L’ex-président israélien Katzav inculpé de viol

L’ex-président israélien Katzav inculpé de viol

Les témoignages de trois anciennes employées de Moshe Katzav ont décidé le procureur à poursuivre pour la première fois un ancien chef d’État.

Moshe Katzav crée un précédent : pour la première fois, un président va être inculpé de viol et agressions sexuelles, ce qui pourrait lui valoir seize ans de prison ferme. Après trois ans d’enquête, ponctués de nombreux cafouillages, le procureur général israélien Menahem Mazouz a pris sa décision. Les plaintes de trois femmes qui avaient travaillé sous les ordres de Moshe Katzav lorsqu’il était ministre du Tourisme, puis président de 2000 à 2007, ont finalement été jugées «recevables». Leurs témoignages avaient déjà abouti à la démission de Moshe Katzav, mais le procureur général hésitait à inculper le président.

Toute l’affaire, qui faisait lundi les gros titres de la presse israélienne, a commencé par une erreur fatale de Katzav. Durant l’été 2006, il se plaint auprès du procureur général d’être la cible d’une tentative de chantage d’«A», une de ses anciennes secrétaires qui l’accuse faussement, selon lui, de l’avoir violée dans son bureau de Tel-Aviv puis dans un hôtel de Jérusalem. La police ouvre une enquête. Mais il s’avère très vite que le président a en fait tenté d’intimider cette jeune femme pour la faire taire. La manœuvre échoue et la secrétaire porte plainte.

«Complot»

Le scandale éclate aussitôt. Le geste d’«A» a permis de briser l’omerta. Deux autres jeunes femmes accusent à leur tour Moshe Katzav, devenu président, d’agressions et de harcèlements sexuels répétés sous forme d’étreintes et de baisers forcés. Le président proclame son innocence et affirme qu’il est la cible d’un «complot». Mais les révélations se multiplient, contraignant à la démission cet homme censé être le symbole de l’unité du pays, sans pratiquement aucun pouvoir, si ce n’est de représenter la morale publique.

Cette sortie peu glorieuse n’a pas mis fin à la procédure. Dans un premier temps, le procureur général a eu des doutes sur les témoignages des femmes agressées. Avec les avocats de Moshe Katzav, il conclut un arrangement en vertu duquel le président ne serait pas poursuivi pour viol, mais plaiderait coupable pour des délits sexuels moins graves. Cet accord déclenche la colère des organisations féminines, au point qu’il est annulé par la Cour suprême. Moshe Katzav fait alors volte-face et refuse de plaider coupable pour quelque délit que ce soit.

Le dossier semble s’embourber lorsque Menahem Mazouz décide de jouer le tout pour le tout. La bataille juridique, selon les experts, est loin d’être perdue pour l’ancien président. Mais, quel que soit le jugement, la décision du procureur aura eu le mérite, selon les associations féminines regroupées dans un collectif, «d’encourager les femmes à porter plainte en cas d’agression sans craindre que la justice refuse de les entendre, comme cela a été le cas pendant trop longtemps pour les victimes de Moshe Katzav».