Les résultats préliminaires de l’élection de l’Assemblée constituante donnent le parti islamiste Ennahda vainqueur du scrutin du 23 octobre. Après 55 ans de dictature policière, la Tunisie est sur le point de se transformer en république islamique.
Le parti islamiste Ennahda pèsera de tout son poids dans l’élaboration de la future Constitution de la République tunisienne. Hier, soit 48 heures avant la présentation officielle des résultats, la formation de Rached Ghannouchi a multiplié les déclarations pour annoncer sa victoire. Ainsi, certains responsables d’Ennahda ont revendiqué une soixantaine de sièges sur les 217 que compte l’Assemblée constituante. Une tendance qui semble plausible puisque les résultats du vote à l’étranger, annoncés partiellement hier soir, donnent Ennahda largement devant avec 9 sièges sur 18. Les autres sièges sont partagés entre le Congrès pour la République (4), Ettakatol (3), le Pôle démocratique moderniste (1) et la Liste pour la liberté et le développement (1). «Ces résultats sont provisoires car les procès-verbaux ne nous sont pas parvenus. Une fois que nous les aurons, nous procéderons à toutes les vérifications et contrôles pour valider définitivement ces résultats», a précisé un des responsables du contrôle du scrutin à l’étranger. Sur le plan national, le Congrès pour la République (CPR) de Moncef Marzouki (centre gauche) estime avoir obtenu près de 15% des suffrages, un taux qui ferait de lui la seconde force politique de cette Assemblée. Le parti Ettakatol (progressiste) revendique, lui aussi, la seconde place avec un taux de 16%. En fait, la première Assemblée constituante se caractérisera par un jeu d’alliances entre les principales formations politiques. Dans le cas d’Ennahda, ce parti devrait composer avec des membres élus sur des listes indépendantes. Actuellement, le nombre exact de ces élus représente une véritable inconnue. Le «camp» opposé devrait être constitué d’Ettakatol, du Parti démocrate progressiste (PDP) et du Parti des travailleurs tunisiens (PTT).
Ennahda rassure
Les informations sur une victoire écrasante des islamistes et ses conséquences sur l’avenir du pays ont été diversement perçues en Tunisie. Hier après-midi, un groupe de jeunes de diverses tendances politiques a manifesté devant le Centre de presse de Tunis, pour dénoncer «une fraude électorale» au profit d’Ennahda. Plusieurs représentants d’instances de contrôle des élections ont reconnu l’existence de «certaines irrégularités » lors de l’opération électorale de dimanche dernier. Mais aucun n’a fait état de «fraude». Ennahda, qui se prépare à jouer les premiers rôles dans les prochains jours, a tenu à rassurer ses «partenaires étrangers». «Nous voulons rassurer nos partenaires économiques et commerciaux, ainsi que tous les investisseurs : nous espérons très rapidement revenir à la stabilité et à des conditions favorables à l’investissement. Les priorités de la Tunisie sont claires : c’est la stabilité et les conditions pour vivre dans la dignité, ainsi que la construction d’institutions démocratiques », a déclaré Abdelhamid Jlassi, directeur du bureau exécutif du parti islamiste à l’AFP.
T. H