A quelques rares exceptions, tous ceux qui, partis, organisations, personnalités nationales, se sont rendus à la présidence, chez la commission Bensalah et même ceux qui ne s’y sont pas rendus, plaident pour une limitation des mandats présidentiels à deux. De loin, c’est le seul point qui fait l’unanimité.
La classe politique, toutes tendances confondues, tranche définitivement en faveur d’un retour à l’ancienne disposition constitutionnelle introduite sous Zeroual et consistant à mettre fin aux présidences à vie. L’article 74 de la «défunte » Constitution qui se dressait comme seul obstacle à la pérennisation de Abdelaziz Bouteflika à la tête de l’Etat, avait fait, que l’on se rappelle, unanimité «contre lui», en 2007-2008. A l’exception du RCD et de quelques acteurs du pôle démocratique, tous bannis des médias à l’époque, le restant de la classe politique, associative et médiatique exécutait une campagne menée, commanditée et contrôlée par la présidence et consistant à «exhorter son excellence à réviser la Constitution et à se présenter pour un troisième mandat».
Après 2004, c’en était là un second passage en force de Abdelaziz Bouteflika qui fera sauter ce verrou constitutionnel, le 12 novembre 2008, via les deux chambres du Parlement. En juin 2011, même les partis de l’Alliance présidentielle, les organisations de masse inféodés au pouvoir et tous les relais classiques du pouvoir se prononcent pour un retour à la limitation des mandats présidentiels.
Ce «miracle» est-il dû aux répercussions de la nouvelle conjoncture internationale, dans le monde arabe particulièrement ? A des pressions internationales sur le pouvoir algérien ? A bien y regarder, il ne s’agit nullement d’une concession faite sous la contrainte. Mais d’une fausse concession faite par Bouteflika dont le règne n’est paradoxalement pas du tout menacé par cet amendement constitutionnel qui se fera certainement. Le MSP, l’UGTA, mais surtout le RND du Premier ministre Ahmed Ouyahia plaident clairement et publiquement pour la limitation des mandats. Et quand c’est Ouyahia qui le dit, c’est que cela sera ! Pour la simple raison que la chose est convenue en haut lieu. C’est, entre autres, l’une des décisions arrêtées lors des fameuses réunions secrètes des Six, qui ont regroupé Bensalah, Ziari, Bessayeh, Ouyahia et Belkhadem autour de Bouteflika en mars dernier.
C’est également l’une des mesures prises par Conseil national de sécurité lors de ses réunions à la même période. Bouteflika, dont le mandat court jusqu’au mois d’avril 2014, est lesté par un handicap majeur : un état de santé qu’il n’arrive même plus à dissimuler. Son discours du 15 avril dernier était le meilleur démenti à la thèse officielle entretenue depuis janvier 2006 autour de l’état de santé du locataire du palais d’El Mouradia. L’homme surprend, certes, à chaque fois par des périodes de rémissions spectaculaires, mais désormais, c’est de notoriété publique que le Bouteflika de 2011 n’est plus celui que les Algériens ont connu jusqu’à fin 2005. Même des acteurs les plus en vue dans le proche cercle présidentiel comme Abdelaziz Belkhadem n’hésitent plus à afficher leurs ambitions présidentielles et de manière même ostentatoire.
Et ce n’est sûrement pas par souci «de démocratie » que le SG du FLN renvoie la position du parti sur cette question du nombre des mandats présidentiels aux calendes grecques. Lui-même se disant d’ailleurs «personnellement pour un mandat présidentiel ouvert», Belkhadem est carrément, lui, dans l’après-Bouteflika. Quand il parle des mandats présidentiels, il pense aux siens et non pas par souci de «plaire» à Bouteflika.
Ceci pour la simple raison que l’application des lois n’étant pas à effet rétroactif, le prochain amendement de la Constitution dans le sens de la limitation des mandats présidentiels n’empêchera pas Bouteflika de se présenter en 2014, voire en 2019 aussi. «Si Dieu nous prête vie», dixit Abdelaziz Belkhadem…
K. A.