En route pour les réformes dans une assemblée « béni-oui-oui ». Le président algérien Abdelaziz Bouteflika a réaffirmé dimanche, au terme d’un conseil des ministres marquant la rentrée politique, son engagement de respecter le calendrier des réformes politiques qu’il avait annoncées lors de son discours à la nation le 15 avril dernier. Confronté depuis janvier dernier à une vague de contestations politiques et sociales, Bouteflika, 74 ans, tente de desserrer la pression autour de lui en engageant une série de réformes politiques.
« Cet attachement au calendrier politique ainsi qu’à la prise en charge des propositions émises par la majorité des participants à la consultation, marquera aussi les prochaines étapes des réformes politiques que j’ai initiées, y compris le projet de révision de la Constitution qui aboutira devant le Parlement dès la tenue des prochaines élections législatives », a-t-il déclaré lors du Conseil des ministres tenu dimanche 29 août.
Dés l’ouverture de la prochaine session du Parlement le 4 septembre, des projets de loi devront être discuté et adopté par les députés puis par les sénateurs.
Au menu : le nouveau régime électoral avec de nouveaux mécanismes de contrôle et de transparence, la loi sur le mandat électif avec interdiction de cumul de mandats et une plus grande place aux femmes sur les listes électorales (un tiers) et la loi sur le pouvoir des collectivités locales avec une décentralisation plus affirmée.
Révision de la Constitution
Ces projets approuvés dimanche par le Conseil des ministres seront suivis le mois prochain par deux autres projets, emblématiques des réformes, la loi sur les partis politiques et la loi sur l’information. Tout ce processus législatif sera couronné par une révision de la Constitution, prévue juste après les législatives d’avril 2012. Celle-ci avait déjà été révisée en novembre 2008 pour permettre à Bouteflika de s’assurer un troisième mandat.
« La teneur des différents projets de lois que vient d’approuver le conseil des ministres traduit la volonté des Algériennes et des Algériens de faire progresser davantage le système politique démocratique et pluraliste qu’ils ont institué voilà deux décennies, et qui est une réalité dans les assemblées élues, sur la scène politique et au niveau du mouvement associatif », insiste Bouteflika.
Celui-ci explique encore que « la bataille du développement sera désormais confortée par les réformes politiques que l’Algérie a souverainement décidées et qui seront concrétisées au cours des prochains mois, comme j’en renouvelle solennellement l’engagement ».
Avants-projets vivement critiqués
Ces avant-projets de loi, notamment celui s’agissant du code de l’information, de la loi sur le parti politiques et le régime électoral, avaient suscité de vives critiques en Algérie avant même qu’ils n’atterrissent en Conseil des ministres.
Alors que le chef de l’Etat s’est engagé à dépénaliser les délits de presse, le code concocté par le département de la communication maintient les peines de prison contre les journalistes et instaure un tour de vis autour de la presse électronique qui devrait être régentée au même titre que la presse écrite et audiovisuel.
La loi sur les partis qui contient 95 articles inquiète la classe politique particulièrement la disposition concernant la limitation des mandats des chefs des formations politiques. Certains y ont voient une intrusion directe du ministère de l’Intérieur dans le fonctionnement interne des partis.
L’avant-projet de révision de la loi électorale n’est pas en reste. L’article 82 qui stipule que les candidats à l’APC, à APW ou à l’APN doivent «être de nationalité algérienne exclusive, d’origine ou acquise depuis vingt ans au moins» provoque un tollé notamment chez les Algériens résidant à l’étranger.
« Il y a un une contradiction entre le discours et les orientations du chef de l’Etat et les agissements de certaines personnes au pouvoir. Nous avons constaté après avoir pris connaissance du contenu des avant-projets de loi relatifs aux partis politiques, aux associations et à l’information qu’il n’existe pas de volonté pour le changement démocratique», se désolait Louisa Hanoune, porte-parole du PT (Parti des travailleurs).
Assemblée croupion
Confiés à une assemblée et un sénat peu représentatifs – l’opposition y est absente-, ces lois devront encore souffrir du manque de crédibilité dès lors qu’ils seront adoptés par un parlement croupion dont la composante est majoritairement acquise au président.
Issue des législatives de mai 2007, l’actuelle assemblée est la plus mal élue depuis l’ouverture démocratique en Algérie en 1988. Le taux de participation à se scrutin ne dépassait pas la barre des 35 %.
Contestations sociales et politiques
Confronté depuis janvier dernier à une vague de contestations politiques et sociales, le président Bouteflika, 74 ans, tente de desserrer la pression autour de lui en engageant une série de réformes politiques.
Sceptique sur la volonté du chef de l’Etat d’instaurer un vrai régime démocratique – ce qu’il n’a eu de cesse de refuser depuis son arrivée au pouvoir en 1999 – l’opposition considère l’initiative de Bouteflika comme un replâtrage du système ou une tentative de gagner du temps pour achever son troisième mandat avec le moins de remous possible.