Sans portefeuille ministériel ni à la tête du gouvernement pour la première fois depuis plus d’une dizaine d’années, Ahmed Ouyahia est désormais l’ex- secrétaire général du RND : une situation inédite pour l’homme qui aura longtemps été une des valeurs sûres du système.
En quittant le gouvernement en septembre dernier, Ahmed Ouyahia se retrouvait pour la première fois hors d’un sérail qui l’a vu prendre de plus en plus de place en fonction des missions qui lui étaient assignées et des enjeux qu’elles supposaient. Ce n’était probablement que le début d’une descente aux enfers qui se traduit aujourd’hui par son éviction de la tête du RND. Un parti qu’il présidait depuis 1999. Un parti «né avec des moustaches» et qui aura réussi l’«exploit» de rafler un nombre impressionnant de sièges à l’APN après seulement quatre mois d’existence. Ouyahia assumait cette «naissance hors normes» du parti qu’il a eu à diriger. Il assumera par la suite un nombre incalculable de mesures impopulaires allant jusqu’à déclarer qu’il était fier d’être «l’homme des sales besognes». En 1995, il était à l’origine de l’«opération mains propres». Une opération impitoyable qui a ciblé sans distinction les cadres des entreprises publiques. Des milliers d’entre eux auront été mis en prison avant qu’une grande partie ne soit innocentée par la justice sans jamais être réhabilitée. Ouyahia reviendra à la charge entre 1996 et 1998 avec l’une des mesures qui aura longtemps marqué les Algériens : les ponctions sur salaires. Présentée comme «une mesure d’austérité » censée réduire la dépense publique, elle constitue l’un des «labels» d’Ouyahia qui dira plus tard : «Quand il a fallu réduire les salaires, je l’ai fait. Quand il a fallu fermer des entreprises et licencier, je l’ai fait. Je ne suis pas de ceux qui cherchent coûte que coûte à être populaire. S’il faut à nouveau prendre des mesures impopulaires, je le ferai.» Chef du gouvernement, à deux reprises entrecoupées, membre du gouvernement, avec rang de ministre d’Etat à la Justice puis en qualité de représentant personnel du chef de l’Etat, il sera Premier ministre jusqu’à son remplacement par Sellal. En juin 1997, alors qu’il était chef du gouvernement, il conduit la liste du Rassemblement au niveau d’Alger aux élections législatives. Désigné membre du conseil national par le premier congrès ordinaire du parti en 1998 et membre du bureau national, il sera élu à la tête du RND lors de la session extraordinaire du conseil national en janvier 1999. Il a été élu à cette même fonction par le deuxième congrès du parti, en 2003 puis, reconduit lors du troisième congrès, en juin 2008. Ses déboires commenceront avec la naissance d’un mouvement de redressement. Alors même qu’il n’occupe plus aucune fonction officielle, il fait face à une fronde menée par les cadres du RND.
Yahia Guidoum dirige le mouvement de contestation depuis novembre dernier et reproche à Ouyahia une gestion autoritariste, despotique et totalement injuste depuis plusieurs années. Pourquoi Ouyahia «consent»-t-il aujourd’hui à quitter son poste ? L’homme qui a fait au fil des années preuve d’une grande capacité à rebondir saura-t-il trouver assez de ressorts pour revenir aux affaires publiques ? Les analystes le disent en orbite pour la présidentielle. Son parcours sera-t-il définitivement contrarié ? Wait and see…
N. I.
