« La loi de finances complémentaire (LFC) propose des mesures qui ont pour finalité de pérenniser la politique de l’Etat en matière de création et au maintien de l’emploi et de subvention des prix des produits de large consommation », a indiqué hier le ministre des Finances, M. Karim Djoudi, dans une interview accordée à l’agence nationale APS.
“Afin d’éviter les surcoûts à la consommation, engendrés par la flambée des prix des produits de base sur les marchés internationaux, la LFC 2011 prévoit des mesures de soutien des prix à la consommation de plusieurs produits vitaux pour la vie quotidienne des citoyens. Suite à une forte hausse de leurs prix ayant provoqué à la fin 2010 des mouvements de protestation populaire, le Gouvernement a décidé d’élargir les subventions budgétaires au sucre et à l’huile alimentaire, ce qui induira un budget supplémentaire de 27 milliards de dinars.
Les prix de ces deux produits avaient été plafonnés à 90 DA le kg de sucre et à 600 DA les 5 litres d’huile alimentaire. Pour la seule année 2011, la compensation du différentiel de prix de ces deux produits est estimée à 5 milliards de dinars, à laquelle s’ajoute la suspension des droits de douanes et de la TVA. Quant aux prix des blés et de la poudre de lait, déjà subventionnés, ils seront davantage soutenus afin d’améliorer l’approvisionnement des minoteries en vue d’augmenter l’offre de produits finis et éviter d’éventuels comportements spéculatifs. La LFC 2011 proposera, d’autre part, la baisse de la pression fiscale et la facilitation de l’impôt ainsi que des facilitations d’accès au foncier industriel et agricole. Un autre train de mesures est prévu dans le sens de la création et du maintien de l’emploi à travers la défiscalisation au titre des premières années d’activités et l’instauration d’une imposition progressive, c’est-à-dire modérée, à l’issue des périodes d’exonérations. La micro entreprise devra aussi bénéficier d’un soutien supplémentaire à travers la généralisation des incitations fiscales à tous les dispositifs de création de l’emploi en leur octroyant un régime d’imposition très assoupli après expiration des périodes d’exonération. La LFC 2011 s’inscrit dans un contexte particulier marqué, à l’échelle internationale, par la hausse des prix des différents produits et, en Algérie, par la mise en œuvre des différents statuts professionnels des secteurs».
Interrogé sur la possibilité de retourner au crédit à la consommation, M. Djoudi a estimé que la suppression de ce mode de financement en 2009 était une « décision légitime et fondée car elle puisait ses fondements dans la rationalité économique. La législation algérienne accorde, en revanche, des « avantages supplémentaires » pour toute société se lançant dans des activités industrielles naissantes qui stimule la production nationale ou même l’exportation comme par exemple l’industrie automobile. La suppression du crédit à la consommation répondait au souci de sauvegarde et d’orientation de l’épargne des petites bourses, notamment pour leur éviter un surendettement et de protéger l’économie et la production nationales, sources de création de richesses et d’emplois. La crise financière internationale a, en effet démontré, d’une manière très claire, les difficultés auxquelles ont été confrontés les ménages qui se sont engagés dans un cercle vicieux d’endettement, ayant causé la dislocation de certains rapports même familiaux ».
L’Algérie compte maintenir l’inflation aux environs de 4% pour 2011
Le ministre des Finances a indiqué que «l’Algérie mise sur un taux d’inflation contenu aux environs de 4% pour l’année 2011. C’est grâce à un effet de stérilisation d’une partie des opportunités d’épargnes soutenues par l’Etat, que nous pouvons escompter un taux d’inflation contenu aux environs de 4%. L’augmentation de la demande interne de consommation résultant du versement des salaires au titre des régimes indemnitaires et statuts particuliers avec rappel sur 2008, 2009 et 2010, suppose un risque inflationniste. Cependant, les risques d’inflation associés seront fortement atténués par les opportunités d’épargne soutenues par l’Etat pour l’accès au logement et à l’investissement productif ».
Manque de liquidités au niveau des banques, conséquence directe de la forte demande
« L’insuffisance de billets dans les bureaux de poste est le corollaire d’une arithmétique entre les approvisionnements de la Banque d’Algérie, institution émettrice de la monnaie, et la demande formulée au niveau des guichets postaux, laquelle a très fortement augmenté durant les 6 derniers mois en liaison avec les récentes augmentations de salaires des employés de la fonction publique. Dans le même sens, le recours par la Banque centrale à la création d’un nouveau billet de banque d’une valeur de 2000 DA, intervient pour satisfaire rapidement la demande de billets. Cette réponse permet à l’institut d’émission de satisfaire plus rapidement la demande de billets que s’il devait livrer cette même quantité de monnaie selon les mêmes coupures. Elle permet aussi de compléter la gamme des besoins attachés à la monnaie fiduciaire puisque cette nouvelle monnaie va exister concomitamment avec les autres billets de 100, 200, 500 et 1000 dinars. L’émission d’un nouveau billet de banque n’influe nullement sur le niveau de la masse monétaire mais uniquement sur la composition de la monnaie fiduciaire. La même quantité de monnaie fiduciaire sera redistribuée dans un assortiment différent de billets avec une proportion moindre de petites coupures.
