Dès demain, le ministère de l’Intérieur devrait entamer l’examen des dossiers des partis politiques en attente d’agrément. Une «short list» d’une quinzaine de demandes a été établie, bien loin de la quarantaine de demandes initialement formulées. Des dossiers «peu sérieux», aux dires d’Ould Kablia. Restent en «compétition» des formations se réclamant du courant islamiste, de la famille révolutionnaire ou de celui dit démocrate.
Après des semaines de polémique autour de la possibilité ou pas des partis non encore agréés de prendre part aux prochaines échéances électorales, la situation s’éclaircit. Les agréments seront donnés à temps par le département de l’intérieur pour permettre aux nouveaux partis de prendre part aux législatives. Mais quelle est la nature de ces partis ? Combien sont-ils à attendre le fameux sésame ? Le ministre de l’Intérieur a quelque peu levé le voile sur le nombre de dossiers jugés recevables.
Pas plus de quinze dossiers
Selon Daho Ould Kablia, le nombre des demandes d’agrément a évolué de manière sensible. Une quarantaine de demandes d’agrément étaient en attente au niveau du département de l’intérieur avant que ce nombre ne soit ramené à une quinzaine. Pourquoi ? Le ministre explique que beaucoup de demandeurs «peu sérieux» ont fini par comprendre qu’ils avaient peu de chances d’être agréés et ont fini par se rétracter. Au final, les services du ministère de l’Intérieur étudieront moins de vingt demandes. Les délais seront-ils respectés ? Oui, assure Ould Kablia qui affirme que si les documents exigés par l’administration sont fournis à temps par les concernés, les agréments seront délivrés de manière à permettre aux partis de se préparer aux prochaines échéances. Se réclamant de la mouvance islamiste, de la famille révolutionnaire ou se disant plutôt démocrates, ils sont tous dans l’expectative et n’attendent plus que le feu vert de l’administration pour se lancer dans la compétition.
Djaballah, Menasra, Mohamed Saïd et Djamel Benabdeslam pour les islamistes
En force, les islamistes sont nombreux à attendre de pouvoir investir la scène politique. A leur tête, Abdellah Djaballah. Habitué à créer des partis desquels il finit par être évincé comme ce fut le cas d’Ennahda puis d’El Islah, Abdellah Djaballah revient sur la scène politique avec un nouveau parti : le Front pour la justice et le développement (FJD). Ses ambitions sont résumées dans une phrase lourde de sens. «Je ferai le maximum de concessions, sans poser de conditions, pour unir les rangs de cette mouvance et j’y crois», disait-il le jour où il annonçait la création d’un parti «qui militera pour une Algérie démocratique et sociale qui s’inspire du Coran, des hadiths et des expériences réussies des autres pays». Djaballah attend sereinement son agrément, affirmant que son dossier ne souffrait aucune lacune. Mais il n’est pas le seul à prétendre rassembler la mouvance islamiste.
Ancienne figure de proue du MSP, Abdelmadjid Menasra nourrit autant d’ambitions. Après avoir consommé le divorce avec son parti d’origine, il est aujourd’hui à la tête du Front national pour le changement. Un parti en attente d’agrément créé suite à des dissensions puis à une crise ouverte avec les dirigeants du MSP qui aura conduit à une véritable hémorragie puis la création de la nouvelle formation. Menasra se projette déjà dans l’avenir et ne semble pas du tout avoir des doutes sur son obtention du fameux agrément. Il pose des conditions pour la réussite des prochaines élections. Il exige la désignation d’un gouvernement «neutre» pour superviser l’opération de vote et l’accélération des procédures d’agrément de nouveaux partis pour leur permettre de prendre part à la compétition électorale sur un pied d’égalité que les anciens partis. Mohamed Saïd, ancien bras droit de Taleb Ibrahimi, ne s’avoue pas vaincu. L’expérience de Wafa qui n’a jamais reçu d’agrément ne le décourage point. Il ne perd pas espoir de s’ancrer dans le paysage politique et crée le Parti de la liberté et la justice (PLJ) en 2009. Il attend son agrément en tenant un discours où il opère un savant dosage entre islam et nationalisme. Lui, aussi, attend son agrément avec la certitude de l’obtenir. Djamel Benabdeslam, ancien secrétaire général du parti islamiste El Islah, a, quant à lui, lancé en octobre dernier, le Front de l’Algérie nouvelle. Il a déposé au niveau du département de l’intérieur le dossier portant demande d’agrément le 13 novembre dernier et attend toujours une réponse. Il affirme que son dossier est «complet et remplit toutes les conditions» mais n’a toujours pas reçu l’aval de l’Intérieur pour la tenue d’un congrès constitutif.
La famille révolutionnaire appelée à s’agrandir ?
Les islamistes ne sont pas les seuls à nourrir des ambitions. Se réclamant du courant nationaliste, Tahar Benbaïbèche, ancien secrétaire général du RND, dirigé par le Premier ministre Ahmed Ouyahi, annonce la création d’un nouveau parti, «Hizb el fadjr el jadid» au moment où Khaled Bounedjma a lancé le FNJS (Front national pour la justice sociale). Benbaïbèche revient sur la scène après une éclipse de plus d’une décennie. Benbaïbèche a nié que son parti allait recruter au sein de l’Onec des militants du RND expliquant que «le parti est ouvert à tous et à toutes, sans exclusive». De son côté, Khaled Bounedjma lance une initiative action ayant pour contour «l’islam religion d’Etat, l’arabe langue officielle, tamazight langue nationale ». Nul ne sait encore si ces deux dossiers font partie de ceux qu’Ould Kablia qualifie de sérieux ou pas. Les concernés eux-mêmes ne semblaient pas particulièrement inquiets du sort que réservera l’administration à leur requête.
Amara Benyounès et Ghozali en lice
Si le ministre de l’Intérieur ne s’est prononcé sur aucun dossier en particulier, des informations insistantes font état de l’agrément imminent des formations de Amara Benyounès et de Sid Ahmed Ghozali. Leurs dossiers seraient conformes. Et c’est sans doute pour cette raison que le numéro un de l’UDR expliquait attendre «sereinement» le feu vert du département d’Ould Kablia. Le chef de file de l’Union pour la démocratie et la République (UDR), Amara Benyounès, dit se préparer à un congrès qui se tiendra lors de la deuxième quinzaine de janvier 2012. «Je ne sais toujours pas s’il s’agit d’un congrès constitutif ou d’un congrès extraordinaire », disait-il, affirmant attendre la promulgation de la nouvelle loi sur les partis politiques, avant de trancher sur la nature de ce congrès. Ancien du RCD, il défend une ligne qui se veut moderne, républicaine et égalitaire. Président du Front démocratique (FD) dont il dit ignorer totalement le sort qui lui est réservé par l’administration, Sid Ahmed Ghozali, ayant occupé plusieurs hautes fonctions, évoque aujourd’hui une faillite d’un système qu’il connaît de l’intérieur. Commentant la situation dans laquelle se trouve son parti actuellement, il dira : «Le parti a été créé en 1999, en fonction de la loi fondamentale, et il est reconnu par la loi, mais vous avez un ministre de la République qui piétine la loi ! C’est là un exemple révélateur du fonctionnement du système qui ne respecte pas la loi.» Son projet, il le veut résolument démocratique. Son projet, comme celui de tous ceux qui sont dans l’attente d’une réponse, est cependant otage d’une décision de l’administration. Une décision qui, aux dires d’Ould Kablia, ne tardera pas à être rendue publique.
N. I.