Le président américain prononcera un important discours aujourd’hui au Caire
Les regards des musulmans mais surtout des arabes seront suspendus aujourd’hui aux lèvres du président américain Barack Obama qui devra prononcer un discours dit de « réconciliation » au Caire.
Un discours qui fera date quelle qu’en soit sa teneur, du fait qu’il soit très attendu et par les partisans et les adversaires des Etats-Unis. D’abord un symbole : Barack Obama à choisi de s’adresser aux musulmans à partir d’un haut lieu de l’Islam, à savoir l’université d’Al Azhar. Ensuite le choix de l’Egypte pour ce qui s’apparente à un autre discours d’investiture aux yeux des populations arabes. Malgré le régime despotique de Hosni Moubarak qui ne plairait pas forcément à Obama, du moins en théorie, « Misr Oum Eddounia » reste le porte-parole du monde arabo-musulman. C’est aussi l’une des pièces les plus importantes sur l’échiquier moyen-oriental. Et à ce titre, elle s’impose au nouveau président américain comme tribune de choix pour s’adresser aux arabes et aux musulmans. Mais avant cela, Obama a fait un pèlerinage furtif hier en terre d’Arabie saoudite, histoire de ne pas fâcher un royaume aux ordres et lui conférer quelque respectabilité dans le traitement des problèmes du Proche-Orient. Mais au-delà du protocole et le ménagement des susceptibilités, c’est la teneur des propos de Barack Obama qui retiendra l’attention du monde entier. Que dira donc le nouveau président américain aujourd’hui ? Ira-t-il jusqu’à prononcer un discours de rupture par rapport à ceux de ses prédécesseurs ?
La « Baraka » d’Obama…
Va-t-il lever l’hypothèque israélienne qui a tué tous les espoirs de régler définitivement un conflit vieux de 61 ans ? Réussira-t-il à imposer un changement dans une région qui a été transformée en poudrière par ce statu quo ? Ou alors laissera-t-il les pacifistes et tous ceux qui attendent de sa part un grand geste digne des grands hommes, sur leur faim pour confirmer la formule axiomatique qui veut que la politique étrangère américaine ne changerait pas avec le changement des hommes ? En attendant de juger sur pièce, comme le recommandent les experts, on retiendra que les déclarations préliminaires de Barack Obama permettent d’espérer au moins une autre façon d’approcher l’équation moyen- orientale, et une vision du monde musulman débarrassée des préjugés sectaires et quelquefois racistes des administrations successives notamment celle de Bush. C’est en cela que Barack pourrait apporter de la « Baraka » au Moyen-Orient et la paix en Palestine. Le fait que les autorités israéliennes soient craintives aux entournures sur ce que dira Obama est en soi un signe que le changement est peut-être arrivé. Hier à son arrivée à Ryad, Obama a dit vouloir « remettre sérieusement sur les rails » le processus de paix au Proche-Orient. Il a également souligné la nécessité « d’une certaine fermeté » à l’égard d’Israël sur la création d’un Etat palestinien et la colonisation juive.
Change ? Wait and see…
Ce ne sont certes que des paroles, mais elles méritent d’être soulignées tant le discours américain sur le conflit israélo-palestinien était jusque-là à sens unique. Il ne faudrait pas s’attendre aujourd’hui à un plan en dix points et un dessin sur la solution du conflit, mais Obama compte apparemment jeter les jalons d’un processus de pacification de la région qui s’appuierait évidemment sur les intérêts vitaux des Etats-Unis. Des intérêts qui semblent s’entrechoquer avec ceux de l’Etat hébreu, d’où ce nouveau ton de Obama qui tranche avec l’assurance tous risques souvent délivrée par George Bush aux responsables israéliens. Cette politique de la main tendue au monde musulman a en effet de quoi inquiéter Israël. « Il existe une coopération intense entre Israël et les Etats-Unis, mais les désaccords se sont récemment aggravés », a admis hier le ministre des Transports Israël Katz. Ce rapprochement entre Obama et le monde arabe semble même remettre en cause la sainte alliance américano-israélienne si l’on s’en tient aux propos de Moshé Arens, l’ancien ministre des Affaires étrangères du Likoud qui a appelé le Premier ministre à « ne pas se soumettre aux ordres de Washington ». « C’est inacceptable, nous ne sommes pas une république bananière et nous devons refuser de nous mettre à genoux ! » Ces réactions effarouchées qui, au demeurant, ne font pas consensus en Israël, font suite aux déclarations médiatiques de Barack Obama dans lesquelles il a intimé à l’Etat hébreu d’arrêter la colonisation en Cisjordanie et d’accepter sans préalable la solution de deux Etats vivant côte à côte au même titre que toute la communauté internationale. Les niet de Netanyahu et de tous les extrémistes israéliens sur ces deux points ressemblent curieusement aux messages tout aussi extrémistes débités par Ben Laden et du sulfureux Ayman Zawahiri dans lesquels ils traitaient Obama de « criminel ». C’est peut-être en ces deux camps irréconciliables que le président des Etats-Unis va tenter aujourd’hui d’ouvrir une nouvelle page au Moyen-Orient. « Quelle que soit leur confession, ce sont ceux qui construisent et non pas ceux qui détruisent qui laissent derrière eux un héritage durable ». Ces propos de Obama tenus sur le plateau de Canal + dénotent en tout cas une volonté de changement. Change he can ? Wait and see.