Libye ,Feu sur Kadhafi

Libye ,Feu sur Kadhafi

Les choses s’accélèrent brutalement en Libye depuis l’adoption, jeudi soir, par le Conseil de sécurité des Nations Unies de la résolution 1973 autorisant la communauté internationale à recourir à l’usage de la force contre le régime Kadhafi.

De fait, l’on est passé, dès hier, d’une situation de guerre civile à celle d’une guerre qui éclatera à tout moment, entre une coalition internationale mandatée par l’ONU et le régime libyen. Dans la journée d’hier, déjà, des chasseurs français et britanniques ont longuement survolé la Libye.

Une première démonstration de force qui ne laisse plus de doute sur la détermination de la France, de la Grande-Bretagne, des Etats-Unis essentiellement, mais aussi d’une vingtaine de nations ayant choisi de prendre part à cette coalition anti- Kadhafi, dont un pays arabe, le Qatar. Quelle forme prendra cette intervention militaire contre Kadhafi ? Washington, qui a inhabituellement laissé le privilège de l’initiative à Paris, écarte pour le moment l’éventualité d’une intervention militaire au sol. Les Français annonçaient, eux, hier en fin d’après-midi, la toute première frappe aérienne française sur un objectif libyen. «Il y a eu un tir à 16h45 GMT sur un véhicule indéterminé» appartenant aux troupes de Kadhafi, au sud de Benghazi. L’aviation française s’est fixé deux objectifs : maintenir au sol les avions de Kadhafi pour protéger la population et tirer sur des véhicules blindés «qui menaceraient des civils désarmés ».

Mais est-ce vraiment suffisant pour venir à bout du régime libyen qui avait nettement repris l’avantage, depuis quelques jours, sur la rébellion armée ? Hier, l’armée de Kadhafi était aux portes de Benghazi où ont lieu de violents combats.

L’offensive du «Guide» a provoqué, outre des victimes dont on ignore encore le bilan exact, un exode massif de la population qui fuie la zone ouest et sud, d’où attaquent les troupes de Kadhafi, vers la zone est, encore sous contrôle de l’opposition. L’atypique dirigeant libyen multiplie les ruses de guerre, annonce d’un cessez-le-feu «immédiat» mais qu’il n’a jamais respecté, des défections de taille parmi les insurgés mais qui n’ont jamais eu lieu. Mais le plus redoutable des stratagèmes, et qu’il sait le plus efficace peut-être, c’est de pousser des fidèles à se transformer en boucliers humains.

La télévision libyenne, mais pas seulement, annonçait ainsi la présence de centaines de personnes en forme de boucliers autour de la résidence de Kadhafi et de plusieurs points stratégiques susceptibles de constituer des cibles incontournables pour les bombardements aériens des «impérialistes ». Cette opération, si elle réussit à se mettre en place, constituera un véritable obstacle à l’intervention aérienne des alliés dont l’objectif est de faire chuter le régime Kadhafi et de «protéger les populations civiles» justement.

Kadhafi, qui a déjà promis «un autre Vietnam» pour les Américains et les Français, fait tout pour susciter une intervention terrestre qu’il sait difficile à préparer et, surtout, impopulaire et dans le monde arabe et dans les opinions publiques occidentales, encore traumatisées par les précédents irakien et afghan. Politiquement mort, Mouammar Kadhafi jettera, à coup sûr, toutes ses forces pour un seul dessein : pousser vers une situation de chaos et mener une dangereuse politique de la terre brûlée.

Et c’est dans ce genre d’entreprise qu’il excelle le mieux, en 42 ans de règne absolu. C’est dire que la Libye entame une nouvelle phase dans son histoire à l’issue incertaine. Ce sera la délivrance ou le chaos.

K. A.