« L’avantage de ce procédé est d’orienter les besoins de thésaurisation vers les billets de 2000 DA délaissant les coupures inférieures aux besoins de circulation monétaire. En outre, des mesures urgentes ont été préconisées par le groupe de travail mis en place sous l’égide du ministère des Finances et avec la participation de la Banque d’Algérie et du ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication pour, d’abord réduire rapidement la tension actuelle sur les liquidités au niveau d’Algérie Poste, et ensuite développer des instruments de paiement alternatifs au cash ».
Le nouveau système comptable national mis en place à la demande des professionnels
« Tous ceux qui ont répondu au questionnaire-sondage adressé en 2001 aux professionnels de la comptabilité par le Conseil National de la Comptabilité ont souligné la nécessité d’actualiser le Plan Comptable National de 1975 », a précisé le ministre qui ajoute : « ce Plan comptable ne pouvait prendre en charge un nombre important d’opérations économiques et financières nées des mutations économiques profondes en Algérie depuis presque trente années. Avant l’adoption de la loi sur la profession comptable au mois de juillet 2010, la profession était jusque-là régie par la loi de 1991 qui, à l’époque, consacrait l’autorégulation de la profession, mais depuis, des évènements sont intervenus dans le monde et notamment les scandales financiers. Ces scandales financiers ont fait que l’autorégulation a été retirée à la profession et des organes de supervision publique de la profession de l’audit ont été créés aux Etats-Unis, en Europe, en Asie et partout ailleurs et dont la composition n’inclut pas les professionnels. Ces organes de supervision publique de la profession sont chargés notamment de l’octroi de l’agrément, du contrôle de la qualité des travaux d’audit, de la formation et de la formation continue ainsi que de la discipline et du respect des règles d’éthique.
Crédit-bail : plafonnement des taux de loyer pratiqués par les sociétés publiques
« L’activité du Crédit-bail en Algérie sera encadrée » par le plafonnement des taux de loyer pratiqués par les nouvelles sociétés publiques de leasing. Les trois filiales de leasing, créées récemment par les banques publiques doivent permettre aux entreprises d’acquérir les équipements nécessaires au développement de leurs activités et de les financer sans mobiliser de nouvelles ressources financières. Le Conseil de la monnaie et du crédit avait récemment autorisé la création de deux sociétés publiques de leasing. Il s’agit de « Ijar leasing Algérie », dotée d’un capital social de 3,5 milliards de dinars, réparti entre la Banque extérieure d’Algérie (BEA) à hauteur de 65% et « Banco Esperito Santo du Portugal » (35%).
Il s’agit aussi de la Société nationale de leasing (SNL), déjà opérationnelle, dotée d’un capital de 3,5 milliards de dinars réparti entre la Banque nationale d’Algérie (BNA) et la Banque de développement local (BDL). Le Conseil avait, en outre autorisé la Société de Refinancement Hypothécaire (SRH), d’un capital de 4,1 milliards de dinars, à élargir ses activités au leasing immobilier. Réuni le 22 février dernier, le Conseil des ministres avait instruit les banques publiques de créer des filiales de leasing destinées à alléger le coût de la location vente des équipements pour les nouvelles PME, qui souhaitent recourir à ce dispositif. D’autres établissements financiers arabes à capitaux mixtes, comme la banque Al-Baraka, MLA et ALC, activent actuellement dans le Crédit-bail. Le leasing est un financement permettant l’acquisition d’un bien en échange de redevances et avec option d’un droit de propriété à l’échéance ».
Plus de 660 millions de dinars pour l’application des nouveaux statuts des fonctionnaires des finances
« Les nouveaux statuts particuliers prévus pour les fonctionnaires relevant des administrations du Budget, des Impôts, du Domaine National, de la Conservation Foncière et du Cadastre et celle du Trésor, de la Comptabilité, des Assurances et des Douanes, sont globalement estimés à 660,5 millions de dinars par an. Les statuts particuliers prévus pour les fonctionnaires de ces secteurs du ministère des Finances s’inscrivent dans la logique de modernisation de l’administration publique consacrée par le Statut général de la fonction publique, et leur conception a tenu compte des principaux enjeux et défis auxquels l’Administration des Finances.
Les dispositions transitoires de ces statuts particuliers prévoient, pour chaque administration du ministère, l’intégration, sous conditions, des fonctionnaires appartenant aux corps communs exerçant réellement les mêmes tâches et ayant les mêmes responsabilités que celles dévolues aux fonctionnaires appartenant aux corps spécifiques, explique encore le ministre. De leur côté, les régimes indemnitaires consacrent le principe d’assurer une cohérence d’ensemble entre les différentes administrations du ministère pour aboutir à des régimes équitables et ainsi réduire les écarts flagrants existants».
