«Ils attendent peut-être la fin de l’année 2011 pour nous donner ces fichus résultats»
Pour la majorité des étudiants rencontrés, la responsabilité de cette situation incombe à Rachid Harraoubia.
L’université algérienne va mal! Elle est même tombée dans une crise latente qui dure depuis des années. Grèves et baisse du niveau de l’enseignement sont le quotidien des étudiants. Mais cette année, la donne est encore plus grave: les portes de certaines universités n’ont pas encore ouvert alors qu’officiellement la rentrée universitaire était fixée au dimanche 2 octobre. Pis encore, non seulement l’année n’a pas encore commencé mais même les délibérations des rattrapages de la précédente année n’ont pas été communiqués. Cela au moment où d’autres universités sont sur le point d’achever leur premier semestre.
Le département d’architecture de la faculté Saâd-Dahleb de Blida en est la meilleure preuve. Les étudiants que nous avons approchés lors d’une virée dans cette faculté ont affirmé à l’unanimité que les cours n’ont pas encore commencé. «Nous sommes restés dans l’expectative. On ne sait même pas dans quel niveau on étudiera l’année prochaine!», pestent ces étudiants, mécontents. «Les autres facultés sont sur le point de passer les examens du premier semestre alors que nous on est même pas encore inscrits», ajoutent-ils. «Comment veut-on former les élites de demain avec des années universitaires qui dépassent rarement les 6 mois», lance Khaled, étudiant en deuxième année d’architecture. L’université de Blida n’est pas un cas isolé puisque d’autres facultés peinent également à commencer la nouvelle année vu que la précédente n’est pas totalement achevée. Etudiante en anglais, Célia affirme que les étudiants de ce département n’ont pas encore obtenu les résultats des délibérations. «Depuis quelques jours, nous avons les notes des rattrapages mais nous devons attendre encore pour avoir les résultats des délibérations», a-t-elle affirmé. «Ce n’est qu’à partir de là que nous pourrons nous inscrire pour la nouvelle année», poursuit-elle. Même son de cloche au niveau de l’université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou. Les étudiants sont également dans le flou tout comme leurs autres camarades. Etudiant en géologie, Larbi affirme que le début des cours dans son département ne se fera sans doute pas avant la fin novembre, vu que les résultats des rattrapages n’ont pas été communiqués.
«Ils nous ont dit d’attendre après l’Aïd El fitr. On a attendu. Puis ils ont promis que cela ce fera après celui d’El Adha, en vain…», raconte Larbi d’un air dépité. «Ils attendent peut-être la fin de l’année 2011 pour nous donner ces fichus résultats», dit-il. «Pourquoi jouent-ils de la sorte avec notre avenir?» s’interroge-t-il. Pour son ami Arezki, étudiant dans le même département, la véritable question est: «Pourquoi ces autorités font-elles preuve d’autant d’impartialité? Certaines universités ont repris et d’autres non». Ainsi, Arezki demande que cette affaire soit élucidée le plus tôt.
«Les responsables de cette anarchie doivent être démasqués et prendre leurs responsabilités», assure-t-il fermement. «Pour l’heure, c’est grave. L’université algérienne est en déperdition depuis des décennies. C’est le moment du changement», lâche-t-il sèchement. Pour la majorité des étudiants rencontrés, le principal responsable de cette situation est incontestablement le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Rachid Harraoubia.
«Lors de notre grève de l’année dernière, Harraoubia n’a rien voulu savoir, il faisait la sourde oreille à nos revendications légitimes, ce qui n’a fait qu’envenimer la situation. Si l’on avait pas été sages on aurait jamais arrêté la grève car le ministre ne nous a fourni aucune réponse favorable aux revendications exprimées. Il ne nous a d’ailleurs fourni aucune réponse. Il n’a fait que nous dédaigner», déplore-t-il. Harraou-bia est également mis sur le banc des accusés par les étudiants de droit et de médecine. «Où sont toutes vos promesses M. le ministre?» se demandent ces étudiants.
«Aucun des problèmes que vous déviez régler n’a été solutionné», crient-ils. «Et les facultés de droit et de médecine ou nous devions emménager au début de l’année scolaire où sont-elles?» s’indignent-ils. Il est vrai que lors de l’annonce du début des inscriptions universitaires pour les nouveaux bacheliers, le ministre avait publiquement annoncé que ces universités seront livrées en septembre. «La faculté de droit devait être réceptionnée au mois de mai; elle a pris un peu de retard, mais elle sera prête pour septembre, elle est en train d’être équipée», a certifié le ministre au mois de juillet dernier lors d’une conférence de presse. Pour la faculté de médecine la donne est un peu plus compliquée, «elle accuse un petit retard mais j’ai reçu des garanties pour qu’elle soit réceptionnée pour la rentrée universitaire. Concernant les équipements nécessaires nous sommes en train de les acquérir», avait t-il garanti. Nous sommes au mois de novembre et toujours point de faculté livrée…
Les soucis ne s’arrêtent pas là pour le ministre. Une nouvelle grève pointe à l’horizon. Cette fois, ce sont les enseignants qui menacent de faire grève. Les sections locales du Conseil national des enseignants du supérieur passent à l’offensive. A Sétif, Bordj Bou Arréridj, Alger et M’sila, les enseignants ont opté pour des mouvements de grève afin de dénoncer des problèmes locaux. Ils ont cependant le soutien de leur direction nationale. Voilà donc que même sans avoir commencé, l’année universitaire s’annonce déjà rude pour Rachid Harraoubia.