Les limites des registres du cancer en Algérie : Nomadisme des malades et données incohérentes

Les limites des registres du cancer en Algérie : Nomadisme des malades et données incohérentes

Les médecins épidémiologistes et cancérologues ont cherché à confronter leurs données et leur travail sur les 15 wilayas de l’Ouest et du Sud-Ouest afin d’affiner les données et d’aller vers un réseau ouest des registres du cancer.

Les 19es journées du registre du cancer pour l’Ouest, qui se sont tenues hier à Oran, ont été l’occasion pour des professionnels de la santé de dire que les registres du cancer, locaux et à l’échelle nationale, devaient impérativement être plus précis et documentés. Et cela au moment où la politique de santé publique et le plan anticancer doivent s’appuyer justement sur ces registres du cancer.

D’ailleurs, d’emblée, certains professeurs tels L. Djilali et O. Boualga ont même été jusqu’à déclarer que “parler de 40 000 nouveaux cas de cancer par an ne rime à rien car le registre national du cancer n’existe pas”. Loin de vouloir provoquer une quelconque polémique, en fait, les participants venus de tout l’ouest du pays, entre médecins épidémiologistes et cancérologues, ont cherché à confronter leurs données et leur travail sur les 15 wilayas de l’Ouest et du Sud-Ouest, afin, justement, d’affiner les données et d’aller vers un réseau ouest des registres

du cancer.

Organisée par l’Agence thématique de recherche en sciences de la santé (ATRSS) et le CHU d’Oran, la rencontre avait pour objectif de présenter les registres du cancer de toute la région ouest et de confronter les statistiques, les incidences et les tendances pour chaque wilaya. Si, par les chiffres, il apparaît généralement que chez les hommes, le cancer des poumons arrive en tête, avec une incidence pour la wilaya d’Oran de 22/100 000 habitants,  le constat est le même par exemple à Tlemcen et à Adrar. En seconde position : le cancer de la vessie, du côlon et du rectum.

Chez la femme, il y a aussi une forte tendance pour tout l’Ouest avec le cancer du sein qui représente plus de la moitié des cancers. À noter une particularité dans la wilaya d’Adrar où le cancer de la tyroïde arrive en seconde position chez la femme, interpellant les personnels de santé et surtout les épidémiologistes sur les incidences des cancers radio-induits dans le sud du pays (voir encadré). Pour le cas des cancers chez les enfants, il a été demandé la mise en place du registre du cancer propre aux enfants, au moment où les cas sont en augmentation et en raison de la spécificité morphologique. Lors des débats, il en est ressorti que beaucoup d’interrogations planent sur la valeur à accorder à ces données récoltées par tous les registres du cancer, pas seulement à un niveau régional. Ainsi, parmi les aléas faussant les données épidémiologiques : le nomadisme des malades provoquant des doublons dans l’enregistrement des cas, l’absence de notification des lieux de naissance, l’absence, toujours, de dossiers médicaux communs à tous les établissements et une numérisation desdits dossiers toujours pas généralisée. D’où, les incohérences qui ont été relevées dans des registres du cancer par des participants qui les expliquent par le fait qu’au-delà de trois ans, les données sont dépassées.

D. LOUKIL