Vers le développement du recours aux instruments modernes de paiement
« L’Algérie aspire à développer, à moyen terme, le recours aux instruments de paiement (IP) et l’introduction de nouveaux autres modes. Les objectifs d’évolution à moyen terme consistent à développer le recours aux IP au détriment de la monnaie fiduciaire. Ceci suppose un fort développement de la monnaie scripturale et une plus grande bancarisation de l’économie. A ce titre, le décret exécutif fixant le seuil applicable aux paiements devant être effectués par les moyens de paiement à travers les circuits bancaires et financiers contribuera à cette bancarisation, à équilibrer le recours aux différents instruments de paiement avec l’objectif de restreindre notablement la place du chèque qui occupe une position trop dominante. Après la stabilisation des instruments de base et une sécurisation des échanges des banques avec leurs clientèles, nous envisageons de nouveaux modes de paiement qui apparaissent depuis quelques années et qui vont tous dans le sens d’une plus forte dématérialisation de la monnaie à savoir le e-paiement, la carte pré-payée, le m-paiement ou paiement à l’aide du téléphone mobile et le e-banking.
« La modernisation des systèmes de paiement suppose une bancarisation accrue de l’économie, a relevé le ministre, assurant que le Trésor public (Impôts, Douanes, Domaine,) et les grandes entreprises seront mobilisés pour inciter les particuliers et les opérateurs économiques à utiliser les instruments de paiement de base et de leur proposer de nouveaux moyens de paiement offrant plus de confort et de gain de temps de sorte à mettre le système bancaire et financier aux standards internationaux. Pour ce qui est des actions en cours, celles-ci concernent la dématérialisation totale des effets de commerce pour éliminer définitivement le rejet pour papier non parvenu à l’échéance de paiement, l’exploitation des dispositifs d’échanges de données informatisées (EDI) et le recours à la carte bancaire pour supporter respectivement le développement du prélèvement et le lancement du commerce électronique. Les innovations introduites au titre du système de paiement, traitent déjà les chèques, les virements, les effets de commerce, les cartes bancaires selon une moyenne de 5.5000 opérations électroniques par jour, citant également le lancement de la carte nationale de paiement et de retrait interbancaire (CIB) dans le cadre d’une opération pilote à Alger et sa généralisation progressive. Toutefois, la volumétrie des paiements par carte reste modeste, ce qui nécessite, des actions fortes de développement notamment la nécessité d’un déploiement plus intense de TPE (terminal de paiement électronique) auprès des commerçants en corrélation avec une densification des porteurs de carte, ce développement de la monétique reste fortement conditionné par l’acceptation de ce moyen de transaction.
Le gouvernement œuvre à améliorer l’environnement de l’entreprise
« La démarche du gouvernement en matière de soutien à l’investissement vise l’amélioration de l’environnement de l’entreprise, à travers une série de mesures financières, fiscales et administratives. Les mesures prises lors du dernier Conseil des ministres relatives au soutien à l’investissement et à l’emploi, constituent ainsi un pas décisif dans l’évolution de la politique économique du pays car elles ont doté l’Etat d’instruments nouveaux lui permettant d’intervenir pour soutenir le financement des entreprises. Une ligne de crédit à long terme renouvelable de 100 milliards de dinars a été, à cet effet, mise en place au profit des banques pour les soutenir dans leurs opérations de financement de projets importants. Des fonds d’investissement pour les 48 wilayas et des caisses de garanties des crédits bancaires aux PME ont été créés pour soutenir ces entreprises alors qu’un autre dispositif de garantie spécifique aux agriculteurs a été mis en place. Toutes ces dispositions doivent réduire les coûts (supportés par les entreprises) et accroître les investissements. Quant aux financements bancaires destinés aux entreprises, ils ont progressé en 2010 de 16% pour les entreprises privées et de 18% pour les entreprises publiques, une évolution qui place l’Algérie, au rang des pays émergents à croissance de crédit rapide. Pour ce qui est de l’évolution des Investissements directs étrangers (IDE) en Algérie, le compte capital de 2010 affichait un montant de 3,49 milliards de dollars (mds usd) contre 3,45 mds usd en 2009, 2,33 mds usd en 2008 et 1,37 md usd 2007.
« Ces progrès sont le fruit des mesures prises par le gouvernement en faveur de l’entreprise, visant l’amélioration de son environnement, d’abord, par une baisse de la pression fiscale et parafiscale, ensuite, par une simplification des procédures de taxation. Le développement infrastructurel à travers les programmes d’investissements publics, se traduira, par ailleurs, par un redéploiement spatial de l’activité économique, facteur de baisse de la pression sur le foncier industriel dans les régions littorales du pays ».