteur emploie directement et indirectement des centaines de milliers d’autres. Ces derniers comptent monter au créneau ces prochains jours et organiser des manifestations partout et à travers le pays.
En Algérie, le marché des friperies est très sollicité. Les magasins les plus réputés dans le commerce de la fripe se trouvent dans la rue Hassiba à Alger. C’est là-bas que Magharebia est allé recueillir des réactions auprès des vendeurs. Nombreux disent être sous le choc, et déçus.
Amine, propriétaire d’un commerce de fripe, nous informe que ce marché ne reçoit pas uniquement les pauvres mais possède des clients habituels issus de la classe moyenne, qui sont intéressés par les produits qu’on importe, qui ne se retrouvent pas toujours dans les magasins de vêtements neufs.
« J’ai quatre enfants et, pour les habiller, il me faut une moyenne de 40 000 DA ( 400 dollars). C’est beaucoup plus que mon salaire. Depuis plusieurs années, je viens ici dans les commerces de friperie choisir les pantalons et les pulls de mes quatre fils. Les prix sont très abordables, je trouve vraiment dommage qu’on puisse priver les familles pauvre de cet avantage », affirme Mme Madina Ouali.