Libye : une feuille de route condamnée par les doubles jeux

Libye : une feuille de route condamnée par les doubles jeux

Par Kharroubi Habib,

Libye : une feuille de route condamnée par les doubles jeux

Par la qualité des participants qui y ont pris part, la conférence sur la Libye qui s’est tenue à Paris à la fin mai a suscité l’espoir modéré qu’il en résulterait un accord levant les obstacles qui contrarient le chemin vers la résolution de la crise dont ce pays est le théâtre depuis la chute du régime de Mouamar Kadhafi. Le président Macron qui en a eu l’initiative a en effet pris la précaution d’y convier les quatre principaux leaders libyens acteurs de la crise (Fayez Al Sarraj, le Premier ministre, Khalifa Haftar, le chef de l’autoproclamée armée nationale libyenne, Aguila Salah Issa, le président du Parlement, et Khaled Al Mishri, le président du Conseil d’Etat), mais aussi l’ensemble des parties régionales et internationales qui pour une raison ou une autre sont concernées par la situation prévalant en Libye.

De la conférence que l’Elysée a abritée, il en est ressorti une « feuille de route » en huit points à laquelle les représentants libyens ont donné leur accord verbal et prévoyant entre autres l’organisation des élections présidentielle et législatives le 10 décembre, la réunification des différentes armées et des forces de sécurité de l’Est (fidèles à Haftar) et celles de l’Ouest (fidèles à Al Sarraj), celle de la Banque centrale… Sauf que le moins que l’on puisse dire est que le cours des évènements intervenus en Libye depuis la tenue de la conférence de l’Elysée démontre que l’initiative française s’est réduite en fait à une énième tentative condamnée elle aussi à l’échec comme les multiples précédentes qui ont essayé de dégager un consensus libyen et international sur un processus de sortie de crise pour la Libye.

La raison en est tout simplement que les acteurs libyens que Macron a réunis autour de la table de concertation ne sont pas maîtres de leurs actes et décisions, tenus qu’ils sont par des alliances régionales et internationales dont les agendas pour la Libye se concurrencent et s’opposent. Bien qu’elle a pris part à la rencontre de Paris, l’Algérie ne s’est pas bercée d’illusions sur ses résultats au motif ancré chez ses autorités que la crise libyenne est insoluble tant que ses protagonistes libyens resteront enfermés dans ces alliances et soumis aux ingérences auxquelles celles-ci s’adonnent.

Ce qui se vérifie sur le terrain puisque à peine la conférence de Paris achevée, l’on assiste à une reprise violente des affrontements armés. Preuve s’il en est que les protagonistes libyens et leurs sponsors étrangers respectifs qui ont fait mine d’approuver la «feuille de route» élyséenne visent en fait à réaliser leur propre solution de la crise. Chaque camp espère y parvenir non par le retour à l’arbitrage s’exprimant par la voie des urnes mais en prenant militairement le dessus sur l’autre. C’est en tout cas ce qu’a entrepris de faire le maréchal Khalifa Hafter encouragé à l’évidence par ses soutiens régionaux et internationaux alors même qu’ils se sont déclarés en faveur des stipulations formulées par la conférence de Paris.

C’est dire que l’Algérie ne s’est pas trompée sur les raisons qui font que la crise libyenne perdure et qu’elle a raison de pointer comme en étant la cause principale les interférences étrangères qui parasitent et empêchent un véritable dialogue inter-libyen voué à sa solution. Tant que des parties externes à la Libye continueront à faire fans le « double jeu » d’appeler à la solution politique mais en attisant la confrontation entre les parties libyennes, le pays de Mouamar Kadhafi n’en finira pas avec le chaos où il a été plongé.