Les saisies de psychotropes et les arrestations en forte hausse
Les dealers qui détiennent le “monopole” des drogues dans les cités et quartiers recourent de plus en plus aux comprimés hallucinogènes. Ce qui suggère un contrôle plus rigoureux des pharmacies et des laboratoires. Mais, qu’en est-il de l’héroïne qui émerge sur le marché des drogues dures ? Révélations.
Le trafic des psychotropes a pris des proportions alarmantes. Les pouvoirs publics viennent de tirer la sonnette d’alarme, et ce, à la lumière des saisies opérées par les services de la Gendarmerie nationale depuis janvier dernier. En effet, selon un bilan exhaustif communiqué par la cellule de communication de la GN, 42 577 comprimés de psychotropes, toutes marques confondues, ont été récupérés sur des réseaux organisés, des dealers et des jeunes consommateurs. Au prix de 400 à 600 dinars l’unité, selon les besoins, l’intensité et l’efficacité, “Madame courage” a investi les cités et les quartiers, les écoles et les universités, les milieux familial et professionnel. La capitale du Hoggar et du Tassili, en l’occurrence, Tamanrasset vient en tête du hit-parade de la commercialisation et de la consommation de ces drogues prohibées. Ainsi, les unités de la GN ont saisi dans cette région frontalière 14 870 comprimés, suivie des wilayas d’Oran à l’ouest et de Blida au centre du pays. Cela va sans dire que toutes les villes sont touchées par ce fléau, indique encore le rapport de la GN qui met, par ailleurs, en relief les grandes opérations coup-de-poing menées à travers les points noirs et les lieux de prédilection. Ces interventions ont permis le traitement record de 1 930 affaires et l’arrestation de 2 971 individus, dont des mineurs, des étudiants, des fonctionnaires, des toxicomanes récidivistes, de jeunes écoliers et autres narcotrafiquants notoires. À ce sujet, note-t-on, une moyenne de 100 à 150 personnes est incriminée à travers les principales wilayas d’Oran, Alger, Tlemcen, Annaba, Constantine, El-Tarf, Sétif et Tipasa. Mais aussi la région de Kabylie et le Grand-Sud du pays. Il faut dire que des pharmacies et des personnels de laboratoires sont souvent derrière ces réseaux. Pour les uns, ils délivrent des ordonnances de complaisance, pour les autres ils assurent le “soutien” sous le couvert du manque de médicaments. Notamment au profit des malades souffrant de maladies chroniques et qui nécessitent des calmants inscrits dans la liste “A” de la nomenclature. Ces procédés frauduleux et dangereux ont provoqué des pics inquiétants de trafic et de contrebande, notamment dans la wilaya de Tlemcen. En effet, selon un bilan communiqué par le colonel Noureddine Boukhebiza, six réseaux, dont trois basés à l’étranger, tous spécialisés dans le trafic de cannabis, ont été démantelés alors que 112 personnes ont été mises en examen et écrouées. Parmi ces individus, figurent des receleurs et des trafiquants de psychotropes, d’autant que les deux substances vont sur le même marché pour empoisonner la jeunesse en mal de repères.
Qu’en est-il de l’héroïne ?
Cet état de fait a poussé les experts de l’Institut national de criminalistique et de criminologie à procéder aux analyses profondes avant d’émettre des alertes. Ainsi, durant les années 2010 et 2011, le laboratoire des drogues, relevant du département de toxicologie de l’INCC a traité plusieurs affaires liées à la substance Trihexyphenydine. Résultat : 5 000 comprimés et gélules saisies, un constat alarmant du fait que cette substance a fait aussi l’objet de tentatives de dissimulation dans des produits alimentaires (gâteaux secs) destinés aux personnes incarcérées à la maison d’arrêt de Berrouaghia (Médéa). Raison pour laquelle, il a été recommandé à ce que le ministère de la Santé confirme l’usage toxicomanogène de cette substance et à ce que le ministère de la Justice ajoute cette substance dans la liste des produits psychotropes. Les saisies opérées, le mode opératoire et les mélanges des matières ont inquiété les autorités sécuritaires à tel point où des analyses poussées ont également été effectuées à l’INCC de Bouchaoui. Notamment durant la période allant d’octobre à novembre 2010 où six affaires liées à l’héroïne ont été traitées. Il ressort, que les trafiquants mettaient en évidence du paracétamol et de la caféine. La saisie de 22 grammes dans la localité de Ben Zeraga, à Alger a aussi permis aux enquêteurs de déterminer avec précision que l’héroïne récupérée avait la forme d’une pâte qui dégageait une odeur de vinaigre, un élément essentiel dans la fabrication de l’héroïne. “Cette dernière affaire d’héroïne prouve inéluctablement que le processus de coupage s’effectue en Algérie. Ceci en considérant le fait que l’héroïne pure soit importée de l’extérieur. Toutefois, l’aspect physique de la saisie et son odeur si caractéristique laissent penser que tout le processus de fabrication de cette héroïne a été réalisé en Algérie”, indique un rapport officiel. D’ailleurs, la disponibilité de tous les ingrédients inquiète davantage, notamment depuis la découverte des champs de pavot à opium à Adrar, dont la quantité saisie en 2007 dépassait les 70 000 pieds, une quantité suffisante pour produire jusqu’à de 100 kg d’héroïne pure. Mais “à l’issue de son coupage, elle donnera lieu à une quantité supérieure à une tonne d’héroïne”, nous dit-on encore. Et de conclure : “à partir de ces données, il est recommandé dès à présent d’étendre les investigations menées lors des saisies d’héroïne, d’une part, aux produits pharmaceutiques quelle que soit leur forme physique (solides ou liquides) et ceci afin d’identifier l’existence des procédés de coupage de l’héroïne en Algérie et, par ailleurs, à tout type de produit chimique permettant d’identifier l’existence d’un procédé de fabrication par d’éventuels laboratoires clandestins, tout en sachant qu’un laboratoire clandestin de fabrication d’héroïne nécessite des moyens dérisoires et des produits dont la totalité est disponible dans le marché local”.
F B