« Le président de la République n’a certainement pas encore fini avec Abdelaziz Belkhadem puisqu’il y a eu «promesse» de divulguer «les véritables» causes de son limogeage. Promesse» qui a été rapportée par la presse juste après la publication du communiqué présidentiel du renvoi discourtois du ministre d’Etat et membre du Comité central du FLN de tous ses postes politiques et partisans au niveau de toutes les instances.
Il est vrai que ce n’est pas la présidence de la République qui a promis de donner les véritables causes qui ont poussé le chef de l’Etat à jeter comme une vieille chaussette, l’un de ses fidèles serviteurs. Mais s’il a été écrit quelque part que «ça se fera et ces causes sont graves», c’est qu’il y a volonté d’aller encore plus dans cette désormais affaire du sérail. D’ores et déjà, l’on remarque que le concerné, Abdelaziz Belkhadem, n’accepte de parler qu’aux médias avec qui «il s’entend».
Ce qui est sûr, c’est qu’à certains journalistes, il a affirmé qu’il ne fait aucune déclaration sur son limogeage. Mais ce n’est pas une telle sélection d’un homme pourtant connu pour être ouvert et sans complexes, qui fera taire les voix qui veulent apporter à ce dossier des éléments aussi curieux soient-ils.
Comme on le souligne souvent dans ces colonnes, tout fait est sujet à toutes sortes de supputations et ballonssondes voulant, soit faire aboutir à ce qui est recherché par le clan présidentiel ou alors brouiller les pistes pour empêcher de comprendre ce qu’il veut faire. Il y a aussi cette volonté légendaire du sérail de tenir à occuper les esprits à chaque fois que le pays a besoin de solutions impératives à ses nombreux problèmes. Après la Coupe du monde, Ramadhan, l’été, les vacances; aujourd’hui, c’est la rentrée. Premier coup d’éclat, le limogeage de Belkhadem.
L’on apprend auprès de certains milieux que le dossier n’est pas encore clos. «Bien au contraire, il est probable qu’il soit alourdi avec des éléments encore plus fracassants que l’acte du limogeage en luimême », nous disent des sources proches des services de renseignement. L’on rappelle que certains médias ont rapporté que Belkhadem est accusé d’avoir trahi le président de la République et le FLN parce qu’il a participé à l’université des détracteurs des deux. Il y a eu même pour cela une référence à une disposition contenue dans les statuts du parti qui exclut de ses rangs tout militant qui a commis un tel «impair».
Mais des responsables au FLN, comme déjà rapporté, ont précisé que cet article ne s’applique qu’à ceux qui se présentent sous d’autres bannières partisanes tout en restant militant dans ce parti. Ce qui signifie que s’il est question de «charger» Belkhadem de la trahison, c’est qu’il aurait franchi un pas que Bouteflika a jugé «de trop et dangereux ». L’on aurait vu Belkhadem «quelque part, en discussions avec des membres influents du makhzen marocain, et avec des responsables de cet Etat islamique en Irak et dans le Levant», font entendre timidement des voix.
UN PRÉSIDENT QUI NE FAIT JAMAIS «RIEN POUR RIEN»
Ceux qui le connaissent bien rétorquent alors sans hésiter que «Belkhadem est trop prudent pour commettre de telles fautes». D’autant qu’à chaque fois qu’il s’est agi d’un tel crime, ajoute-t-on, c’est le tribunal militaire qui est convoqué. «Un Belkhadem aussi docile, intelligent, clamant depuis longtemps haut et fort son soutien et son allégeance au président Bouteflika, est-il devenu à ce point encombrant et aussi désobéissant en peu de temps ?», interrogent ses proches.
L’on rappelle seulement que le pouvoir a toujours fait de lui son point de jonction avec les animateurs du courant islamiste «là où ils se trouvent». Mais «de là à ce qu’il franchisse le moindre pas dangereux, c’est qu’il y a beaucoup de choses qui sont incompréhensibles, insaisissables et non encore dites», soulignent nos sources. L’on reconnaît que la manière avec laquelle le chef de l’Etat l’a renvoyé du sérail ne peut être justifiée que par quelque chose de grave et d’alarmant.
Des proches à Belkhadem avouent qu’il est très angoissé. «Il panique, il est inquiet», disent-ils. L’ex-secrétaire général du FLN doit certainement s’attendre à une suite à son affaire. Il doit connaître les foudres du président pour l’avoir approché au moins pendant quelques années. Bouteflika a toujours été adepte des coups d’éclat dans la gestion des affaires de l’Etat. L’impulsivité qui l’anime a toujours fait le reste. Avec tout ca, de grands observateurs estiment que ce n’est pas la fin de Belkhadem.
«Ce n’est jamais la fin d’un animateur politique du pouvoir tant que Bouteflika est là, il largue qui il veut et il rappelle qui il veut lorsqu’il sait qu’il y a un intérêt à faire ça, il a bien travaillé avec ses pires ennemis et jeté ses amis sans raison», indique-t-on. Il s’est bien accommodé, en effet, d’un Saïdani «qu’il ne sent pas, nous diton, parce qu’il a vu en lui un bon exécutant de sales besognes».
C’est bien l’actuel SG du FLN qui a éraflé «la coque mythique» qui cachait jusqu’à alors le patron du renseignement «des yeux et des langues». Saïdani a même bombé le torse après avoir commis cet exploit. Mieux, tout de suite après, rappelle- t-on étonné, il devait être descendu de son podium pour céder la place à Belkhadem. «Mais les vents ont brusquement tourné à la défaveur de ce dernier et contre toute attente des plus avertis», fait-on remarquer. Beaucoup attendent avec impatience de quoi seront faits les lendemains de Belkhadem. «C’est comme s’il attendait un verdict, le verdict d’un président qui ne fait jamais rien pour rien», affirment nos sources.
Ghania Oukazi