Les troupes de Kadhafi sont aux portes de Benghazi sérieusement menacée par le retour de manivelle impensable il y a seulement quelques jours.
Le long de la ligne de feu qui s’étire plus à l’Est, les bastions avancés de Ras Lanouf et de Brega ont cédé. Il reste, pour toutes fortifications, l’ultime rempart d’El Ajdabia placé dans le viseur des Sukoï 24, de l’artillerie et de la marine de guerre. L’expédition punitive de Kadhafi fait craindre le pire. Elle s’apparente à «la politique des la terre brûlée» qui laisse à penser que le sort d’El Ajdabia est comparable à la purge impitoyable de Zaouïa (Centre) et de Zouara (Est).
Pour toute alternative, les insurgés préconisent le recours à la «guerre urbaine» pour sauver Benghazi de l’apocalypse, en attendant l’hypothétique mandat onusien légitimant l’instauration de la zone d’exclusion aérienne qui divise la communauté internationale partagée entre l’engagement franco-britannique sans réserve en faveur de cette option, le refus sino-russe et la prudence excessive attribuée à Washington.
L’Inde, la Turquie, considérant qu’«une intervention militaire de l’Otan contre la Libye ou un autre pays serait totalement improductive» et l’Allemagne qui ne veut pas participer dans «une guerre en Afrique du Nord», ont rejoint le camp du refus. A l’exception notable du soutien de la Ligue arabe, ni l’Union européenne, ni l’Otan n’a pris une décision concrète. A Paris, le forcing français n’a pas aussi réussi à convaincre le G8 (Etats-Unis, Russie, Japon, France, Grande-Bretagne, Allemagne, Italie et Canada) qui doit se contenter tout au plus de nouvelles sanctions.
Il s’appuie sur la «donne» de la Ligue arabe pour tenter d’infléchir la position au Conseil de sécurité réuni, hier, en session extraordinaire. Mais, les réticences russes et le choix de l’option privilégiant un aide économique et politique, réaffirmée par Hillary Clinton au représentant du CNT, Mahmoud Jibril, représentent un avant-goût de la fin de non-recevoir attendue. Face à cette impasse diplomatique, le scénario de l’action militaire se complique par la reprise en main de Kadhafi qui «marque des points», selon Juppé. «L’efficacité aurait été plus grande au moment où les forces du colonel Kadhafi étaient relativement inorganisées au début du conflit, au moment où les rebelles de l’Est et de l’Ouest ont récupéré un certain nombre de villes», estime Jean-Pierre Maulny, de l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).
Il précise que «plus on attend et plus l’engagement devra être important». Au cœur du drame libyen, l’arme du pétrole a fait logiquement son intrusion. Elle est brandie à la fois par la rébellion, menaçant les pays récalcitrants de les priver de l’accès aux gisements pétroliers, et le régime de Kadhafi soucieux de remplacer les compagnies occidentales défaillantes par l’apport de la Chine, de la Russie et de l’Inde.