Libye : la répression aurait fait 6 000 morts

Libye : la répression aurait fait 6 000 morts

Les forces loyales à Mouammar Kadhafi ont contre-attaqué mercredi dans l’est de la Libye, où les insurgés ont réclamé un appui aérien de l’Onu contre les « mercenaires africains » présentés comme le fer de lance des partisans du dirigeant libyen.

A Tripoli, lors d’une réunion publique, Kadhafi a mis en cause les islamistes d’Al Qaïda dans les violences actuelles et a brandi le spectre d’un « nouveau Viêtnam » si des puissances étrangères intervenaient dans son pays. « Nous entrerons dans une guerre sanglante et des milliers et des milliers de Libyens périront si les Etats-Unis ou l’Alliance atlantique interviennent », a-t-il lancé devant ses partisans. « Nous sommes prêts à donner des armes à un, deux ou trois millions de personnes, et un nouveau Viêtnam commencera. Cela n’a pas d’importance pour nous. »

Sur le terrain, les insurgés ont annoncé avoir repris le contrôle du terminal pétrolier de Marsa el Brega, à 800 km à l’est de Tripoli, que les forces gouvernementales avaient brièvement reconquis dans la matinée. Mais la télévision d’Etat libyenne a affirmé que les pro-Kadhafi tenaient l’aéroport et la zone portuaire de la ville. Une nouvelle attaque aérienne a été menée à Marsa el Brega en fin d’après-midi et une bombe est tombée à deux kilomètres du terminal pétrolier.

Lors de son discours à Tripoli, diffusé en direct à la télévision nationale, le numéro un libyen a affirmé que l’insurrection en cours depuis une quinzaine de jours, imputable selon lui à des « terroristes », n’avait fait tout au plus que 150 morts, alors que des estimations internationales font état de milliers de tués (6 000 selon la Ligue lybienne des droits de l’homme). Il a proposé que la communauté internationale mette sur pied une commission d’information sur le bilan exact des combats.

A Benghazi, fief du mouvement insurectionnel, le Conseil national libyen (CNL) de trente membres mis en place dimanche a placé à sa tête l’ancien ministre de la Justice Moustafa Abdeldjeïl et a demandé aux Nations unies d’envoyer des avions « attaquer les bastions des mercenaires africains » que Kadhafi utiliserait contre son propre peuple. Le Conseil s’est toutefois déclaré opposé à une intervention de forces terrestres étrangères sur le sol libyen et s’est dit prêt à envoyer des hommes dans l’Ouest pour contraindre Kadhafi à abandonner un pouvoir qu’il détient depuis 41 ans. Un porte-parole du CNL, Hafiz Ghoga, a également évoqué l’envoi de renforts à Kadhafi par le Niger, le Mali et le Kenya, et a aussi parlé du « rôle » de l’Algérie.

Au Caire, la Ligue arabe a qualifié de « tragique » la situation mais devait adopter une résolution hostile à toute intervention militaire étrangère en Libye.

Les Etats-Unis accentuent cependant leur présence dans la région. Deux bâtiments de l’US Navy, attendus au large des côtes libyennes, ont franchi mercredi le canal de Suez pour gagner la Méditerranée. La Maison blanche a déclaré que ces navires étaient redéployés en prévision d’une possible action humanitaire, mais a souligné « qu’aucune option » n’était exclue. Le secrétaire à la Défense, Robert Gates, a souligné que l’imposition d’une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye impliquerait nécessairement une attaque contre les défenses libyennes.

Aux Pays-Bas, le parquet de la Cour pénale internationale a annoncé l’ouverture d’une enquête sur les violences.

Pour répondre à la crise humanitaire déclenchée par les violences, Paris va lancer une importante opération d’évacuation de civils égyptiens massés à la frontière entre la Libye et la Tunisie, par des rotations de gros porteurs et un bâtiment de la marine nationale. Au total, ces rotations devraient permettre d’évacuer au moins 5.000 personnes en moins d’une semaine. Selon le ministère français des Affaires étrangères, plus de 170.000 personnes ont quitté la Libye pour les pays voisins depuis le début de la crise, dont environ 75.000 vers la Tunisie, 63.000 vers l’Egypte et 800 vers le Niger.