Le froid n’a pas découragé les spéculateurs
Le marché des fruits et légumes s’affole. A peine l’hiver installé que déjà certains commerçants saisissent l’occasion pour dépouiller les clients.
Utilisant le subterfuge de la météo et faisant croire que la dégradation du temps serait un handicap pour accéder aux champs, les intermédiaires et leurs relais dictent leur loi. Depuis le début de la semaine, les prix des fruits et légumes ont connu une nette hausse. Hier, sur les étals, la courgette était proposée à 200 DA le kilo, la pomme de terre entre 45 et 60 DA le kilo, la carotte à 80 DA…
Comme si cette augmentation ne suffisait pas, les légumes secs, dernier recours des humbles foyers ont connu, pour leur part, une révision à la hausse et l’haricot blanc coûtait 280 DA le kilogramme. L’opération coup de poing menée par les pouvoirs publics contre le commerce informel s’escompte puisque des marchés entiers sont nés aux quatre coins des villes. A Bouira, c’est la sortie Sud sur la RN5 qui a fini par devenir un marché.
A l’Ouest et à moins de 5 km de la ville, au village Saïd-Abid, les accotements de la RN 28 servent de lieu de vente à des jeunes. «La lutte contre le phénomène ne peut se faire sans une stratégie à long terme. Il faut d’abord réaliser des espaces et plus précisément des marchés de gros, de demi-gros pour avoir une emprise sur ces prix et exercer un contrôle rigoureux» pense un spécialiste.
Le souci de l’autorité dans son action pour préserver la paix sociale reste une entrave à des décisions mûrement réfléchies qui tenteraient de préserver l’intérêt du citoyen et qui relèguent les droits de ce dernier à un second degré. Ce qui se passe se fait au su et au vu de tous mais aucune partie, notamment celle qui a le pouvoir de contrôle ne tente d’éradiquer le phénomène.
La mise en place du programme Syrpac mis en place pour tenter de combattre les spéculateurs, opération qui consiste à acheter la production au coût du marché pour la remettre sur les étals à des prix raisonnables, ne semble pas influer sur les prix. Précisons que par le passé la pomme de terre, très largement produite à Bouira, a connu une flambée des prix et une spéculation sans précédent puisqu’elle atteint le prix inimaginable de 150 DA le kilogramme. «La situation profite à une catégorie d’hommes d’affaires qui ont intégré la filière agricole grâce à une complicité à divers paliers de l’administration» commente un fonctionnaire.
L’immobilier et le foncier n’échappent pas à la flambée S’agissant toujours de la cherté de la vie mais concernant un autre secteur, celui de l’habitat, la wilaya 10 connaît un réel progrès. L’immobilier et le foncier à Bouira ont atteint des prix qui défient toute logique. Un simple F3 dans un quartier du centre ville coûte au moins 10 millions de dinars. Le foncier en centre-ville est cédé à 120.000 DA/m². Les logements acquis dans le cadre du LSP avec l’aide de l’Etat et à des coûts plus que raisonnables se vendent sous la table à trois fois le prix d’acquisition. Même la loi décrétant l’incessibilité pendant 10 ans en lieu et place de 5 ans ne semble pas décourager les auteurs qui trouvent toujours le moyen de contourner la réglementation.
L’unique victime reste le citoyen réellement dans le besoin. Depuis 1984, la ville de Bouira n’a pas connu une seule opération de distribution des logements sociaux. La décision du nouveau wali de réserver 1000 unités du programme LPA sur les 1800 inscrites aux citoyens ressemble à une bouffée d’oxygène surtout que ses prédécesseurs avaient sacrifié le citoyen en réquisitionnant les logements réalisés aux opérations d’éradication de l’habitat précaire, le LSP aux fonctionnaires, un quartier entier aux chefs de services des différentes administrations tout en sachant que bon nombre avaient déjà des logements… dans cette gestion approximative un marché juteux est né. La situation géographique de Bouira, rapprochée d’Alger par l’autoroute reste un facteur avantageux qui aura permis au marché de l’immobilier de s’envoler.
Les séquelles de la tragédie nationale où Bouira avait la triste réputation d’une wilaya chaude sont un autre facteur ayant privilégié ce progrès. Fuyant les campagnes, les citoyens étaient prêts à débourser pour sauver leur peau. Les «vautours» ont saisi l’occasion pour louer des garages à plus de 15.000 DA/mois.