«L’huile d’olive serait bien au chaud, si elle est préservée en tant que produit du terroir»
Rejoindre les grandes surfaces aux normes internationales ou rester produit du terroir?
Cette année, les prévisions optimistes prévoient une récolte de 500.000 quintaux d’olives dans la wilaya de Tizi Ouzou. Certains plus pessimistes tablent uniquement sur 200 quintaux. Mais, en fait, le problème, selon une nouvelle génération de spécialistes ne réside pas dans la qualité et la quantité attendues, mais dans ce qu’il adviendra de l’huile d’olive kabyle dans un monde dominé par les marchés et leur dictature.
Une enquête parmi les divers intervenants dans la production oléicole a révélé que les avis sur l’avenir de l’huile d’olive kabyle sont partagés: pour certains techniciens, l’huile d’olive kabyle doit s’insérer dans les circuits commerciaux ou mourir. La mondialisation des marchés contraint les producteurs de la région, à adopter les méthodes de cueillette modernes pour s’agripper aux standards internationaux de commercialisation. Cela, peu de producteurs le savent et ceux d’entre eux qui ne l’ignorent, pas n’arrivent point à arrimer leurs récoltes à ces normes. Pour d’autres, cette huile ancestrale nécessite au contraire de la préserver des effets boulimiques du marché en en faisant un produit du terroir.
Les partisans du premier avis, considèrent en fait que, sur le terrain, le problème est plus compliqué que ce qu’affirment les services de la DSA. Les prévisions, optimistes ou pessimistes, ne sont pour rien dans le tableau. Lors de la cueillette, les techniciens de la direction de l’agriculture font un travail énorme dans la sensibilisation, la formation.
Ces méthodes expliquées chaque année agissent sur la qualité et la quantité de l’huile mais s’avèrent impuissantes face à l’obstacle de ramener l’huile à 1,8% d’acidité, standard international de commercialisation. Une incapacité à faire diminuer le taux d’acidité de l’huile locale qui s’accroche toujours aux moyennes de 6% à 8%. Les huileries sans raffineries seraient derrière le problème.
Beaucoup de techniciens et connaisseurs du domaine interrogés, pointent du doigt les huileries. «Celles qu’on appelle les huileries modernes sont une énorme supercherie. Celles-ci sont fabriquées, dans les pays d’origine, avec des raffineries et toute une chaîne pour des industries dérivées. Mais elles ont atterri dans notre pays, déplumées de ces raffineries. Les connaisseurs n’ignorent pas que ces huileries, sans raffineries, ne différent de rien si ce n’est qu’elles sont un peu plus mauvaises que les huileries traditionnelles» nous renseigne un ingénieur en agronomie.
Une bonne soixantaine de ces mécaniques mâchent chaque année la récolte, mais sans en faire un produit commercialisable. Elles ne font que concurrencer les 400 huileries traditionnelles. Celles-ci fonctionnant, pour certaines encore, au cheval assurant au moins, de l’avis de beaucoup de techniciens, une bonne qualité médicinale bien reconnue de l’huile d’olive kabyle.
Produit du terroir ou produit commercial, il faut choisir.
A la question sur une solution à ce problème, de jeunes ingénieurs en agronomie et domaines y afférents s’accordent sur la nécessité d’arriver au standard ou passer à une labellisation comme produit du terroir.
En effet, la notoriété de l’huile d’olive kabyle est bien assise et incontournable à travers toute l’Algérie et l’Afrique du Nord. Karim, enseignant dans une école de commerce à Tizi Ouzou, préconise de jouer sur cet atout au lieu de vouloir à tout prix rendre l’huile d’olive kabyle commercialisable. «Cela causera d’abord la perte de son goût et ses vertus médicinales reconnues.
Et puis, sa production en quantité ne produira aucun effet dopant pour l’économie locale. La wilaya de Tizi Ouzou produit presque les mêmes quantités que les autres wilayas du nord du pays. L’huile d’olive serait bien au chaud, si elle est préservée en tant que produit du terroir» affirmait-il.
En effet, une grappe d’ingénieurs joignant leurs recherches aux techniciens travaillant dans le domaine, comptent dans l’avenir produire une réflexion et présenter ses recommandations aux pouvoirs publics. Ils comptent produire une approche commerciale innovante pour protéger la spécificité de l’huile d’olive de Kabylie avec son taux d’acidité élevé.