L’affluence des Tunisiens pour élire une assemblée constituante « dépasse toutes les attentes », a déclaré dimanche 23 octobre à la mi-journée le président de la commission électorale (Isie), alors que plus de 7 millions d’électeurs sont appelés aux urnes pour un scrutin historique. C’est le premier scrutin libre en Tunisie depuis l’arrivée au pouvoir du président Ben Ali en 1987, chassé par une révolution en janvier 2011.
Le président de la commission a noté certaines « irrégularités » dans le déroulement du scrutin. « Certains partis continuent leur campagne et n’ont pas respecté le silence électoral » en vigueur depuis vendredi minuit, a-t-il déclaré. Il a notamment cité des « pressions sur les électeurs analphabètes » et des « SMS envoyés pour influencer le vote », sans citer aucun parti.
Plus de 7 millions de Tunisiens doivent élire une assemblée constituante de 217 membres qui sera chargée de rédiger une nouvelle constitution, neuf mois après la chute de Ben Ali. Dès l’ouverture du scrutin dimanche à 7h (8h heure française), de longues files d’attente s’étiraient devant les bureaux de vote.
Pour la mère de Mohamed Bouazizi, le jeune homme qui a déclenché la « révolution du jasmin » en s’immolant par le feu le 17 décembre à Sidi Bouzid, « ces élections sont une victoire pour mon fils qui est mort pour défendre la dignité et la liberté ».
« J’espère que les gens qui vont gouverner garderont ce message à l’esprit et témoigneront de la considération à l’égard de tous les Tunisiens, y compris les pauvres », a poursuivi Manoubia Bouazizi, dans une interview accordée à Reuters.
Le scrutin doit accoucher d’une assemblée chargée de rédiger une nouvelle Constitution. Il va aussi entraîner la formation d’un gouvernement intérimaire dans l’attente d’élections législatives et présidentielle.
Les islamistes du parti Ennahda (Renaissance) sont les favoris de ce scrutin, dont le déroulement et les résultats seront observés avec attention dans le reste de la région, où des régimes autocratiques vacillent ou ont déjà sombré à la suite de la révolution tunisienne.
Une victoire des islamistes serait une première pour les islamistes dans le monde arabe depuis celle enregistrée en 2006 par le Hamas palestinien.
En décembre 1991, les islamistes du Front islamique du salut (Fis) avaient remporté le premier tour des législatives en Algérie voisine, un scrutin finalement annulé par l’armée et qui avait été suivi par une décennie de violences.
La communauté internationale suit attentivement ces élections, qui pourraient fournir une indication des développements à attendre dans les bouleversements en cours dans le monde arabe.
La mise en place d’une assemblée constituante signera définitivement la fin de l’ère du président Ben Ali, déchu en janvier 2011 après 23 ans de pouvoir.
Avec Reuters et AFP
